Loi travail : Le rapport censuré de l’IGAS qui réhabilitait les 35 heures

Vous vous souvenez que la Loi Travail a  fait sauter les 35 h et élargi le temps possible de travail pour un salarié ? L’Inspection Générale des Affaires Sociales avait émis un rapport de 105 pages favorable à la réduction du temps de travail qui n’a jamais été remis au gouvernement   pour des raisons purement idéologiques. Une enquête exclusive de Médiapart publiée ce matin dont nous publions quelques extraits : 

L’Inspection générale des affaires sociales n’aura pas retenu très longtemps le « Rapport d’évaluation des politiques d’aménagement-réduction du temps de travail dans la lutte contre le chômage ». Sa censure inédite par le chef de l’Igas a scandalisé en interne, des inspecteurs l’ont fait fuiter. Seuls ses auteurs resteront inconnus : ils n’ont pas signé leur travail, daté de mai dernier. Il leur appartient pourtant, puisque l’Igas a refusé de le communiquer au gouvernement. Aucune naïveté chez eux, dès l’introduction du rapport, ils écrivent : « Compte tenu du caractère polémique de cette question depuis une quinzaine d’années, la mission a souhaité appréhender le sujet sous une forme globale, la plus objective et la plus précise possible. »  

Dans une première partie, les inspecteurs se livrent à une analyse de l’évolution du temps de travail dans différents pays développés et veulent « rappeler des faits trop souvent méconnus ». Par exemple que « la durée du travail diminue dans tous les pays européens » ou que « la durée effective du travail en France n’est pas particulièrement basse par rapport à celles des autres membres de l’Union européenne si l’on considère le temps de travail de tous les salariés, et pas seulement ceux à temps complet ». Les inspecteurs soulignent à quel point « se focaliser sur la seule durée à temps complet » – qui permet parfois de conclure que « les Français ne travaillent pas assez » – est « extrêmement trompeur ». L’Allemagne, l’Espagne ou l’Italie, dont la durée légale est plus haute qu’en France, ont de leur côté eu recours au « développement massif » du temps partiel. Autre tendance européenne commune : le travail s’est intensifié, la France faisant partie d’un groupe de pays où l’intensité est moyenne mais a augmenté fortement.

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Pour eux, les lois Aubry ont satisfait à ces conditions. Et ils tranchent le débat sur le nombre d’emplois créés par les 35 heures : 350 000 entre 1998 et 2002. Pour eux, « les arguments avancés pour contester ces créations d’emploi apparaissent fragiles ». Et « s’agissant de l’effet négatif des lois Aubry sur la compétitivité, aucun élément ne permet de confirmer cette affirmation », poursuivent-ils. Les inspecteurs sont plus critiques sur les politiques qui ont développé le temps partiel, expérimentées en France entre 1993 et 2002. Elles ont créé « au plus 150 000 emplois ». Mais ils estiment qu’un « temps partiel de qualité », autrement dit en CDI, « peut faciliter l’emploi de certains publics » : les populations précaires, les parents de jeunes enfants, les seniors.

Ce très intéressant article de Médiapart qui publie le rapport en PDF est réservé aux abonnés, aussi ne puis-je vous le délivrer en entier. Je vous en donne encore la conclusion :

…/…Mais le SMIGAS  (syndicat de l’IGAS) s’est procuré l’avis du relecteur et il « ne demande pas la non-transmission du rapport au gouvernement. Pour l’essentiel, cet avis, circonstancié, souligne d’une part, le très gros travail fourni par l’équipe d’inspection ; d’autre part, la formulation de conclusions et propositions qui s’éloignent de la pensée d’économistes qualifiés de “conventionnels” ».

Les inspecteurs auraient donc commis la faute, d’ordre idéologique, de s’ouvrir à des réflexions d’économistes « hétérodoxes » sur les politiques du temps de travail. Ils assurent pourtant avoir trouvé des « pistes d’amélioration quantitative et qualitative » pour lutter contre le chômage.

https://www.mediapart.fr/journal/economie/180716/les-inspecteurs-de-l-igas-rehabilitent-les-35-heures

Ainsi fonctionne le monde politique. Faire des propositions pour améliorer le chômage avec des moyens qui vont contre la doxa dominante n’est pas recevable. Il s’agissait avant tout de satisfaire le MEDEF.

Chômeurs, vous apprécierez !

Le combat continue.

 

 

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