Surveiller le traitement de vos vieux : Benzodiazépines et démence

L’article fait surtout allusion aux traitements des personnes agées chez lesquelles un syndrome dépressif est assez courant passé un certain seuil. Il n’est pas exclu non plus que les médicaments en cause soient parfois sur-prescrit dans les établissements de santé ou les maisons de retraite pour le confort des employés autant que pour le confort des malades. Songez que le fait de prendre ces médicaments plus jeune et sur de longues périodes pourrait donc être toxique pour votre vieillissement cérébral. 

Deux produits, très connus, sont particulièrement en cause : Lexomyl et Stilnox mais l’Imovane  et le Xanax très prescrits également font partie de l’étude.

L’article est simple à lire et les chiffres sont assez choquants.  Vous pouvez demandez à connaître le traitement de vos parents et en discuter avec leur médecin traitant !

Avoir dans son entourage une personne âgée atteinte d’Alzheimer ou de démence est une véritable croix.  Ceux qui savent me comprendront. Autant éviter….

Galadriel

(NB : Le mot « vieux » a été choisi volontairement et il a pour moi une consonance affectueuse.  Étant moi-même dans cette catégorie maintenant, je ne supporte pas les termes hygiénique de la novlangue genre : »les ainés »)

Paris, France L’utilisation prolongée de benzodiazépines est associée à un risque accru de démence chez les personnes âgées. Un sur-risque qui concerne surtout les molécules à demi-vie longue, lesquelles sont à éviter pour cette population, a rappelé le Pr Hélène Verdoux (service de psychiatrie adulte, CHU de Bordeaux), lors d’une intervention au 14ème congrès de l’Encéphale [1].

En 2012, une étude du Pr Bernard Bégaud (CHU de Bordeaux) et de ses collègues, à laquelle le Pr Verdoux a participé, a mis en évidence un risque accru de près de 50% de développer une démence chez les personnes âgées de 65 ans et plus, consommant des benzodiazépines. Avant la parution de l’étude, les autorités de santé avaient lancé une campagne de sensibilisation, afin de modérer l’utilisation de somnifères chez les personnes âgées.

Jusqu’à 84% de risque majoré

Menés par la même équipe, de nouveaux travaux [2] sont venus depuis confirmer ce risque majoré, en apportant des précisions sur la durée d’exposition aux benzodiazépines, a indiqué le Pr Verdoux. Les chercheurs ont pu également distinguer les molécules à demi-vie longue (≥ 20 heures) de celles à demi-vie courte (< 20 heures).

Cette fois, l’étude a utilisé les données de la Régie d’assurance maladie du Québec (RAMQ), qui a l’avantage de préciser le diagnostic, contrairement à la base de données française, a expliqué la psychiatre, également épidémiologiste. « On peut aussi connaitre le type de molécules prescrite et la durée d’exposition ».

Les chercheurs ont ainsi extrait les données concernant 1800 patients de plus de 65 ans, atteints de la maladie d’Alzheimer, suivis sur une période d’au moins six ans. Ils les ont ensuite comparées à celles de 7200 patients de la même tranche d’âge, en bonne santé.

L’analyse a montré que la moitié des patients (49,8%) atteints de la maladie d’Alzheimer avaient pris des benzodiazépines, contre 40% dans le groupe contrôle. Dans 64,8% des cas, ils prenaient toujours ces médicaments lorsque la maladie a été diagnostiquée.

Il est apparu que l’usage de benzodiazépines pendant moins de six mois, était aussi fréquent dans un groupe que dans l’autre. En revanche, une utilisation sur plus de six mois a été plus souvent observée chez les patients atteints de la maladie d’Alzheimer.

15 000 à 50 000 cas de démence par an dus à l’exposition aux BZD ?

Selon cette étude, une utilisation de benzodiazépines pendant trois mois ou plus est associée à une hausse moyenne du risque de développer ultérieurement une maladie d’Alzheimer de 51%.

