La résistance molle …
Un article de salubrité publique de la part du site Le Partage !
Oui, la résistance molle, parce qu’ils sont prêts à tout nous faire gober pour maintenir une hiérarchie coûte que coûte et nous maintenir en état servile, et nous faire courir après le premier lièvre qui nous détournera d’une Connaissance profonde de l’état de ce monde. L’espoir est un piège encore plus puissant que la peur. Alors voici un bon moyen de décoder un piège supplémentaire de ce qui se déroule sous nos yeux …. en souhaitant que vous sachiez prendre le temps nécessaire à la lecture sans céder aux sirènes de la boulimie d’informations et de quête de sensationnel. Le sensationnel est déjà là, il faut juste savoir en discerner la subtilité et prendre la patience d’assembler le puzzle.
A propos des médias « indépendants/alternatifs/libres », de l’écologie d’État et de l’insoumission docile
Basta Mag, Reporterre, Kaizen, les Colibris, Demain le film, Jean-Luc Mélenchon… : si ceux-là ne sont pas tous directement liés, sauf par le progressisme politiquement correct dont ils font montre, aux yeux de beaucoup, ils représentent le potentiel de changement en vue d’un monde meilleur. Ceux qui suivent nos publications comprennent sans doute pourquoi nous sommes loin de partager ce point de vue, qui relève des profondes illusions et de la confusion distillées par la société du spectacle. Bien que ce sujet soit plutôt secondaire au vu de la catastrophe écologique et sociale en cours, il nous paraît néanmoins important de l’exposer le plus clairement possible. Nous ne pensons pas peigner la girafe en lui consacrant quelques articles, sur les centaines que nous avons publiés.
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Nous partons de la prémisse selon laquelle l’ordre établi est un désastre, autant sociale qu’écologique, et qu’il est nécessaire de le renverser. Cet ordre pourrait être décrit comme une corporatocratie — « un conglomérat de marchés financiers et de corporations, qui domine le monde », selon la formule de Charles Derber (professeur de sociologie à l’Université de Boston) — qui « unit les pouvoirs économiques, politiques et idéologiques ».
La culture qui engendre cette corporatocratie n’est pas nouvelle, ses racines remontent aux origines de la civilisation. Par souci de concision, nous nous contenterons de rappeler que les groupes d’intérêts financiers les plus puissants de notre temps régnaient déjà au début du XXème siècle (cf. la famille Rockefeller et la Standard Oil Company, BP et la Anglo-Persian Oil Company, la Royal Dutch Shell Company, la famille Rothschild, etc.) ; qu’ils ont façonné, tout au long de son histoire, et qu’ils façonnent encore la société industrielle mondialisée que nous connaissons aujourd’hui.
Nous parlons donc du renversement d’un ordre séculaire, au minimum — Napoléon Bonaparte créa la Préfecture de police de Paris en 1800, la police était alors un instrument au service de l’Empire français ; aujourd’hui, elle est l’instrument de l’Empire corporatiste. Ce qui implique de percevoir pour ce qu’elle est toute la culture qu’il a produite entre temps.
Nous partons de la prémisse selon laquelle cette corporatocratie influence ou contrôle tout, des parodies de démocratie™ à la nourriture™ que l’on mange ; de la musique™ radiodiffusée aux émissions télévisées ; de la presse™ grand public aux programmes universitaires ; de la nature des différents métiers au fait qu’il soit considéré comme normal de devoir travailler (cf. l’idéologie du travail).
Nous partons également de la prémisse selon laquelle l’idée de progrès est une mystification constitutive de la culture dominante — la corporatocratie. Ainsi que le formule Kirkpatrick Sale : « Le progrès est le mythe qui nous assure que ‘en avant toute’ n’a jamais tort. L’écologie est la discipline qui nous enseigne que c’est un désastre ». Apparue lors de la révolution scientifique mécaniste du XVIIème siècle, « l’idée de Progrès » est peu à peu devenue la seule philosophie de l’histoire de la modernité. Elle se caractérise par une croyance aveugle et contre toute évidence selon laquelle le concept d’histoire serait naturel, et consisterait en une progression linéaire vers plus d’égalité, de justice et de bonheur — à l’aide d’un progrès technologique, également linéaire, qui tendrait à améliorer indéfiniment la condition humaine.
