L’alcool lié à 7 types de cancers. Coup de gueule d’une épidémiologiste
Dunedin, Nouvelle-Zélande – Médecin et épidémiologiste, le Pr Jennie Connor (département de médecine sociale et préventive, Université d’Otago, Nouvelle-Zélande) tape du poing sur la table et pousse, ce qui ressemble fort, à un coup de gueule – l’article est d’ailleurs publié dans la rubrique « A débattre » de la revue Addiction [1].
« Oui, affirme-t-elle, on a aujourd’hui assez de preuves pour dire que l’alcool est directement en cause dans la survenue de 7 cancers : oropharynx, larynx, œsophage, foie, côlon, rectum et le cancer du sein féminin ».
Elle dénonce, par ailleurs, un défaut d’information à destination du grand public et évoque des messages tronqués et brouillés – notamment de la part des médias. Les articles, selon elle, minimisent cette relation de cause à effet en utilisant des formules qui prêtent à confusion, et sont même carrément trompeurs quand ils émanent des industriels de l’alcool.
Dès publication de l’analyse, deux associations de prévention des risques liés à l’alcool, l’une anglaise, l’autre française, ont réagi pour relayer et appuyer la prise de position du Pr Connor [2,3].
Cancer et alcool : une accumulation de preuves
Chaque jour, de nouvelles études viennent s’ajouter à d’autres plus anciennes, et aujourd’hui, les preuves épidémiologiques sont suffisantes pour affirmer, et le Pr Connor le fait haut et fort, que la consommation d’alcool est directement en cause dans sept localisations cancéreuses oropharynx, larynx, œsophage, foie, côlon, rectum et le cancer du sein féminin.
Cette conclusion émerge de 10 années de recherche, et inclut les analyses et les méta-analyses les plus récentes. La relation alcool-cancer est dose-réponse, linéaire ou exponentielle, et observable même en cas de consommation légère à modérée. Plusieurs points viennent appuyer la démonstration de la chercheuse.
Selon elle il y a un flou volontairement entretenu :
« la relation entre alcool est cancer est souvent minimisée, présentée comme un « lien », les médias préférant évoquer un cancer « attribuable à l’alcool » ou parler des effets de l’alcool sur le risque de cancer, ce qui implique une relation causale mais peut être facilement interprêté comme quelque chose de plus labile. Parmi les professionnels de santé, les journalistes et le grand public, il y a deux aspects en particulier qui peuvent être source de confusion : ce qui signifie être « cause de », et la «qualité de la preuve »,
explique-t-elle.
« Par exemple, le fait que l’on ne connaisse pas les mécanismes biologiques exacts par lesquels l’alcool cause le cancer peut être vu comme une objection au fait que cela en soit réellement une. Le fait que ces cancers aient d’autres origines vient aussi concurrencer le rôle de l’alcool. De plus, l’analogie avec le rôle tabac dans le cancer du poumon n’est pas suffisamment proche. Le rôle causal de l’alcool est souvent vu comme plus complexe que celui du tabac, et la solution qui découlerait de l’analogie avec le tabac – à savoir réduire, voire arrêter de consommer de l’alcool – est largement considérée comme inacceptable »
ARTICLE COMPLET : (édition abonnés) http://francais.medscape.com/voirarticle/3602573_2?nlid=108775_2401
Voici le dossier de presse qu’a publié le 1er aout l’APAA (Association de
Prévention en Alcoologie et Addictologie) sur la base de cette étude :
Alcool et cancer : Les preuves s’accumulent.Vin & Société désinforme
Une étude publiée dans la revue Addiction par une équipe néo-zélandaise[1] confirme de manière incontestable, sur la base d’une méta-analyse de grande ampleur, le lien entre consommation d’alcool et survenue du cancer pour sept localisations : oropharynx, larynx, œsophage, foie, côlon, rectum et sein. Cette étude confirme également que l’augmentation du risque de survenue du cancer est proportionnelle à la quantité consommée et qu’elle s’observe même chez les consommateurs à doses faibles et modérées.
Par ailleurs, dans la même publication, les auteurs présentent les résultats d’une étude remarquable sur le plan scientifique (1 million de femmes suivies pendant 7 ans) qui indiquent qu’une consommation faible (70 à 140 g d’alcool par semaine, soit 7 à 14 consommations) augmente le risque de cancer du sein de 13 %.
Face à ces données scientifiques incontestables, il est nécessaire de mettre en place une politique de réduction du risque alcool fondée sur la connaissance et non sur le déni ou des informations tronquées et donc trompeuses. C’est pourquoi, il est particulièrement choquant de lire sur le site du lobby alcoolier Vin & Société[2] des affirmations fausses telles que :
« Un consensus existe sur les bénéfices d’une consommation modérée de vin sur la survenue du cancer colorectal et du cancer de l’œsophage », ou encore « des controverses existent sur les cancers…, des voies aéro-digestives supérieures excepté l’œsophage (l’effet serait bénéfique, neutre ou néfaste)…, mais aussi sur le cancer du sein (l’effet serait néfaste ou neutre pour les cancers hormono-dépendant, alors que d’autres publications indiquent un effet néfaste voire bénéfique pour les cancers du sein non-hormono-dépendants) ».
Ces allégations totalement fausses sur le plan scientifique n’ont pour objectif que de minorer les dangers de l’alcool pour protéger des intérêts économiques au détriment de la vérité scientifique et de la santé de la population.
C’est pour cette raison que les chercheurs néo-zélandais pointent du doigt les études qui mettent en avant les bienfaits du vin sur la santé, alors que ceux-ci ne sont aucunement démontrés[3].
Une politique de la prévention du cancer et de la réduction du risque lié à la consommation d’alcool doit reposer sur une information honnête du public et non sur des notions floues comme la modération qui n’ont pour autre objectif que de protéger les intérêts d’un lobby.
Comme le réaffirment les chercheurs néo-zélandais, seul l’objectif de l’OMS est pertinent en termes de santé publique :
Boire moins, c’est mieux
[1] Alcohol consumption as a cause of cancer, Jeannie Connor, Addiction, 2016
[2] http://www.vinetsociete.fr/eclairer-l-opinion/etude-vin-et-sante
[3] Do “Moderate” Drinkers Have Reduced Mortality Risk? A Systematic Review and Meta-Analysis ofAlcohol Consumption and All-Cause Mortality. Tim STOCKWELLand
Télécharger le dossier Décryptages N° 11 – Vin & Société : L’offensive contre la santé