Les chercheurs ont rapporté un risque variable selon la durée d’exposition et le type de molécule. Si le sur-risque n’est pas significatif pour une durée d’utilisation des benzodiazépines de moins de trois mois, il atteint 32% (IC95% : 1,01-1,74) pour 3 à 6 mois d’utilisation et 84% (IC95% : 1,62-2,08) pour une durée supérieure à 6 mois.

En considérant la durée d’action des molécules, un risque de maladie d’Alzheimer majoré de 70% (IC95% : 1,46-1,98) a été associé aux benzodiazépines à demi-vie longue, contre 43% (IC95%:1,27-1,61) pour celles à demi-vie courte.

En plus du risque encore plus élevé avec les benzodiazépines ayant une longue activité pharmacologique, il apparait que « le risque de démence augmente avec la durée d’exposition », a affirmé le Pr Verdoux. Ce qui renforce la suspicion d’un lien de cause à effet.

« Une solution temporaire », selon la HAS

Après une réévaluation des benzodiazépines dans le traitement de l’anxiété, menée en 2014, la Commission de la transparence a considéré que leur intérêt thérapeutique reste important, a indiqué la Haute autorité de santé (HAS), qui évoque toutefois, dans un communiqué , « une solution temporaire ».

« Leurs effets indésirables et le risque de dépendance qu’elles induisent doivent conduire à inscrire leur prescription dans une stratégie à court terme ». Les benzodiazépines anxiolytiques sont efficaces sur une période de 8 à 12 semaines, a rappelé la HAS.

« Il est donc important que, dès l’instauration d’un traitement par benzodiazépines dans la prise en charge de l’anxiété comme dans celle de l’insomnie, le médecin puisse impliquer le patient dans une démarche d’arrêt de ce traitement ».

Même si la France a été dépassée par l’Espagne en tête de liste des pays européens consommant le plus de benzodiazépines, le recours à ces médicaments sur de longue période reste très fréquent, surtout chez les personnes âgées, a souligné le Pr Verdoux.

L’épidémiologiste a présenté un rapide état des lieux pour l’année 2013, qui devrait être prochainement publié par l’ Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). Ainsi les anxiolytiques et les hypnotiques ont été consommés respectivement par 15 et 10% des personnes de 65 ans et plus.

Le Lexomil et le Stilnox en tête du palmarès

« La prévalence de la consommation des hypnotiques est plus élevée chez les femmes (15% en ont utilisé au moins une fois dans l’année). Et plus d’un quart des femmes âgées de 65 ans et plus, ont utilisé des anxiolytiques au moins une fois dans l’année.. »

Parmi les benzodiazépines, l’hypnotique zolpidem (Stilnox®, Sanofi-Aventis), une molécule à demi-vie courte, est la plus utilisée par les personnes âgées (8% des 65 ans et plus). Le bromazépam (Lexomil®, Roche), à demi-vie longue arrive en deuxième position (7%).

En troisième et quatrième position, on retrouve dans cette population deux autres benzodiazépines à demi-vie courte, la zopiclone (Imovane®, Sanofi-Aventis), hypnotique apparenté aux benzodiazépines et l’alprazolam (Xanax®, Pfizer), utilisés chacun par 6% environ des 65 ans et plus.

Pour pouvoir choisir les benzodiazépines, en fonction de leur demi-vie, l’assurance maladie a publié une fiche mémo, destinée aux médecins. Avec une demi-vie de 2h30, le zolpidem (Stilnox®) est la molécule ayant l’activité pharmacologique la plus courte. En comparaison, la demi-vie du bromazépam (Lexomil®) est de 20h.

 

REFERENCES :

1. H Verdoux, Rencontres avec l’expert: risque de démence et benzodiazépines, 14ème congrès de l’Encéphale, 20 janvier 2016, Paris.

2. S Billioti de Gage, Y Moride, T Ducruet, Benzodiazepine use and risk of Alzheimer’s disease: case-control study, BMJ 2014;349:g5205

Article de Vincent Richeux pour :

http://francais.medscape.com/voirarticle/3602144