Ressemer sa récolte n’est finalement pas considéré comme une contrefaçon

Allez ! Encore une nouvelle positive! Ce n’est pas encore totalement gagné, mais ça avance.

« C’est un premier pas important vers la reconnaissance des droits et pratiques des paysans », se réjouit le Collectif Semons la biodiversité. Les députés ont finalement adopté les amendements excluant les semences de ferme de la loi renforçant la lutte contre la contrefaçon. Ressemer sa récolte ne sera finalement pas considéré comme un délit aussi grave qu’imprimer un faux billet ou fabriquer illégalement un médicament. « Il a fallu menacer le gouvernement par des grèves de la faim pour pouvoir être entendu », rappelle Laurent Pinatel, porte-parole de la Confédération paysanne. Le 21 janvier, une centaine de paysans avaient occupé le siège du Groupement national interprofessionnel des semences (Gnis). Avant de quitter les locaux le soir-même, suite à l’engagement du ministère de l’Agriculture de présenter « un amendement afin que les semences de ferme ne soient plus concernées par la loi contre les contrefaçons ».

Le ministre Stéphane Le Foll a donc tenu sa promesse. Et les injonctions du président de la FNSEA, Xavier Beulin, sont restées vaines : « Les semences doivent impérativement rester dans le champ de la contrefaçon. Je demande aux parlementaires de tenir bon », déclarait-il le 22 janvier.

L’amendement stipule qu’un agriculteur qui multiplie et ressème des graines récoltées à partir de variétés sélectionnées par l’industrie semencière ne peut pas être poursuivi pour contrefaçon. La portée de l’amendement est cependant limitée : seules 21 semences sont concernées, conformément à la loi sur les certificats d’obtention végétale adoptée en novembre 2011 (lire notre article). Concrètement, l’agriculteur peut donc ressemer les semences issues de ces 21 espèces [1] en échange du paiement d’une redevance qui contribue, selon le Gnis, « au financement de la recherche sur les variétés végétales ». « Mais les semences de ferme des autres espèces sont toujours interdites », déplore le Collectif semons la biodiversité. D’ici fin 2014, quinze espèces supplémentaires devraient venir compléter la liste des 21 espèces dérogatoires, a assuré le gouvernement.

Victoire en demi-teinte

Un autre amendement [2] précise également que les procédures prévues en cas de contrefaçon, comme la saisie de la récolte et sa destruction, ne s’appliqueront pas aux semences de ferme. « Nous sommes rassurés qu’il n’y ait pas de possibilité pour les douaniers d’aller dans les champs des paysans », souligne le Gnis. « Mais les procédures comme les visites d’huissiers, la saisie de documents ou d’échantillons à la moindre présomption de contrefaçon, s’appliquent toujours aux paysans », nuance Guy Kastler du Réseau semences paysannes. « C’est une victoire politique, mais pas totale ».

« Il sera nécessaire d’étendre cette exception à tout matériel reproductible à la ferme, tels que les levures, les animaux, les préparations naturelles peu préoccupantes », relève également Brigitte Allain, députée écologiste de Dordogne. Le gouvernement devrait revenir sur ce sujet à l’occasion du prochain débat sur la Loi d’avenir agricole, prévu en avril au Sénat. Soit après les élections municipales.

Notes

[1Avoine – Orge – Riz – Alpiste des Canaries – Seigle – Triticale – Blé – Blé dur – Epeautre – Pomme de terre – Colza – Navette – Lin oléagineux, à l’exclusion du lin textile – Pois chiche – Lupin jaune – Luzerne – Pois fourrager – Trèfle d’Alexandrie – Trèfle de Perse – Féverole – Vesce commune

[2« Art. L. 623-44. – La présente section n’est pas applicable aux semences de ferme relevant de la section 2 bis du présent chapitre. » Le texte adopté le 4 février est consultable ici.

SOURCE : Bastamag

Commentaires sont clos