Biodiversité : Un bilan très décevant de la loi !

L’Assemblée nationale a adopté le projet de loi sur la biodiversité. Mais à côté d’avancées comme l’interdiction des néonicotinoïdes, la loi cède aux lobbys de la chasse et de la pêche industrielle. Et réduit la biodiversité à une valeur d’usage.

23 mars 2016 / Lorène Lavocat (Reporterre)

Dans la série télévisée – sur la chaine de l’Assemblée nationale – Loi biodiversité vient d’achever un épisode. Vendredi 18 mars, les députés ont achevé leur examen en deuxième lecture du projet de loi. Au total, ils ont adopté 239 amendements sur ce texte. Mais il n’y a guère à se réjouir.

Les débats ont été âpres. En cause, l’assaut tous azimuts des lobbys de l’agro-industrie, de la chasse ou encore de la pêche industrielle. « Les discussions ont été extrêmement dures, confirme Geneviève Gaillard, rapporteuse socialiste du texte. Mais nous avons tenu le choc. » À ses côtés, la députée écologiste Laurence Abeille et le député Les Républicains Serge Grouard opinent. « Nous venons de vivre une course d’endurance, avec de nombreuses haies à franchir », décrit Mme Abeille.

Résultat, un texte « fragile, perfectible et moyennement satisfaisant », d’après Mme Gaillard, visiblement déçue. « Le débat a été particulièrement transparent quant à la pression des lobbys, les masques sont tombés », confirme Pascal Canfin, du WWF. Symbole de cette puissance de frappe : la suppression de l’article interdisant le chalutage en eau profonde, suite au chantage du comité régional des pêches de Bretagne. Du côté de la réglementation de la chasse aussi, les reculades sont nombreuses. Autorisation de la chasse à la glu, traque des mammifères en période de reproduction, non reconnaissance de la sensibilité des animaux sauvages. « Le texte entendait reconquérir la biodiversité, rappelle le président de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO), Allain Bougrain Dubourg. À l’arrivée, nous sommes pathétiquement frustrés. »

Dans la bataille contre les intérêts des firmes privées, les députés ont pourtant arraché plusieurs victoires, et en premier lieu, l’interdiction des pesticides néonicotinoïdes en 2018. Un débat vif, qui a vu s’opposer deux ministres, celui de l’Agriculture, Stéphane Le Foll, défavorable à l’interdiction, et celle de l’Environnement, Ségolène Royal, favorable. Et un vote sur le fil, à 30 voix contre 28… « Le vote a été très tendu, la victoire n’était pas évidente », constate le député Serge Grouard. Autres satisfactions pour Geneviève Gaillard, l’adoption du préjudice écologique et la lutte contre les pollutions lumineuses. Sur ce point, l’Association nationale pour la protection du ciel et de l’environnement nocturne (Anpcen) se dit très enthousiaste : « C’est la première fois qu’une loi reconnaît la singularité des paysages nocturnes et la nécessité de les protéger », se réjouit Anne-Marie Ducroux, la présidente de l’Anpcen.

« Une occasion gâchée »

Malgré ces avancées, Jean-David Abel, de France nature environnement, ne cache pas son scepticisme : « C’est une loi au milieu du gué, marquée de nombreuses incohérences. » Ainsi le texte facilite la circulation des semences paysannes, interdit le brevetage des plantes et des animaux issus de sélection traditionnelle, mais refuse de statuer quant aux nouvelles techniques de manipulation génétique qui menacent ces mêmes semences traditionnelles. De la même manière, la future taxe sur l’huile de palme a été revue au rabais, passant de 300 € par tonne dans sa version d’origine à 90 €. « Le manque de courage politique du gouvernement conduit à une loi insatisfaisante, estime Jean-David Abel. C’est une occasion gâchée. »

SUITE DE L’ARTICLE :

http://reporterre.net/Le-bilan-tres-decevant-de-la-loi-sur-la-biodiversite

LIRE ET RELIRE : LA DÉCLARATION DU CHEF INDIEN SEATTLE

 » Comment peut-on vendre ou acheter le ciel, la chaleur de la terre ? Cela nous semble étrange. Si la fraîcheur de l’air et le murmure de l’eau ne nous appartient pas, comment peut-on les vendre ? « 

