Comment faire beaucoup avec presque rien

« Comment faire beaucoup avec presque rien » : le collectif Saga, par Gaëlle Péneau

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Au retour d’une présentation à laquelle je viens d’assister à l’école d’architecture de Nantes je lis le texte que Paul Jorion vient de publier dans Trends-Tendances :

« Il n’y a pas dans cette perspective (l’individualisme méthodologique) de dimension collective à ce que nous faisons quand nous sommes ensemble : aucune structure n’émergerait de nos comportements collectifs qui ne sont qu’un simple rassemblement de comportements individuels. Il n’y aurait ainsi aucun bond qualitatif quand on passe de l’individuel au collectif ».

Ce questionnement (qui concerne la science économique) vient faire écho au projet d’un collectif – le collectif Saga, composé de jeunes architectes – qui, tout juste rentré d’Afrique du Sud, est venu rendre compte d’une expérience enthousiasmante réalisée à Joe Slovo, un township situé aux abords de la ville de Port Elizabeth.

Avec un budget identique à celui destiné en moyenne à la construction d’une RDP house (maisons construites par le gouvernement), le projet tente de démontrer qu’en réfléchissant à une manière de construire différente, il est possible de proposer des espaces de meilleure qualité mais surtout plus grands et adaptables. Ainsi, une RDP house fait en moyenne 36m2 quand le bâtiment réalisé en fait 138m2. Cela a été possible par l’utilisation de matériaux pour la plupart recyclés mais aussi par l’élaboration de techniques de construction plus efficientes.

L’enjeu du projet réside dans la mise en place de procédés constructifs simples et « réplicables » par la communauté, de manière à donner aux habitants des outils afin qu’ils soient eux même acteurs du développement de leur quartier. Les matériaux ont donc été choisis afin d’être facilement mobilisables par la communauté (palettes, tôle, pneus, etc.). Ils ont ensuite été transformés de manière efficiente afin d’en faire un bâtiment solide, durable et à « haute qualité architecturale ». Par ailleurs, des habitants volontaires ont été associés au projet tout au long de sa construction, ce qui a permis un transfert de savoirs dans un sens comme dans l’autre (beaucoup de savoir-faire sont à apprendre de ces habitants qui quotidiennement construisent leur propre environnement.)

Le projet consiste en deux bâtiments qui se répondent. D’un côté, un point d’eau / toilettes, et de l’autre une grande halle divisible sur laquelle vient se connecter un conteneur qui abrite un bureau et une cuisine. Cette halle doit accueillir une crèche dans un premier temps.

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Le chantier, vecteur de lien social

Je reprends ici le compte rendu de leur exposé :

« Travailler ensemble autour de ce chantier, c’est aussi un moyen de créer un lien social fort. Le bâtiment, avant même d’être terminé est vite devenu une sorte de catalyseur pour le quartier, devenant à la fois un point d’attraction mais aussi un sujet de débats et discussions. Ce sont d’abord les enfants curieux qui sont venus nous regarder, nous aider, puis ils ont ramené leurs parents et nous avons alors pu partager plus que des savoir-faire. Il est intéressant de retracer l’histoire de cette relation et de se rendre compte qu’elle va plutôt à l’inverse des schémas « classiques » de la participation. Ici c’est l’acte de construire qui a été prétexte, un prétexte à un dialogue, à des ajustements, et non l’inverse. »

C’est finalement simplement le message de jeunes architectes tout débutants qui ont envie de changer le monde mais qui ne savent pas très bien encore comment s’y prendre, c’est un message d’amour en fait, à l’architecture, à ce qu’elle peut produire, engendrer, susciter, créer et faire surtout.

Et voilà identifié le « bond qualitatif » du collectif dont il est important de rendre compte, montrant que la jeunesse a les outils pour se défendre face à des idéologies destructrices.

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