Comprendre le retrait des troupes russes de Syrie

Le retrait russe. Un coup d’avance pour Poutine sur l’échiquier syrien

Le secrétaire général de l’Otan, M.Jens Stoltenberg, a déclaré le 2 février qu’il approuvait la proposition du secrétaire d’État à la Défense Ashton Carter de multiplier par quatre les troupes et les armements américains en Europe pour lutter contre l’agression russe.

On aura tout dit de la tentation tsariste de Poutine qui veut faire retrouver à la Russie l’aura de Pierre le Grand. Pourquoi pas?

Cependant, dans la réalité Poutine ne fait que se défendre, et défendre ses intérêts. Contre la tentation d’empire américain au nom d’une Destinée manifeste.

Pourtant, d’après le Réseau Voltaire, la revue allemande Focus a pu consulter un rapport secret de l’Otan sur l’opération militaire russe en Syrie. Selon ce document, les avions russes, quoique moins nombreux que ceux de la Coalition occidentale, ont de meilleurs résultats. Ceci s’expliquerait à la fois par la supériorité technologique du Sukhoï Su-35 et par la qualité et la quantité du renseignement réuni par l’Armée arabe syrienne. De nombreux rapports soulignent, depuis cinq mois, la supériorité des armées russes sur celles de l’Otan en matière de guerre conventionnelle. Il n’y a plus que David Cameron et François Hollande pour affirmer que «l’Otan demeure l’alliance militaire la plus forte dans le monde». (1)

Dans ce déploiement de muscles, l’annonce du président Vladimir Poutine de retirer une partie de ses troupes de Syrie a surpris par sa singularité. Il est vrai que Poutine depuis quelques années a habitué son monde par son apparente imprévisibilité, mais qui, en fait, résulte d’une préparation minutieuse. A l’instar d’un joueur d’échecs, il a toujours plusieurs coups d’avance sur les autres dirigeants du monde. Cependant, rien ne présageait cela du fait qu’il n’y avait pas de signe avant-coureur annonçant cela.

« Cette annonce intervient lit-on sur le Monde, alors que viennent de reprendre, à Genève, les négociations entre les acteurs du conflit syrien, qui dure depuis cinq ans et a fait plus de deux cent cinquante mille morts.

«J’espère que cette décision sera un bon signal envoyé à toutes les parties belligérantes»,

a souligné M. Poutine.

«Je souhaite que cela soit aussi un moyen d’augmenter significativement le degré de confiance entre les participants au processus [de paix].»

M. Poutine a d’ores et déjà annoncé que la base navale de Tartous et la base aérienne de Khmeymim «poursuivront leur travail habituel». «Elles doivent être efficacement défendues, du sol, de la mer et des airs», a-t-il encore affirmé (..) Depuis lors, plus de cinquante avions de combat russes ont visé des milliers de «cibles terroristes».

Cette force de frappe a permis à l’armée arabe syrienne d’engranger des victoires (…) Le régime syrien a affirmé lundi que la Russie continuerait à le soutenir dans sa lutte contre le «terrorisme».(…) Le retrait de l’essentiel des troupes russes de Syrie va contribuer à «augmenter la pression» sur le président Bachar Al-Assad, a pour sa part estimé le chef de la diplomatie allemande, Frank-Walter Steinmeier.» (2)

Une tentative d’explication

«Qué pasa, Vladimir? Que se passe-t-il s’interroge le chroniqueur du Grand Jeu. Certains de se demander «pourquoi et pourquoi maintenant?», alors que la Russie et ses alliés sont en plein momentum comme on dirait en rugby, en plein élan victorieux. Certes, l’intervention russe a considérablement changé la donne (…) Mais tout de même, pourquoi s’arrêter en si bon chemin(…) «les objectifs ont été globalement remplis» et cela «stimulera le processus de paix» – ne convainc qu’à moitié.»(3)

Analysant les causes possibles, le rédacteur poursuit: «Passons sur les «La Russie est ruinée» ou «Poutine abandonne Assad» qui prêtent à sourire.

