A ne pas manquer : Alep vécu de l’intérieur, au quotidien.
C’est ce que nous devrions tous savoir. Les témoignages de personnes qui sont sur place ou ont vécu à Alep s’accumulent, démontrant que ce qui est raconté dans nos médias est complètement biaisé.
La seule conclusion froide et logique que nous pouvons en tirer est que nous sommes gouvernés par des criminels qui protègent d’autres criminels avec la bénédiction des médias.
Ces conflits par pions manipulé interposés qui servent de chair à canon pour le profit de quelques psychopathes cravatés planqués dans leurs bureaux feutrés sont sinistres. C’est tellement écœurant que nous devrions tous être dans la rue pour exiger que cessent ces ignominies. Ces populations martyrisées, c’est nous. Comment ne le voyons-nous pas ?
Croyez-vous vraiment que nous avons plus de valeur aux yeux de ces pouvoir criminels que les Syriens et autres victimes des guerres qu’ils ont initiées ? Ont-ils jamais hésité à nous envoyer à l’abattoir pour leurs propres intérêts ? La différence est juste une question de circonstances. Nous sommes cette fois-ci dans le camp des bourreaux. Mais méfions-nous : à force de sommeil et de lâcheté, il se pourrait bien que nous changions de camp.
Je ne crois pas trop à la justice humaine, elle ne profite généralement qu’aux plus forts. Par contre, je crois à la loi des causes et des conséquences. Nous avons tous, individuellement, à affronter directement ou indirectement les effets des actes que nous posons. Il en est de même au plan collectif. Cet égrégore monstrueux de violences de souffrances, de haines, de mensonges, de ce que l’humain a de plus vil, créé par tous ces conflits et autres actions injustes sur la planète finira par éclater et noiera ceux qui l’ont fait naître et alimenté. Ce jour viendra. C’est peut-être ce que les eschatologistes appellent l’apocalypse.
Et pourtant, sur ce tas de fumier se manifestent de belles âmes. En voici un exemple : Lisez bien tout : Vous prendrez la mesure de ce que l’Occident fait subir au peuple syrien depuis 5 ans et vous ne pourrez plus vous voiler la face sur l’immense mensonge médiatique dont ils sont et nous sommes les victimes. Les journalistes aussi auront un jour à répondre de leur collaboration servile .
Galadriel
Pierre, humanitaire à Alep : « Les civils préfèrent mourir qu’avoir une jambe arrachée »
Depuis février 2016, Pierre Le Corf vit à Alep, en Syrie. À vingt-sept ans, le Français est à la tête de l’ONG humanitaire We Are Superheroes. Depuis la partie ouest de la ville plus peuplée du pays, il nous raconte sa vie au sein du conflit. Conditions humaines, sanitaires ou politiques, plongez dans la vraie Syrie d’aujourd’hui. Sans filtre.
The Dissident : Comment a commencé votre aventure en Syrie ?
Pierre Le Corf : J’ai voyagé dans une vingtaine de pays avant d’arriver en Syrie, pour mener les mêmes actions que je mène ici. Le but de mon périple était de construire des programmes sociaux et de transmettre la voix de ceux qu’on n’entend pas. Quand je suis arrivé en Syrie, j’ai découvert une réalité qui dépassait la fiction. Cela est dû au fait que les médias développaient un panorama sur la Syrie – sur la situation politique, humanitaire ou humaine, qui malheureusement ne collait pas du tout à la réalité. Ici, j’ai découvert une réalité beaucoup plus tranchante : la vie d’humains qui affrontent le terrorisme, la mort, et qui restent extrêmement forts. J’ai eu envie de continuer.
Qu’est-ce qui vous a motivé à partir en Syrie ?
Les motivations étaient les mêmes qu’au Brésil, au Vietnam ou en Afrique : créer un programme qui puisse aider les jeunes. C’est nécessaire de les accompagner à travers la guerre. Il faut les aider à ne pas abandonner qui ils sont – ou ce qu’ils veulent devenir – et à essayer de se reconstruire à l’intérieur. Ce qui m’importe aussi beaucoup, c’est de pouvoir enseigner aux gens, et en particulier dans les familles, comment sauver des vies. Cela nécessite des connaissances très spécifiques du champ de bataille. Il faut avoir les bons réflexes.
On imagine que certaines blessures nécessitent des réflexes particuliers ?
