Conso énergie : Effacement électrique une fausse bonne pratique

Par Michel Gay.

La coupure ou « l’effacement » d’appareils électriques à certains moments critiques (effacement électrique) permet de « lisser » les pointes de production préjudiciables au bon fonctionnement du réseau électrique. La nouveauté vient de la valorisation de cette absence de consommation qui enrichit des entreprises spécialisées dans ce commerce étonnant.

Le principe de l’effacement « diffus » est d’arrêter momentanément à distance une partie de la consommation électrique de particuliers. Par exemple, pendant la pointe de consommation d’hiver entre 18h45 et 19h15, les radiateurs électriques et les chauffe-eau sont mis autoritairement à l’arrêt. Les kilowattheures  (kWh) non consommés à ce moment-là ne sont pas perdus : ils sont revendus sur le marché de l’électricité à RTE (Réseau de Transport d’Electricité) pour « soulager » la pointe de consommation et équilibrer le réseau. Cet artifice  permet de diminuer l’appel aux centrales au fioul et au gaz quand l’électricité est la plus chère en raison de la demande élevée.

Cet effacement consiste donc à revendre de l’électricité… non consommée par les ménages pendant un temps (moins d’une heure).

Ainsi, la société « Voltalis » par exemple, équipe gratuitement en boîtier des foyers de particuliers pour éteindre leurs radiateurs électriques et leur chauffe-eau. Cette société est présidée par Pâris Mouratoglou qui a fait fortune grâce aux tarifs d’achats très largement subventionnés du photovoltaïque depuis 2009, dans des conditions qui intriguent la justice. Sa société a déjà investi 100 millions d’euros pour la mise en place de ce système tortueux et déployé un lobbying insistant pour donner une image économique et écologique… mais il y a un « hic ».

La quantité d’énergie non utilisée pendant l’effacement n’est que différée. Elle sera  tout de même consommée ensuite (hors période de pointe) pour remonter la température du chauffe-eau et du logement, bien que Voltalis déclare1 : « notre boîtier fait baisser la consommation et c’est pour ça que nous existons ». Des affirmations que le député François Brottes est prêt à diffuser2: « l’effacement diffus génère de vraies économies d’énergies ». Pourtant, l’Autorité de la concurrence{3. ibid.] a conclu en décembre 2013 qu’il n’était pas pertinent  de subventionner les effacements : « Il apparaît que le lien entre effacement de consommation et économies d’énergie n’est pas clairement démontré. »

Les lois de la physique sont impitoyables… sinon il suffirait d’éteindre régulièrement ses radiateurs pour faire des économies et ça se saurait…

De plus, non seulement les ménages ne sont pas indemnisés pour avoir été « vertueux » en acceptant de différer leur consommation, mais ils vont en plus payer sur leur facture d’électricité la prime versée à « l’effaceur » et aussi… l’indemnisation due aux fournisseurs ! Ces derniers demandent de compenser le manque à gagner de l’électricité qu’ils n’ont pas vendue au tarif fort (c’est donc une perte financière) par le biais d’une nouvelle contribution instaurée par la loi en préparation sur la transition énergétique !

Cette nouvelle taxe sur les ménages est scandaleuse car elle crée un système complexe qui rémunère des petits malins qui ont flairé le filon juteux en ces temps de « transition énergétique », et sous couvert de l’intérêt général.

Pour lisser les consommations d’électricité, il serait plus judicieux, comme auparavant, d’encourager l’effacement avec des tarifs incitatifs « heures pleines » (plus chères) et « heures creuses » (moins chères). De plus, cela donnerait une valeur financière au profit des comportements « citoyens » qui répondraient à la modulation de la demande dans l’intérêt général. Ce serait le moyen le plus efficace de soutien aux effacements, et les Français vertueux en bénéficieraient directement.

Peut-être est-ce trop simple et pas assez rémunérateur pour certains, qui, une fois de plus, veulent tondre des millions de consommateurs ?

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