Plus intéressantes sont les tentatives d’explication faisant état d’un accord avec les Etats-Unis chargés, en contrepartie, de mettre leur veto à toute velléité d’intervention turque ou saoudienne, voire un accord secret avec Riyadh: «J’arrête de bombarder tes rebelles, tu diminues ta production de pétrole pour faire remonter les prix.» Mais là encore, le doute subsiste: les Saoudo-Turcs ne pouvaient de toute façon pas intervenir sous peine d’une guerre ouverte avec la Russie qui aurait très mal tourné pour eux.» Le rédacteur conclut en suggérant que rien ne changera car les avions, les navires et les systèmes de défense antiaérienne resteront, ce qui est évidemment la seule chose qui compte sur le plan militaire. L’annonce du président russe serait donc un non-événement.» (3)

Il est vrai que les forces en face sont en plein désarroi. Aussi bien la Turquie que l’Arabie Saoudite. En effet, le roi Salman malade dirige par prince héritier interposé et nous savons que face à l’Iran, force montante dans la région, l’Arabie Saoudite se sent lâchée par son allié américain. De plus, les prix du pétrole sont au plus bas, à 39 $ du fait de la déclaration de l’Iran qui affirme être déterminée à produire 4 millions de barils/j au lieu des 2 millions de b/j actuels.

Pour le moment, les spécialistes pensent que l’outil de production est obsolète et ne pourra pas arriver à ce chiffre avant deux ou trois ans. En fait, Poutine mène «la danse» tout simplement parce qu’il sait ce qu’il veut. L’Europe pour des raisons bassement pécuniaires se met à la remorque de pseudos modérés salafistes.

Les Russes laissent les US/CE face à leur allié turc en pleine crise. Maintenant qu’il a consolidé le pouvoir d’Al Assad, Poutine refile le bébé EI aux Américains et leurs valets occidentaux, un remake de l’URSS en Afghanistan et ses talibans. Un nouveau bourbier en perspective.

Les Russes estiment avoir atteint le rapport des forces sur le terrain correspondant par la négociation à un élargissement des bases du pouvoir syrien en balayant l’opposition syrienne et en réduisant fortement la capacité de nuisance de Daesh sans l’annihiler.

Retrait russe: le triple coup de Poutine

Coup de communication savamment orchestré?

Plusieurs hypothèses sont plausibles. L’intervention russe, commencée le 30 septembre dernier, a effectivement permis d’atteindre les objectifs officieux, à savoir sécuriser le réduit alaouite (…) Les Russes sont revenus sur le devant de la scène internationale, ont écarté l’hypothèse d’une défaite militaire de leur allié Bachar El-Assad et ont fait une démonstration grandeur nature de leurs avancées technologiques en matière de défense. Mais leur objectif officiel, à savoir la lutte contre le terrorisme, est quant à lui loin d’être atteint. L’organisation Etat islamique est encore là tout comme la branche syrienne d’Al-Qaîda, le Front Al-Nosra. (4)

Avec cette déclaration, M. Poutine réalise en fait un triple coup:

  •  Un: c’est un moyen d’éviter l’enlisement alors que l’opération syrienne a un prix exorbitant pour une économie russe asphyxiée.
  •  Deux: c’est un gage de bonne volonté adressé aux Occidentaux à la veille des négociations syriennes.
  • Trois: c’est enfin un moyen de mettre le président Assad sous pression, en lui montrant que les Russes ne lui sont pas définitivement acquis. (…) L’annonce du président russe ressemble fortement à un cadeau empoisonné. Mais pour qui? Pour Damas? Pour les Occidentaux? Pour l’opposition syrienne? Ou pour les trois?» (4)

Quelles conséquences sur le terrain?

On sait que les tentatives de déstabiliser la Russie ont commencé avec la Géorgie. Par la suite, l’Otan a voulu encercler la Russie en disposant ses forces et ses missiles dans les pays voisins. La Russie a laissé faire sauf quand il s’est agi de l’Ukraine et de sa révolution colorée. Résultat des courses: il existe un glacis, c’est-à-dire une zone tampon entre la Russie et l’Ukraine avec les deux républiques séparatistes. On dit que: «Le chaos qui s’est emparé de l’Ukraine suite au coup d’Etat de Kiev en février 2014 approche du point de rupture. Déjà, sous gouvernance étrangère, non seulement le gouvernement ne peut avoir de majorité parlementaire, mais il a perdu tout soutien populaire, avec un Premier ministre à moins de 2%. Dans ce contexte, les accords de Minsk ne peuvent être appliqués, pas plus cette année que l’année dernière.

SUITE DE CETTE ANALYSE ET SOURCES : 

http://reseauinternational.net/le-retrait-russe-un-coup-davance-pour-poutine-sur-lechiquier-syrien/

Article du Pr

IMAGE A LA UNE  cet article sur le même thème :

http://reseauinternational.net/le-piege-tendu-par-poutine-en-retirant-le-contingent-russe-de-syrie/

 

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