6ème extinction : Une mer sans requins ?
100 millions de requins sont tués chaque année !
Une nouvelle étude menée par Boris Worm, biologiste marin à l’Université Dalhousie de Halifax, en Nouvelle-Écosse, totalise la mortalité mondiale des requins en ajoutant les captures débarquées déclarées à l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) aux estimations des débarquements non déclarés, des requins dont les ailerons ont été prélevés (finning[1]) et d’autres rejets de requins morts.
En se basant sur ces données, 100 millions de requins ont été décimés en 2000 et 97 millions en 2010, avec une fourchette comprise entre 63 millions et 273 millions… Un nombre incroyable ! Par conséquent, ce génocide animal ne laisse aucune chance à l’un des plus vieux poissons de notre planète, qui serait apparu il y a environ 400 millions d’années et qui a réussi à survivre à plusieurs extinctions massives de la biodiversité. « D‘un point de vue biologique, les requins ne peuvent tout simplement pas résister aux niveaux actuels d’exploitation et de demande« , a déclaré Boris Worm.
Vidéo en anglais, (mais les images suffisent)
http://www.notre-planete.info/actualites/actu_3675.php
Une mer sans requins
Malgré des réglementations de plus en plus strictes pour les protéger, ce sont environ 100 millions de requins qui sont pêchés chaque année dans le monde. Produit alimentaire de luxe, puissant aphrodisiaque, médicament ou prises accidentelles… les menaces qui pèsent sur eux sont telles qu’ils risquent de disparaître de nos mers, engendrant une catastrophe écologique sans précédent.
Même si de nombreux efforts sont faits à l’échelle internationale – déclaration d’espèces protégées, interdiction du « shark finning » (couper les ailerons d’un requin avant de le relâcher, le condamnant à une mort certaine), mise en place de quotas – il semble difficile de lutter contre cette surpêche. Les réglementations et les contrôles sont différents d’un pays à un autre, ce qui rend complexe la coordination des actions de protection.
En 2013, la Commission européenne a commandé un rapport sur les pays pêchant le plus de requins. Les trois pays en tête sont l’Indonésie (109 248 tonnes), l’Inde (74 050 tonnes) et l’Espagne (59 777 tonnes). La France, se place quant à elle en douzième position avec 21 511 tonnes juste derrière le Japon (24 960 tonnes). Mais les conclusions de ce rapport sont à nuancer, car elles se basent sur les déclarations volontaires des pays.
Dans le requin, tout est bien
Traditionnellement pêché dans les sociétés asiatiques et inuits, le requin est un animal dont chaque partie est utilisée et qui représente un marché de 480 millions d’euros annuels. La peau de requin était utilisée comme abrasif pour polir le verre ou encore pour garnir les sabres des samouraïs. De nos jours, cette dernière est encore utilisée en maroquinerie de luxe.
Les dents sont recyclées en bijoux, les mâchoires en trophées. L’huile extraite du foie est riche en vitamine A et est utilisée dans les produits cosmétiques ou conditionnée sous forme de gélules. La squalamine, une substance produite par le foie de l’animal, possède des propriétés antibiotiques efficaces contre certains virus (la dengue, l’hépatite B ou encore la fièvre jaune).
Mais c’est surtout pour son aileron, que le requin est autant prisé. Il est principalement utilisé dans des soupes et plats asiatiques. Cette partie du squale est considérée comme un met raffiné et possèderait des vertus aphrodisiaques. Réservé autrefois aux grandes occasions, cet ingrédient très apprécié a permis le développement d’un marché très lucratif. Le kilo d’ailerons de requin se vend actuellement aux alentours de 700 €.
À quoi ressemblerait une mer sans requins ?
Leur place en haut de la chaine alimentaire confèrent aux requins un rôle prépondérant dans l’équilibre d’un écosystème. En mangeant les poissons malades ou affaiblis, en débarrassant les océans des carcasses, ils contribuent à la bonne santé des mers. Les requins sont primordiaux pour la régulation des populations de poissons.
Prenons l’exemple des coraux. En se développant, ils forment des récifs coralliens, véritables abris pour des centaines d’autres espèces de poissons, mollusques ou crustacés. Ils forment également une barrière naturelle contre les vagues, protégeant ainsi les îles qu’ils entourent.
Si les requins disparaissaient, les poissons, alors sans prédateurs, pourraient se nourrir sans crainte des coraux. À terme, le récif disparaitrait et avec lui toutes les espèces qu’il abritait. Conséquence à l’échelle de la planète : les écosystèmes marins seraient grandement appauvris. Progressivement, nous arriverions à une explosion des méduses – dont certains requins sont très friands – de vers marins et à des booms planctoniques.
Une disparition inéluctable ?
Selon une étude de 2009 de l’UICN, l’Union internationale pour la conservation de la nature, sur 64 espèces de requins de haute mer suivies, près d’un tiers sont menacés d’extinction.
Les experts de l’UICN ont donc classé mondialement le grand requin-marteau et le requin-marteau halicorne ainsi que le diable de mer comme « en danger ». Neuf autres espèces, dont le requin blanc et le requin-pèlerin, sont classées comme « vulnérable » à l’échelle du globe.
Depuis 2010, la pêche des requins-taupes communs, espèce classée en « danger critique », est strictement interdite dans l’Union européenne. Enfin, le requin bleu, l’espèce de requin pélagique la plus abondante et pêchée de la planète, est catégorisée comme « quasi menacé ».
Les requins sont particulièrement vulnérables à la surpêche en raison de leur maturité tardive et de leur faible taux de reproduction. Il est donc plus que nécessaire de mettre en place des quotas de pêche et de donner des moyens de contrôle afin de les protéger et d’éviter ainsi une catastrophe écologique.
De plus en plus de manifestations et d’organisations contre la pêche des requins voient le jour à travers le monde. Le signe d’une prise de conscience de l’importance du requin pour notre avenir et celui de la mer !
http://www.france3.fr/emissions/thalassa/le-dossier/une-mer-sans-requins_235239