LE DÉMANTÈLEMENT DE LA GRÈCE CONTINUE

Le Parlement grec vote le renvoi de 15 000 fonctionnaires

 

Dans la nuit de dimanche à lundi 29 avril, le Parlement grec a adopté une loi sur de nouvelles mesures de rigueur réclamées par la « troïka » – Union européenne, Banque centrale européenne, Fonds monétaire international –, loi programmant notamment la restructuration du secteur public et le renvoi de milliers de fonctionnaires. Elle a été adoptée à l’issue d’un débat houleux par cent soixante-huit voix sur un total de deux cent quatre-vingt-douze députés présents. Cent vingt-trois députés ont voté contre, et un député a voté « présent ».

Prévoyant le renvoi d’ici à 2014 de quinze mille fonctionnaires, dont quatre mille en 2013, une mesure inédite, cette loi ouvre la voie à la poursuite des versements de prêts, pour un total de 8,8 milliards d’euros, par la zone euro et le FMI à la Grèce. Une aide internationale de 240 milliards d’euros au total a été consentie depuis 2010 à Athènes pour lui éviter la banqueroute, en échange de la poursuite des mesures d’austérité.

Les fonctionnaires censés être renvoyés sont ceux sanctionnés pour corruption ou incompétence, ceux poussés au départ volontaire à la retraite, ou les victimes de la suppression de leur poste après la fermeture de dizaines d’organismes publics.

 

« DESTRUCTION DU SERVICE PUBLIC »

Dimanche soir, une manifestation de huit cents personnes, selon la police, a eu lieu à l’appel des syndicats du privé et du public sur la place Syntagma, face au Parlement, dans le centre d’Athènes. La confédération des fonctionnaires (Adedy) a dénoncé « les suppressions de postes et la destruction du service public » ainsi que « la procédure d’urgence décidée par le gouvernement » pour le vote de la loi.

Outre la restructuration du secteur public, la loi adoptée – qui ne comporte qu’un seul article, une pratique récurrente pour contraindre les députés à voter l’ensemble des dispositions – prévoit l’extension d’un impôt foncier, imposé en 2011, mais en le réduisant de 15 %. Elle prévoit également l’ouverture à la concurrence de nouvelles professions et des facilités de paiement, néanmoins sous de strictes conditions, pour permettre à l’Etat de récupérer des milliards d’euros d’arriérés d’impôt et de cotisations sociales auprès des ménages ou d’entreprises endettés.

 

RÉDUCTION DU SALAIRE MINIMUM

Le principal parti de l’opposition, la Gauche radicale (Syriza), a déposé une motion d’anticonstitutionnalité de la procédure d’urgence, qui a été rejetée par le Parlement. Le ministre des finances, Yannis Stournaras, a argué que la procédure d’urgence était nécessaire, car l’Eurogroupe (réunion des ministres des finances de la zone euro) « doit se prononcer lundi sur la poursuite du versement des prêts (…) dont la Grèce a besoin pour payer salaires et retraites ». Les partis d’opposition ont par ailleurs dénoncé un amendement déposé à « la dernière minute » par M. Stournaras prévoyant la réduction du salaire minimum mensuel à 490 euros, contre 580 euros actuellement.

La Grèce a effacé en mars 2012 presque un tiers de sa dette souveraine, soit plus de 100 milliards d’euros, générant d’importantes pertes pour les créanciers privés, banques et caisses de retraite comprises, qui détenaient des obligations grecques. Ainsi, hors aide aux banques, et au prix de lourds sacrifices sociaux, l’Etat grec affiche-t-il pour 2012 un déficit public réduit à 6 % de son PIB, bien loin des 15,8 % de 2009, au démarrage de la « crise grecque », et meilleur que son objectif de 6,6 % contenu dans le budget de l’Etat.

En décembre 2012, lors d’une opération de rachat de dette (« buyback »), la Grèce a réussi à racheter près de 30 milliards d’euros de ses obligations à ses créanciers privés. Ces deux opérations, effacement et rachat, ont ramené la dette du pays à 156,9 % de son produit intérieur brut (PIB) en 2012, après un pic de 170,3 % en 2011, soit 355 milliards d’euros. Mais en 2014, la dette pourrait s’envoler à 10% du PIB, selon les estimations, si rien n’est fait.

Si on prend en compte l’aide versée par la zone euro et le FMI aux banques hellènes, aide qui doit, selon les critères d’Eurostat figurer dans les comptes publics, le pays n’a marqué aucun progrès l’an passé, avec un déficit public à 10 % du PIB.

source : lemonde.fr

Nous avions publié un article précédemment faisant part des méthodes policières utilisées dans les administrations pour repérer les fonctionnaires qui seraient susceptibles d’être renvoyés. On peut supposer que les inimitiés et les délations ont dû aller bon train… Quand il s’agit de garder son job dans un pays qui s’effondre, le « pour moi d’abord » devient la règle pour beaucoup, et on peut le comprendre.

Rapprochez bien ces deux phrases :

« la Grèce a réussi à racheter près de 30 milliards d’euros de ses obligations à ses créantiers privés »

« Si on prend en compte l’aide versée par la zone euro et le FMI aux banques hellènes, aide qui doit, selon les critères d’Eurostat figurer dans les comptes publics, le pays n’a marqué aucun progrès l’an passé, avec un déficit public à 10 % du PIB. »

Autrement dit, le régime d’austérité imposé par la troïka n’a strictement servi à rien qu’à appauvrir dramatiquement le pays pour « sauver les banques » qui se sont mis 30 milliards d’euros dans les poches pour se rembourser de dettes qu’elles ont provoquées. Magnifique, non ?

 

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