Ceux que la culture officielle n’a pas harnachés de ses œillères hypnotiques comprennent que ce progrès est une illusion. Les hautes technologies, pour prendre un exemple, en plus de dépendre de la division du travail et du savoir, d’une gestion antidémocratique des « ressources naturelles » mondiales, n’ont rien à voir avec le bonheur et tout à voir avec le désastre écologique et social en cours. Des pratiques extractivistes hautement destructrices de l’environnement à l’aliénation dans le virtuel, de la complexité inhumaine (qui dépasse l’entendement) de la société industrielle aux montagnes de déchets électroniques toxiques qui polluent la Terre, leur développement implique toutes sortes de terribles nuisances.
Bien sûr, les partisans du progrès assureront que tout ceci peut être réparé grâce à plus de technologie, et à des améliorations techniques. Ce refrain séculaire a toujours accompagné et accompagne toujours les dégâts engendrés par le progrès. Des siècles d’améliorations technologiques plus tard, nous en sommes rendus à aujourd’hui, où l’on apprend, dans une étude publiée ce lundi 13 février 2017 dans la revue scientifique Nature Ecology & Evolution, que « l’un des habitats les plus inaccessibles au monde […], les fosses marines, sont parmi les lieux les plus contaminés au monde par les polluants organiques persistants » ; où l’on a appris, l’an dernier, dans une autre étude, que « les humains ont produit assez de plastique depuis la Seconde Guerre mondiale pour recouvrir toute la Terre de film alimentaire » ; et dans une autre étude encore que « la production mondiale de matériaux plastiques a été multipliée par 20 au cours des dernières 50 années, dépassant 300 millions de tonnes en 2015. La demande croit exponentiellement et la production devrait quadrupler d’ici 2050« et « qu’en conséquence, 275 millions de tonnes de déchets plastiques ont été générées par les pays côtiers du monde, dont entre 4.7 et 12.7 millions de tonnes finissent dans les océans, un scénario censé augmenter de l’ordre d’une magnitude d’ici 2025 » — cette dernière étude nous révélait également que « les ‘plastiques biodégradables’ ne se dégradent pas d’eux-mêmes dans des conditions naturelles, et ne représentent donc à priori pas une solution pour la réduction des déchets marins ».
Aujourd’hui où les « ressources » de la planète, renouvelables comme non-renouvelables, sont impitoyablement surexploitées ; où les forêts du monde, dont il n’en resterait que deux, sont dans un état calamiteux (les vraies forêts, pas les plantations ou monocultures modernes), et qui ne cesse d’empirer. Où la plupart des écosystèmes originels ont été modifiés (détruits, ou détraqués), d’une façon ou d’une autre (25% des fleuves n’atteignent plus l’océan ; depuis moins de 60 ans, 90% des grands poissons, 70% des oiseaux marins et, plus généralement, 52% des animaux sauvages, ont disparu ; depuis moins de 40 ans, le nombre d’animaux marins, dans l’ensemble, a été divisé par deux). Où les scientifiques estiment que nous vivons la sixième extinction de masse — sachant que les déclins en populations animales et végétales ne datent pas d’hier, et qu’une diminution par rapport à il y a 60 ou 70 ans masque en réalité des pertes bien pires encore, cf. l’amnésie écologique. Où on estime que d’ici 2048 les océans n’abriteront plus aucun poisson. Où d’autres projections estiment que d’ici 2050, il y aura plus de plastiques que de poissons dans les océans. Où on estime également que d’ici à 2050, la quasi-totalité des oiseaux marins auront ingéré du plastique. Où tous les biomes de la planète ont été contaminés par différents produits chimiques toxiques de synthèse (cf. l’empoisonnement universel que décrit Fabrice Nicolino). Où l’air que nous respirons est désormais classé cancérigène par l’OMS. Où les espèces animales et végétales disparaissent (sont tuées) au rythme de 200 par jour (estimation de l’ONU). Et où les dérèglements climatiques auxquels la planète est d’ores et déjà condamnée promettent d’effroyables conséquences.
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L’illusion la plus cruciale et la plus médiatisée du progressisme de notre temps est évidemment le mythe des énergies renouvelables — censées fournir une nouvelle source d’énergie propre-verte-et-durable à injecter dans le réseau mondial de la société industrielle, dont toutes les industries sont par ailleurs polluantes, mais qui n’insiste pas là-dessus, étrangement — que nous analysons dans un récent article : L’écologie™ du spectacle et ses illusions vertes (espoir, « progrès » & énergies « renouvelables »).