La plupart des personnes qui meurent succombe aux attaques. Il y a de tout : roquettes des terroristes, bonbonnes de gaz, chaudières à eau montées en roquettes, balles perdues, ou encore des doshkas – des balles explosives anti-tanks envoyées sur la ville. La difficulté, c’est que les blessures provoquées par ce genre d’attaques sont extrêmement sévères. En général, elles génèrent des brûlures très importantes, des hémorragies et des blessures de troisième degré. Les blessés sont donc très souvent amputés de leurs membres directement.
l s’agit pour les jeunes de savoir gérer ce genre de situation, avec leurs propres ceintures ou lacets par exemple. Certains gestes sont fondamentaux pour gagner du temps, et du sang. Une grande partie des victimes meurt à cause du transport en voiture qui les mène à l’hôpital. Elles se vident de leur sang avant même d’arriver.
Comment sensibiliser à ces premiers réflexes ?
Au-delà de ce programme déjà important, nous distribuons des trousses de premier secours dans les zones les plus marginalisées. Cela représente surtout les lignes de front, où les familles font face à des snipers et des tirs de mortier dans des conditions sanitaires très limitées. Le problème n’est pas tant le manque de connaissances des premiers soins. C’est surtout un manque de reconnaissance de certaines pathologies ou gestes simples, comme la désinfection d’une plaie.
En plus de l’assistance physique, ne faut-il pas une assistance psychologique ?
Nous avons mis en place un programme qui vise à emmener 500 jeunes au cinéma tous les mois pour leur ouvrir un peu l’imagination. Cela leur permet de faire des activités et de s’échapper de la guerre pendant quelques heures. Un seul cinéma est resté ouvert ici, en zone de front.
Quelles sont vos conditions de vie ?
Je vis comme les gens d’ici. Mes conditions de vie se superposent à celles des Syriens. J’essaye en tout cas. Je vis dans une famille en bordure d’une ligne de front. On reçoit beaucoup de mortier, de roquettes, de balles. Je me déplace maintenant dans un espace qui longe une autre ligne de front. La vie est difficile. On ne peut pas se mentir. Mais il y a quand même de la vie, des gens. La ville circule, mais les attaques interviennent à tout moment. Des dizaines meurent au quotidien.
Vous étiez dans d’autres pays. Est-ce votre première expérience en temps de guerre ?
C’est ma première expérience dans une zone de guerre aussi violente et particulièrement non conventionnelle. Ceux qui nous tirent dessus de l’autre côté sont considérés par l’Occident comme des rebelles modérés qui veulent apporter la démocratie. Mais l’autre côté, c’est Al-Nosra. Je ne vois que les drapeaux noirs d’Al-Nosra. Al-Nosra, c’est Al-Qaeda.
Des fois, la nuit, je les entends, à Midane. Ils commencent par crier Allahu Akbar [litt. Dieu est grand]. Puis, ça y est. Ils commencent à tirer. Pourtant, il n’y a que des civils dans la ville. Les militaires ne sont que dans les check points. Les gens que l’on aide ne sont pas touchés par un conflit conventionnel. Du coup, la situation psychologique est bizarre. On ne sait pas comment se comporter.
Êtes-vous habitué à ce genre d’épreuves ?
J’ai envie de répondre que oui. J’ai vécu avec des gangs, avec des minorités ethniques, dans des bidonvilles, dans des zones radioactives. Mais je ne vais pas vous dire que je vais bien. Je ne vais pas dire que c’est quelque chose que j’arrive à supporter. J’ai simplement pris l’habitude de m’adapter. La guerre est puissante. La manière dont les gens s’entretuent est extrêmement vicieuse. J’ai fait des cauchemars pendant des nuits entières où je voyais des bonbonnes de gaz. Je ne sais toujours pas comment réagir. On va dire qu’on apprend à faire avec.
Qu’est-ce qui a été le plus difficile à vivre depuis votre intervention en Syrie ?
Je crois que le pire, ce sont les cauchemars. Le fait de ne pas savoir si toi-même tu vas mourir, ou si les gens que tu aimes vont mourir. Il y a eu des cas où je voulais sauver des vies, mais finalement, on ne peut pas sauver tout le monde. Il y a les jambes et les bras arrachés. Les gens se vident de leur sang et je vois dans leurs yeux quelque chose qu’on ne voit que dans le regard d’un mourant. J’ai vu des jeunes, des enfants déchiquetés. Je pense à ces jeunes filles qui apprenaient le français, que j’aimais beaucoup…
Les civils sont donc les plus touchés ?
Il y a quelques mois, une bonbonne de gaz a touché une famille de jeune filles. Elles avaient 13, 15 et 17 ans. Toutes les trois ont été déchiquetées. Ils remplissent les bonbonnes de clous. C’était... (sa voix se brise).
Une roquette est tombée récemment dans un café en centre-ville. Trois personnes ont eu les jambes broyées, le bras arraché. Ce dernier regard, cette main tendue comme pour t’attraper même si on est à dix mètres… C’est le plus difficile. Pour essayer de se sauver, certains mettent les mains dans leurs entrailles.
Quel est le rapport à la mort de tous ces gens ?
