Pourquoi les élections américaines de mi-mandat devraient intéresser le monde entier ?
NEW YORK — Les élections présidentielles américaines captivent généralement l’attention d’un public international, avec des spectateurs répartis dans le monde entier et passionnés par le côté théâtral des campagnes, les débats sur scène et le dénouement tendu du soir de l’élection.
En comparaison, les élections de mi-mandat, organisées tous les quatre ans (juste entre les élections présidentielles), sont beaucoup plus superficielles, avec des batailles régionales au cours desquelles les membres du Sénat et de la Chambre des Représentants sont élus pour siéger au Congrès.
Néanmoins, ces élections sont absolument essentielles à l’élaboration de la politique nationale et extérieure américaine des années à venir, avec la constitution du Congrès déterminant dans quelle mesure on appuiera le programme du président actuel et futur, quel qu’il soit.
En novembre prochain, les Américains (ou environ 40% de ceux ayant le droit de vote) iront aux urnes. L’une de ces confrontations devrait avoir un impact considérable non seulement aux États-Unis mais aussi dans le monde entier.
Bienvenue aux sénatoriales du Kentucky. Cet État mieux connu pour le bourbon, les courses de chevaux et les boîtes de morceaux de poulet, accueillera une élection qui pourrait précisément définir l’approche américaine à court terme sur le changement climatique.
Aux États-Unis, le consensus scientifique a fait de la politique climatique un enjeu majeur ces dernières années pour de nombreux politiciens — à l’exception des personnalités les plus proches des industriels. Au lieu de nier le réchauffement climatique, de nombreux républicains préfèrent maintenant ne plus prendre position en disant : « je ne sais pas, je ne suis pas spécialiste ».
Publié en juin dernier, un rapport bipartite a détaillé les coûts importants induits par la tendance américaine consistant à refuser d’agir. Même si Barack Obama n’a pas réussi à faire passer une loi générale pour contrer la hausse des températures, il a fait adopter un plan « Énergie propre » (Clean Power Plan), grâce à l’action exécutive, qui fixe les limitations d’émissions de CO2 dans l’atmosphère pour les centrales électriques nationales.
L’agence américaine pour la protection de l’environnement (EPA) est chargée de la mise en oeuvre de ce plan. Il s’agit d’un organisme très critiqué par les républicains et les intérêts corporatifs qu’ils servent scrupuleusement. Toujours en application, il est probable que le plan « Énergie propre » ait un impact considérable sur la réduction des substances polluantes dans l’atmosphère : 17% de moins d’ici 2020 par rapport au niveau de 2005.
C’est là que Mitch McConnell entre en scène. Le sénateur actuel du Kentucky (républicain) a passé les 30 dernières années à travailler, à Washington, au nom de l’industrie houillère américaine. S’il conserve son siège le mois prochain, cet homme politique vieillissant pourrait devenir le chef de la majorité républicaine au Sénat, mais aussi l’homme devant s’assurer que les deux dernières années de la présidence de Barack Obama sont aussi pesantes que possible.
Pour ce faire, les républicains devraient également remporter la victoire dans d’autres états, avec des résultats serrés dans le Dakota du Sud, le Kansas et la Géorgie. Si Mitch McConnell devient le leader de la majorité, il a déjà promis de revoir à la baisse les plafonds d’émission ce qui entraverait la lutte future des États-Unis contre le changement climatique.
Face à lui, son opposante du Parti démocrate âgée de 35 ans, Alison Lundergan Grimes, est actuellement au même niveau que son adversaire plus expérimenté dans les sondages. La plupart des commentateurs pensent que Mitch McConnell a des chances de gagner, mais le vote pourrait les surprendre.
Donc, comment le leader du plus grand parti du Sénat pourrait-il empêcher le Président de réduire les émissions de gaz à effet de serre ? La réponse : indirectement. Barack Obama opposerait son veto à toutes les attaques directes contre sa politique. Mitch McConnell prévoit donc d’imposer des restrictions concernant l’EPA (l’Agence américaine de protection de l’environnement) dans les lois budgétaires courantes; tout veto de la Maison Blanche risquant alors d’entraîner un arrêt des activités gouvernementales (le fameux « shutdown »).
En août dernier, Mitch McConnell a été enregistré lorsqu’il exposait les grandes lignes de cette stratégie lors d’un évènement organisé pour les riches donateurs républicains. Il a déclaré : « À la Chambre et au Sénat, on maîtrise le budget. Qu’est-ce que cela veut dire? Cela signifie que nous pouvons faire passer la loi des dépenses ».
« Et je vous assure que, dans cette loi, nous ferons reculer cette bureaucratie en posant, comme on dit, des conditions dans la loi. On ne peut pas dépenser de l’argent pour faire ceci ou cela. On va les attaquer à tous les niveaux : la santé, les services financiers, l’EPA. »
En résumé, Mitch McConnell pourrait obliger Barack Obama à choisir entre l’arrêt des activités gouvernementales et un compromis sur la politique du changement climatique. Étant donné que 10 des années les plus chaudes enregistrées se concentrent sur les 16 dernières années, ni les États-Unis ni le monde n’ont le temps de laisser Mitch McConnell imposer des concessions.
Paul Vale
SOURCE : HUFFINGTON POST UK