Dans une des nombreuses traductions publiées sur notre site, intitulée « Notre manie d’espérer est une malédiction », Chris Hedges écrit, à propos de l’idéologie du progrès, que :
« La croyance naïve selon laquelle l’histoire est linéaire, et le progrès technique toujours accompagné d’un progrès moral, est une forme d’aveuglement collectif. Cette croyance compromet notre capacité d’action radicale et nous berce d’une illusion de sécurité. Ceux qui s’accrochent au mythe du progrès humain, qui pensent que le monde se dirige inévitablement vers un état moralement et matériellement supérieur, sont les captifs du pouvoir. Seuls ceux qui acceptent la possibilité tout à fait réelle d’une dystopie, de la montée impitoyable d’un totalitarisme institutionnel, renforcé par le plus terrifiant des dispositifs de sécurité et de surveillance de l’histoire de l’humanité, sont susceptibles d’effectuer les sacrifices nécessaires à la révolte.
L’aspiration au positivisme, omniprésente dans notre culture capitaliste, ignore la nature humaine et son histoire. Cependant, tenter de s’y opposer, énoncer l’évidence, à savoir que les choses empirent, et empireront peut-être bien plus encore prochainement, c’est se voir exclure du cercle de la pensée magique qui caractérise la culture états-unienne et la grande majorité de la culture occidentale. La gauche est tout aussi infectée par cette manie d’espérer que la droite. Cette manie obscurcit la réalité, au moment même où le capitalisme mondial se désintègre, et avec lui l’ensemble des écosystèmes, nous condamnant potentiellement tous.
Le théoricien du XIXe siècle Louis-Auguste Blanqui, contrairement à presque tous ses contemporains, écarta la croyance, chère à Karl Marx, selon laquelle l’histoire est une progression linéaire vers l’égalité et une meilleure moralité. Il nous avait averti du fait que ce positivisme absurde était un mensonge colporté par les oppresseurs : « Toutes les atrocités du vainqueur, la longue série de ses attentats sont froidement transformées en évolution régulière, inéluctable, comme celle de la nature.[….] Mais l’engrenage des choses humaines n’est point fatal comme celui de l’univers. Il est modifiable à toute minute ». Il avait pressenti que les avancées scientifiques et technologiques, plutôt que d’être les présages du progrès, pouvaient être « une arme terrible entre les mains du Capital contre le Travail et la Pensée ». Et à une époque où bien peu le faisaient, il dénonçait le saccage du monde naturel. « La hache abat, personne ne replante. On se soucie peu que l’avenir ait la fièvre ». »
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Qui dit renversement dit subversion : « Qui est de nature à troubler ou à renverser l’ordre social ou politique ».
Alors en quoi des médias comme Basta Mag et Reporterre — qui font bien souvent l’apologie d’un simple verdissement de la société industrielle, qui encouragent le développement des illusions vertes (même s’il est arrivé à Reporterre d’en émettre une timide critique, ce qui n’est pas sans exposer une certaine incohérence au niveau de l’analyse) ; qui se présentent comme « indépendants » bien qu’ils soient, entre autres, partiellement financés par la « réserve parlementaire »— seraient-ils subversifs ?
Reporterre qui a récemment relayé un article du magazine Kaizen (fondé, entre autres, par Cyril Dion, co-fondateur du Mouvement Colibris, et « inspiré par la philosophie de Pierre Rabhi ») intitulé « Petit manuel des bonnes pratiques écolos sur Internet », qui va jusqu’à nous expliquer que pour adopter un comportement modèle, il faut « Faire le choix d’une police [de caractères] écolo », et « Opter pour une signature sobre ». Reporterre (« le quotidien de l’écologie ») qui vient également de publier un article intitulé « Au Bhoutan, le bonheur brut est serein malgré les nuages », chantant les louanges de ce petit pays qui aurait « un bilan carbone négatif », sans mentionner une seule fois les nombreux barrages (qui lui servent à s’alimenter en hydroélectricité « verte » et à gagner de l’argent en en vendant une bonne partie à l’Inde) et leurs conséquences écologiques désastreuses (ce qui est le lot de tous les barrages), à propos desquels Yeshei Dorji, photographe et blogueur, nous rapporte, dans un article publié sur le site de Global Voices, que :
« La plupart de nos rivières, foisonnantes de vie, sont emprisonnées dans des barrages qui déplacent humains et animaux ainsi que des formes de vie aquatiques rares et même inconnues.