Assez positif. Les gens ont quasiment tous accepté la mort. Ils préfèrent mourir que d’avoir une jambe arrachée. Ce sont des réactions qui peuvent paraitre étranges, mais vivre en tant qu’être humain ici est très dur, alors en tant qu’éclopé… En ce qui me concerne, disons que je fais un peu comme tout le monde : j’accepte ce qui doit m’arriver. Il n’y a pas d’endroit plus sûr que d’autres ici à Alep [à l’ouest, ndlr]. Roquettes, mortiers, ou bonbonnes : ils peuvent tomber n’importe où. On ne prend pas pour autant de risques démesurés, même si il n’y a pas vraiment de risques en soi, vu que la mort peut frapper à tout moment.
Quitter son pays pour se rendre en Syrie : qu’en pense votre famille ?
Ma famille me soutient. J’ai fondé mon ONG il y a des années. Avec le temps, mon entourage a compris ce que je fais, pourquoi c’est important à mes yeux, et ce que j’apporte aux autres. Je n’ai pas la prétention d’être un sauveur. Je fais juste de mon mieux pour apporter un maximum à un maximum de personnes. Et ce, dans les meilleures conditions et de la meilleure manière. Je prends des risques, mais je crois en ce que je fais. Même si ils respectent mon choix, ils ont peur. Moi aussi, j’aurais peur à leur place. Ils font avec, mais ce n’est pas facile pour eux.
Vous vivez à Alep-Ouest. Qui se trouve de l’autre côté?
Je suis du côté ouest car je n’ai aucune chance de survivre dans le côté est, conquis par les terroristes. Je maintiens qu’il n’y a pas de rebelles ici. Ils ne sont pas là pour apporter la démocratie. Ils sont là pour construire un état islamique. Il y a Daech et tous les fronts d’armées libres. La différence entre Daesh et Al-Nosra, par exemple, est que Daesh est là pour construire un état islamique dont la religion est l’état et la loi. Al-Nosra, les rebelles, l’armée libre et les autres groupes sont là pour apporter un état islamique, mais avec un statut politique. La religion est l’état, mais elle est contrôlée par une structure étatique. Pour vulgariser le concept, ils mettent de l’eau dans leur vin pour pouvoir coller aux aspirations d’autre gouvernements en matière de partenariats, de collaboration.
Que pensez-vous de la politique de la France par rapport au conflit syrien ?
Le gouvernement français continue de parler de rebelles modérés. Il n’y a que des djihadistes du front Al-Nosra. J’ai fait toutes les lignes de front d’Alep : il n’y a que des drapeaux noirs qui flottent. Si cela n’évoque rien à personne, ça fera bizarre à tout le monde de voir un drapeau noir flotter à Paris un de ces jours.
La France – comme les États-Unis – mène une véritable chasse à la sorcière vis-à-vis du gouvernement syrien. Je suis arrivé dans ce pays sans aucune position politique. Je n’en ai toujours pas. Je suis un humanitaire neutre car je suis du côté de l’humain. Le gouvernement français prend une position qui est contre l’humanité, contre les droits de l’homme.
Et la place des médias ?
Il y a un vrai problème de désinformation. Non que tous les médias soient malveillants, beaucoup ont une structure politique et dépendent de structures gouvernementales. Toutefois, une large partie des médias ne fait que recycler l’information. C’est un oiseau qui mange, vomit, et remange. C’est une image un peu vulgaire, mais vraie. Personne ne peut se déplacer au cœur du conflit syrien, à part les grands reporters. Et les grands reporters sortent de grandes chaînes. Et ces grandes chaines, à leur tour, ne sortent pas de nulle part…
Comment vous positionnez-vous par rapport à ce que vous avez vu et vécu ?
Je garde une position neutre, mais je suis triste. Et dans un sens, aussi honteux de voir que tous les gens qui meurent autour de moi ne font que remplir une colonne de pertes et de profits. Tous se positionnent selon leurs intérêts, que ce soit la France, les États-Unis, la Grande-Bretagne, le Canada. L’humain passe au second plan. Même les conditions humanitaires ne sont que des arguments politiques. Personne ne s’intéresse à la situation humaine. Si c’était le cas, personne ne soutiendrait ce conflit.
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Photo: « Le petit Mahmoud a 7 ans. Il a été sauvé par un membre de sa famille qui a essayé de le sortir d’une zone contrôlée par les terroristes, malheureusement dans sa fuite … il a sauté sur une mine. Mahmoud est né sans bras mais ce jour-là il a eu les jambes arrachées. Il a appris a marcher sur les fesses. » © : Pierre Le Corf /Facebook
source: http://the-dissident.eu/11345/pierre-humanitaire-a-alep/
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Image à la Une : © Pierre Le Corf/Facebook