BIG CO2 : Les data centers

Avant Internet, la quatrième dimension était, au choix : un pur concept de géométrie euclidienne ; le facteur temps de la théorie de la relativité élaborée par Einstein ; un fonds de commerce pour voyants et spirites ; ou encore le nom d’une série SF des sixties. Mais aujourd’hui, cette twilight zone baptisée «cloud» par les géants de l’informatique est devenue une réalité tangible, à défaut d’être palpable.

 

En numérisant le vieux monde analogique et la vie de ses habitants, l’humanité a créé un univers parallèle immatériel en perpétuelle expansion. L’homo numericus s’est pris pour son hypothétique créateur : «Dieu n’est pas mort au XXe siècle, il est devenu un produit technologique», s’en amuse Aurélien Bellanger dans la Théorie de l’information. Nous baignons sans y penser dans cette matrice de 0 et de 1, ignorant tout de l’incroyable machinerie qui, en coulisse, maintient ce deuxième monde en suspension : des milliers de data centers disséminés aux quatre coins de la planète, alignant comme à la parade des dizaines de millions de serveurs…

 

Le problème a longtemps été sous-estimé, mais ces nouvelles usines de l’ère numérique sont de véritables gouffres énergétiques. Elles consomment aujourd’hui 1,5% de la production mondiale d’électricité ! Or, la plupart de ces data centers, opérés par les Google, Facebook et autres Amazon, sont en fait alimentés par des centrales à gaz ou au charbon. Selon Greenpeace, ces «fermes» de serveurs sont déjà à l’origine de 2% des émissions de CO2 responsables du réchauffement climatique. C’est encore loin de rivaliser avec l’industrie (19%). Mais, si ces usines numériques ne se mettent pas rapidement au vert, leurs émissions de carbone seront équivalentes à celles des avions en 2020 ! Et le «big data» sera alors synonyme de «big CO2».

Par JEAN-CHRISTOPHE FÉRAUD –

Source : Libération/économie

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