Certains barrages planifiés et en construction sont destinés à créer d’énormes retenues d’eau qui modifieront les conditions météorologiques et causeront des tremblements de terre, parce qu’ils sont situés dans des zones sismiquement actives.
Il y a un danger clair et présent qu’un désastre environnemental se produise à un moment.
Des conditions d’exécution défavorables et inéquitables des projets ont causé la faillite de nombreuses entreprises bhoutanaises. Même la vente de légumes a été usurpée par les sous-traitants indiens, ce qui prive les Bhoutanais de monter leurs petites entreprises.
Des centaines d’enfants nés hors mariage de mères bhoutanaises mais de pères indiens, ouvriers sur les centrales, vagabondent dans les rues, sans inscription a l’état civil et sans droit à l’éducation. Comme nos lois sexistes ne reconnaissent pas les mères bhoutanaises comme des citoyennes dignes de ce nom, leurs enfants ne sont pas reconnus comme des citoyens naturels du Bhoutan ».
Reporterre qui publie pour la Saint-Valentin un article encourageant ses lecteurs à acheter des fleurs bio™, plutôt que des fleurs industrielles. Une très bonne illustration du cosmétisme—« la foi en ce que des ajustements relativement superficiels de nos activités vont assurer la maintenance du Nouveau Monde et perpétuer l’âge de l’exubérance »— dont parle William Catton. La publication de cet article expose bien le côté gestion des nuisances plutôt que suppression des problèmes dont relève leur ligne éditoriale. Au lieu de dire clairement que la Saint-Valentin est une escroquerie qui pousse à la consommation, ils conseillent d’acheter des fleurs bio. Nous n’avons pas besoin d’une industrie florale biologique, nous n’avons pas besoin d’une industrie florale tout court. Le bio en tant que label inventé par et pour la société industrielle n’est d’aucune aide dans la lutte contre la corporatocratie ; il ne correspond pas du tout à des pratiques réellement respectueuses de l’environnement.
Reporterre qui, en cette période électorale, couvre l’écologie politicienne du parti « vert » (EELV), du parti socialiste, et de Jean-Luc Mélenchon, comme si la politique institutionnelle avait d’autres objectifs que de faire diversion et de désamorcer des colères légitimes et utiles. Comme si les institutions créées par et pour la corporatocratie pouvaient faire autre chose que ce pour quoi elles furent conçues.
Ce qui nous amène à l’illusion du réformisme, et à la meilleure illustration de son absurdité et de son échec : le développement durable. Il s’agit de la prétention, vieille de plus de 40 ans, selon laquelle tout le système industriel pourrait être rendu écologique (dans le sens de respectueux de l’environnement) à l’aide d’améliorations technologiques ou techniques. Des millions d’ampoules basse consommation et de sacs en bioplastique après, nous pouvons constater ce qui était couru d’avance, à savoir que rien n’a changé, que tout a empiré, et que tout empire.
Conduire une prius, acheter bio, équitable ou responsable n’améliore pas l’état écologique du monde, au contraire. Cela ne fait que donner bonne conscience.
Il suffit d’y réfléchir quelques instants pour comprendre. Toutes les industries sont hautement destructrices. L’industrie de la pêche ? Une catastrophe. L’industrie de la high-tech ? Un désastre (d’Agbogbloshie, dans la banlieue d’Accra, au Ghana, à la colline fumeuse de Manilles, aux Philippines, en passant par Guyiu en Chine, on en sait quelque chose). L’industrie du textile ? Même chose. L’industrie de l’automobile ? L’industrie de l’armement ? Pourriez-vous citer une seule industrie qui ne soit pas une calamité écologique ?
—- si vous êtes arrivés ici, Recevez toute ma gratitude pour le temps accordé et l’importance de ce texte et je vous invite à lire la fin sur le site d’origine de l’article, question de respect pour le travail effectué par son auteur :
Si malencontreusement le lien ne serait plus valable ou le site un jour fermé, m’en demander une copie intégrale .
koan