 » Pour mon peuple, il n’y a pas un coin de cette terre qui ne soit sacré. Une aiguille de pin qui scintille, un rivage sablonneux, une brume légère, tout est saint aux yeux et dans la mémoire de ceux de mon peuple. La sève qui monte dans l’arbre porte en elle la mémoire des Peaux-Rouges. Les morts des Blancs oublient leur pays natal quand ils s’en vont dans les étoiles. Nos morts n’oublient jamais cette terre si belle, puisque c’est la mère du Peau-Rouge. Nous faisons partie de la terre et elle fait partie de nous. Les fleurs qui sentent si bon sont nos sœurs, les cerfs, les chevaux, les grands aigles sont nos frères ; les crêtes rocailleuses, l’humidité des Prairies, la chaleur du corps des poneys et l’homme appartiennent à la même famille. Ainsi, quand le grand chef blanc de Washington me fait dire qu’il veut acheter notre terre, il nous demande beaucoup… « 

 » Les rivières sont nos sœurs, elles étanchent notre soif ; ces rivières portent nos canoës et nourrissent nos enfants. Si nous vous vendons notre terre, vous devez vous rappeler tout cela et apprendre à vos enfants que les rivières sont nos sœurs et les vôtres et que, par conséquent, vous devez les traiter avec le même amour que celui donné à vos frères. Nous savons bien que l’homme blanc ne comprend pas notre façon de voir. Un coin de terre, pour lui, en vaut un autre puisqu’il est un étranger qui arrive dans la nuit et tire de la terre ce dont il a besoin. La terre n’est pas sa sœur, mais son ennemie ; après tout cela, il s’en va. Il laisse la tombe de son père derrière lui et cela lui est égal ! En quelque sorte, il prive ses enfants de la terre et cela lui est égal. La tombe de son père et les droits de ses enfants sont oubliés. Il traite sa mère, la terre, et son père, le ciel, comme des choses qu’on peut acheter, piller et vendre comme des moutons ou des perles colorées. Son appétit va dévorer la terre et ne laisser qu’un désert… « 

 » L’air est précieux pour le Peau-Rouge car toutes les choses respirent de la même manière. La bête, l’arbre, l’homme, tous respirent de la même manière. L’homme blanc ne semble pas faire attention à l’air qui respire. Comme un mourant, il ne reconnaît plus les odeurs. Mais, si nous vous vendons notre terre, vous devez vous rappeler que l’air nous est infiniment précieux et que l’Esprit de l’air est le même dans toutes les choses qui vivent. Le vent qui a donné à notre ancêtre son premier souffle reçoit aussi son dernier regard. Et si nous vendons notre terre, vous devez la garder intacte et sacrée comme un lieu où même l’homme peut aller percevoir le goût du vent et la douceur d’une prairie en fleur… « 

 » Je suis un sauvage et je ne comprends pas une autre façon de vivre. J’ai vu des milliers de bisons qui pourrissaient dans la prairie, laissés là par l’homme blanc qui les avait tués d’un train qui passait. Je suis un sauvage et je ne comprends pas comment ce cheval de fer qui fume peut-être plus important que le bison que nous ne tuons que pour les besoins de notre vie. Qu’est-ce que l’homme sans les bêtes ? Si toutes les bêtes avaient disparu, l’homme mourrait complètement solitaire, car ce qui arrive aux bêtes bientôt arrive à l’homme. Toutes les choses sont reliées entre elles. « 

 » Vous devez apprendre à vos enfants que la terre sous leurs pieds n’est autre que la cendre de nos ancêtres. Ainsi, ils respecteront la terre. Dites-leur aussi que la terre est riche de la vie de nos proches. Apprenez à vos enfants ce que nous avons appris aux nôtres : que la terre est notre mère et que tout ce qui arrive à la terre arrive aux enfants de la terre. Si les hommes crachent sur la terre, c’est sur eux-mêmes qu’ils crachent. Ceci nous le savons : la terre n’appartient pas à l’homme, c’est l’homme qui appartient à la terre. Ceci nous le savons : toutes les choses sont reliées entre elles comme le sang est le lien entre les membres d’une même famille. Toutes les choses sont reliées entre elles… « 

 » Mais, pendant que nous périssons, vous allez briller, illuminés par la force de Dieu qui vous a conduits sur cette terre et qui, dans un but spécial, vous a permis de dominer le Peau-Rouge. Cette destinée est mystérieuse pour nous. Nous ne comprenons pas pourquoi les bisons sont tous massacrés, pourquoi les chevaux sauvages sont domestiqués, ni pourquoi les lieux les plus secrets des forêts sont lourds de l’odeur des hommes, ni pourquoi encore la vue des belles collines est gardée par les fils qui parlent. Que sont devenus les fourrés profonds ? Ils ont disparu. Qu’est devenu le grand aigle ? Il a disparu aussi. C’est la fin de la vie et le commencement de la survivance. « 

Chef Seattle, 1854

http://tigroo92.ouvaton.org/Declaration-de-Seattle-chef-indien.html

IMAGE A LA UNE : Visualhunt.com