« Le premier terrorisme est celui du dieu argent »
Cette phrase du pape François a suscité beaucoup de commentaires dans les médias. Appréciée par certains, comme l’Humanité d’autres ricanent doucement.. Oser comparer l’ultra-capitalisme au djihad, faut tout de même pas exagérer. Et pourtant ! Jetez un coup d’oeil sur l’article ci-dessous (vous noterez que les suicides économiques – 10 500 personnes par an – ne sont pas évoqués) vous verrez que cette petite phrase du pape n’est pas dénuée de fondement. Le système dans lequel nous vivons est bien un système violent et mortifère, il est moins scénarisé, c’est tout.
La crise de 2008 a entraîné une surmortalité par cancer
Article de mai 2016 – Marine de la Moissonnière
La crise financière de 2008 a contribué à une surmortalité par cancers dans le monde entier, selon une étude parue jeudi, dans la revue britannique The Lancet. Le nombre de morts supplémentaires par cancer enregistrés entre 2008 et 2010 s’élève à 500.000 personnes dans le monde, 160.000 au sein de l’Union européenne.
Le cancer est la première cause de décès dans le monde. La crise a accentué cette situation. Le chômage est pointé du doigt ainsi que les coupes dans les dépenses de santé. Ainsi d’après cette étude, une hausse de 1% du chômage entraîne 0,37 mort par cancer de plus pour 100.000 habitants. Une baisse du budget de la santé de 1% du PIB aboutit à 0.0053 mort supplémentaire.
Comment les chercheurs ont-ils abouti à ces résultats ?
Ils sont partis des chiffres de la Banque mondiale et de l’Organisation mondiale de la Santé. Ils ont étudié la période allant de 1990 à 2010. Ils se sont concentrés sur certains types de cancers : les cancers traitables dont le taux de survie est supérieur à 50% (cancers du sein, de la prostate et colorectal) et ceux incurables avec une survie inférieure à 10% (cancers du pancréas et des poumons).
Les auteurs de cette étude se sont rendu compte qu’il y a une corrélation entre le chômage et la mortalité du cancer. En clair, plus il y a de chômage, plus il y a de personnes qui meurent du cancer. Dans les pays où il n’y a pas de couverture sociale pour tous, les gens qui n’ont pas de travail, et donc pas d’assurance santé, vont sans doute chez le médecin plus tard, ce qui veut dire un diagnostic et un traitement tardifs, ainsi que des soins de moins bonne qualité, analyse l’un des chercheurs. Le fait qu’il y ait encore plus de personnes qui soient mortes de cancers qui auraient pu être soignés pendant la crise, prouve que des économies dans le secteur de la santé peuvent coûter des vies.
Ce n’est pas la première fois que des études démontrent le lien entre chômage, réduction budgétaire et maladies.
L’impact de la hausse du chômage et de la baisse des dépenses de santé sur les maladies physiques mais aussi mentales a déjà été prouvé. Le chômage est notamment responsable d’accidents cardiovasculaires, de pathologies chroniques, de dépressions et de suicides. En mars 2015, l’Institut français pour la santé et la recherche médicale (Inserm) a mis en évidence une « surmortalité très importante » chez les chômeurs, trois fois plus importante que celle des personnes ayant un emploi, soit un effet comparable à celui du tabagisme.
« Le chômage est un problème majeur de santé publique », concluait le Conseil économique, social et environnemental français début mai 2016. 10.000 à 14.000 décès par an lui sont imputables en France. A titre de comparaison, 3.464 personnes sont mortes sur les routes l’an dernier.
Le chômage a aussi des effets sociaux
Il augmente, par exemple, les risques de séparation au sein d’un couple. Il a aussi un effet sur l’avenir des enfants. Selon une étude de 2004, en France, quand ses parents sont au chômage, un enfant voit sa probabilité d’avoir son bac baisser de 12 points.
Toutes ces conséquences médicales ou sociales du chômage sont de plus en plus étudiées depuis quelques années.
Mais elles restent encore méconnues et peu prises en compte. « La mobilisation collective est quasi-inexistante », déplore ainsi le Conseil économique, social et environnemental français. Pas grand-chose n’est fait pour rompre ce cercle vicieux. Plus on est chômage, moins on est en bonne santé. Et moins on va bien, plus il est difficile de retrouver un emploi.