Lascaux : Relire la préhistoire au féminin

Lascaux : et si des femmes préhistoriques avaient peint la grotte ?

par Rémi Sulmont , Loïc Farge

Pourquoi quand on pense à la Préhistoire, il n’y a que des hommes ? Pourquoi dans nos têtes l’homme chasse et peint, alors que la femme cueille et fait cuire le mammouth ? La question se pose. Voici les explications. La Préhistoire n’a très longtemps été qu’une discipline d’hommes. La découverte de Lascaux en 1940, par exemple, a été très masculine. Ce sont quatre jeunes hommes (des adolescents) qui l’ont mise à jour, et ce ne sont pas chercheuses qui se sont penché sur la grotte. L’image du paléontologue, aujourd’hui encore, c’est Yves Coppens, un bon barbu. Notre société a évolué, on en n’est plus à la « femme au foyer ». Mais concernant notre représentation des temps préhistoriques, si.

C’est vrai qu’on oublie presque que les femmes préhistoriques, c’était la moitié de l’Humanité et qu’il « convient de réhabiliter ». Si on pouvait en finir en 2016 avec « L’homme de Cro-Magnon armé d’un gourdin qui traîne sa conquête dans une grotte pour la violer » ça serait pas mal, nous dit Claudine Cohen. La paléontologue, également philosophe des sciences, vient d’écrire un livre captivant, intitulé Femmes de la Préhistoire.

Donner une place aux femmes de la Préhistoire

Selon elle, on a très bien pu peintre à Lascaux la « Chapelle Sixtine » du Paléolithique. « Il faut donner aux femmes une place dans la Préhistoire, et pourquoi pas la place d’artiste. Si les hommes étaient tellement occupés qu’on le dit à aller vers les lointains et à courir après les mammouths et les autres animaux qu’ils chassaient, les femmes pouvaient très bien réaliser certaines de ces images », soutient Claudine Cohen. « Je ne pense pas qu’on puisse dire qu’elles ont tout fait (…), mais il faut simplement introduire la possibilité que les femmes aient été artistes« , ajoute-t-elle.

Les preuves, quand on remonte au Paléolithique, ce n’est pas évidement. Cela dit, pendant longtemps, « on n’a pas trouvé d’éléments sur les femmes préhistoriques, sur leur rôle, parce qu’on en cherchait pas », explique Claudine Cohen. Cela a changé.

Un scientifique américain a mis au point un logiciel qui permet d’analyser les fameuses mains dessinées dans les grottes. La main – notamment la différence entre l’index et l’annulaire – n’étant pas la même chez l’homme et la femme, il arrive à la conclusion que, par exemple, dans la grotte de Pech Merle dans le Lot la moitié des mains sont celles de femmes. Voilà qui modifie le regard.

« Préhistoire expérimentale »

Autre élément : des femmes – avant, il n’y avait que des hommes – font aujourd’hui ce qu’on appelle de la « Préhistoire expérimentale ». Elles refont les gestes techniques des hommes préhistoriques. Elles ont a permis de démontrer une évidence : les femmes avaient la force physique de tailler une lame. Bref on n’a pas besoin d’être un gros costaud poilu pour faire des outils. Pourquoi alors ne pourraient-elles pas partir à la chasse ? Sans participer à la mise à mort de l’animal, elles pouvaient très bien courir après le gibier.

Or s’il y a des chasseuses, et pas seulement des chasseurs, cela signifie qu’elles avaient aussi une connaissance des animaux pour les dessiner dans les grottes. L’idée que seuls des hommes pouvaient être les « Picasso des Cavernes » s’effondre. En fait, ce sont nos cours de Préhistoire qu’il faut entièrement démonter et repeindre.

Article source : http://www.rtl.fr/actu/societe-faits-divers/lascaux-et-si-des-femmes-prehistoriques-avaient-peint-la-grotte-7786181897