Avortement : La réponse de Murielle Robin à François Fillon

Voilà que Francois Fillon remet sur le tapis un sujet que l’on croyait réglé

Cela m’amène à une réflexion et à un retour sur un temps que vous n’avez peut-être pas vécu.

Je suis de la génération où les femmes défilaient dans la rue pour réclamer le droit à l’avortement pour toutes, le droit de décider librement quand et pourquoi elles choisissaient de donner la vie.  A cette époque, l’avortement n’était accessible qu’aux femmes aisées qui avaient les moyens de s’offrir un voyage vers une clinique à l’étranger. En France, lorsque l’on était pauvre, on se tournait vers de dangereuse pratiques moyenâgeuse qui fonctionnaient ou non, et parfois vous rendaient définitivement stériles ou vous tuaient.  Pour vous donner une idée, actuellement au Sénégal, du fait d’une juridiction inadaptée et d’une information défaillante, il y a près de 50 000 IVG clandestines par an (1) avec les conséquences sanitaires qui s’en suivent. Restreindre l’avortement, n’en fait pas diminuer le nombre et tue des femmes.

Il ne s’agit pas ici de débattre sur coté moral de la question. Le choix appartient intimement à chacun et chacune.  Mais pour qu’un choix libre soit possible, il faut que l’accès à l’avortement soit établi également pour toutes.  Accès ne signifie pas forcément usage ou obligation. 

Il est clair que de nombreux paramètres de notre société ne concourent pas à une politique familiale et que, de ce fait, la maîtrise des naissances est indispensable.

Je me souviens, pour l’avoir vécu à mes dépends, de l’époque où un terrorisme idéologique  féministe culpabilisait et ridiculisait  les mères de familles qui souhaitaient rester chez elles à élever leurs enfants. C’était mon cas, cela me comblait et je pouvais le faire. Mais  l’assumer  contre la doxa à la mode n’était pas aisé. Pour le milieu bobo parisien on était une hasbeen, une rétrograde, une soumise… une inculte !  Les féministes des années 60/70 ont poussé les femmes à avoir une profession pour ne pas dépendre de l’homme et devenir son égale. Elles devaient trouver dans cet indépendance leur épanouissement. C’était bien entendu fondé, sauf que la liberté de celles qui préféraient l’autre option n’était pas respectée, ce qui était, vous l’avouerez, le comble !

Je ne suis d’ailleurs pas certaine aujourd’hui que la double peine de l’esclavage au boulot ajouté aux contraintes de la gestion d’un foyer qui repose encore beaucoup sur  les épaules des mères soit un véritable gain en liberté en épanouissement.  Il fut  brièvement question d’un salaire pour les mères de famille.. Cela me paraissait juste en ce qu’il laissait un choix libre  aux femmes à tous les niveaux de la société. Les féministes ont été vent debout contre cette idée qu’elles qualifiaient de rétrograde.

Pour en revenir au sujet,  la professionnalisation des femmes et ses contraintes a, par voie de conséquence certainement joué un rôle dans une l’utilisation pas toujours raisonné de ce droit à l’avortement : D’une part du fait des règles inadaptées des entreprises sur l’absentéisme des mères (freinant par là même l’évolution de la carrière), et d’autre part par l’état lacunaire à l’époque de l’information sur les méthodes de contraception dans la population, malgré les énormes efforts du Planning Familial.  Ceci a fait que l’avortement et c’est toujours le cas, a fini par être considéré comme une solution facile.  (Depuis les années 2000 alors que l’information circule tout de même mieux, le taux de recours à l’interruption de grossesse pour 100 grossesses abouties se situe toujours autour de 25%.)(chiffres INED)

Pour cette société dure et égoïste, l’enfant n’est plus un cadeau de la vie, il encombre. C’est tellement vrai que plus le niveau social d’un groupe s’élève, plus son taux de natalité diminue, c’est le problème de l’Allemagne.  Paradoxalement,  la paupérisation d’une société habituée au confort  plombe le désir d’enfants. De ce que je lis et entend, de plus en plus de jeunes s’interrogent sur l’opportunité de procréer dans cette société malade et incertaine.  Ce n’est pas en restreignant le droit à l’IVG que l’on règlera le problème. M. Fillon est à côté de la plaque.

Les  déclarations du candidat ont bien entendu semé le trouble sur le sujet. Murielle Robin, féministe assumée a, sur un plateau de télévision, poussé un coup de gueule et dit, avec un langage très fleuri, ce qu’elle en pensait, et ça fait le buzz.  N’étant pas moi-même une féministe acharnée, vous l’aurez compris, je trouve cependant que ce qu’elle dit est vrai : Marre de ces mâles à la Fillon qui s’arrogent le droit de décider pour nous.  Mais finalement, que font d’autres les politiques que de s’ingérer en permanence dans nos vies ?

« Ça me fatigue ces hommes qui décident pour les femmes. On est entre les mains des hommes comme si on n’était rien ! Mais pour quoi on nous prend ? Je suis humiliée, je suis insultée, je suis offensée. Ça va, ça se passe bien entre vous les mecs ? Tout va bien ? Dites-nous hein ! On couche, on pond… Dites ce qui vous arrange : devant ? Derrière ? La bouche ? Dites-nous : trois enfants ? Deux ? Dites-nous ! Pauvre Simone Veil ! »

La réponse de fond à ce problème douloureux n’est pas politique. Il ne sera résolu ni par le jugement, ni par la répression, ni par le laisser faire. Dans une société dans laquelle l’enfant devient une gêne, elle réside dans l’éducation, la réflexion et la responsabilisation  conjointes et égalitaires des garçons et des filles, la prise de conscience de l’importance du respect de soi, de l’autre, de l’amour dans le rapport à l’autre, de la vie, d’une information solide sur la prévention afin que l’acte d’avortement soit vu comme il est  : non pas une forme de contraception comme une autre mais une décision traumatisante comme solution ultime. Dans une société économiquement sécure, plus éveillée et généreuse, l’avortement ne serait plus qu’une question mineure.

Galadriel

http://positivr.fr/muriel-robin-simone-veil-avortement-salut-les-terriens/
(1) https://senepeople.com/2015/04/16/senegal-pres-de-cinquante-mille-avortements-clandestins-chaque-annee/

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