Hervé Falciani sur Swissleaks: « Il va y avoir un nouveau raz-de-marée »

 

Hervé Falciani, ancien informaticien de la banque HSBC à l’origine des rélévations de fraude fiscale au coeur de l’affaire Swissleaks, était jeudi matin l’invité de Jean-Jacques Bourdin sur BFMTV et RMC

 

 

Aujourd’hui, l’ancien informaticien est protégé par la France et par l’Espagne. « les principales protections, même pour ma famille, elles ne sont pas françaises. Je ne veux même pas les déclarer (…). Il y a des fonctionnaires qui cherchent à nous aider, qui avaient cherché à sécuriser les habitations où j’allais résider. Et ces gens-là se sont fait placardiser. Des gendarmes courageux, des fonctionnaires anonymes, des directeurs qui ont fait leur travail malgré les pressions. Aujourd’hui je suis au chômage ».

# Falciani « intermédiaire de la CIA » ?

Hervé Falciani est devenu informaticien en 2000, d’abord à Monaco, puis à Genève, où il a eu accès « en dehors » de la banque à des données cryptées. « Ce sont des milliards d’informations » auxquelles il a eu accès, et qui ont pu être décryptées « parce qu’il y a des pays qui sont plus courageux que la France, qui utilisent leurs services de renseignement pour l’intérêt général. Je parle de la CIA bien sûr ». « On a des liens qui établissent la présence de la CIA. C’est ma conviction intime que ça s’est fait grâce à eux ».

L’informaticien explique avoir eu accès à ces données « par un cloud. Vous, vous allez récupérer des films, moi j’allais récupérer ces informations sur l’Internet. On me les avait mises à disposition ». Hervé Falciani était-il un agent de la CIA? « Pas un agent, mais un intermédiaire ». L’ancien employé d’HSBC nie absolument avoir tenté de vendre ces informations au Liban.

# Pire que le blanchiment, le « noirciment » de l’argent

Hervé Falciani est convaincu que le système mis en place par HSBC constitue des faits bien plus graves que la fraude fiscale. « On parle du blanchiment, et le pire c’est le noirciment. Quand vous noircissez, vous exercez votre contrôle de l’argent. Vous pouvez corrompre. Si vous ne contrôlez pas la banque, c’est la banque qui vous contrôle. C’est le pouvoir de l’argent qui corrompt les gouvernants, ceux qui font nos lois ».

Hervé Falciani appelle Michel Sapin, le ministre des Finances, à recevoir « les (élus) courageux ». « Il a été déclaré que la banque avait changé, c’est absolument faux. Je demande à monsieur Sapin s’il peut m’assurer que demain, les noms qui sont derrière les trusts seront connus, (autrement dit ceux qui sont) derrière les mécanismes qui sont faits pour cacher l’argent des plus riches ».

# Des banques françaises impliquées, accuse Falciani

L’informaticien affirme que le système de fraude est toujours en place, s’adaptant de mieux en mieux aux contrôles, et que d’autres banques relaient ce système HSBC. « C’est le principe de labanque offshore« , ajoute-t-il, affirmant encore que des banques françaises sont impliquées.

« Si on tire les fils vers toutes les sociétés concernées, ça va être un nouveau raz-de-marée ». Hervé Falciani promet d’autres révélations de grande ampleur.

Une fois les données de la filiale suisse d’HSBC récupérées, « les premiers avec qui j’essaie d’agir, c’est la brigade de haute délinquance financière (à Nanterre, Ndlr). J’appelle un commissaire. Pendant près de neuf mois, on va me passer de main en main pour finir à la direction nationale des enquêtes fiscales ». Hervé Falciani coopère ensuite avec le fisc français, et affirme n’avoir jamais été rémunéré pour cela.

# « Des politiques français ont essayé de détruire des preuves

La presse suisse affirme qu’à travers ces révélations, l’ex-informaticien aurait voulu se venger de son employeur, qui lui aurait refusé une augmentation. « Je vous assure que j’ai toujours crû en termes de salaire. J’ai été promu deux mois avant de quitter HSBC ».

Hervé Falciani se sent-il menacé? « Je vous dis qu’il y a des obstructions. Il y a des colonels de gendarmerie qui ont été placardisés, parce qu’ils ont aidé à ce que des enquêtes soit créées ici (en France, Ndlr) ». L’ex-informaticien affirme que des responsables politiques français ont tenté de détruire des preuves de la responsabilité de la banque HSBC dans un système de fraude fiscale. Hervé Falciani accuse ainsi Michèle Alliot-Marie lorsqu’elle était ministre de la Justice. « Quand on essaye de détruire des preuves et qu’on est justement un garde des Sceaux, c’est dramatique. En envoyant les originaux (des documents, Ndlr) en Suisse, c’est exactement ce que ça veut dire ». En 2008, Eric de Montgolfier a obtenu un listing d’informations sur des milliers de comptes cachés par HSBC. Embarrassée par la liste des noms qu’elle contenait, Michèle Alliot-Marie lui aurait alors demandé de remettre ces fichiers à la Suisse, ce qu’Eric de Montgolfier a refusé. Finalement, une enquête est ouverte à Paris, en 2013.

« La Suisse est le pays avec lequel la France a le mieux collaboré en termes judiciaires », juge Hervé Falciani. « Je vous parlais du fait de noircir l’argent, c’est là le risque pour nos démocraties. Vous ne savez plus qui est payé par qui ».

Aujourd’hui, Hervé Falciani se dit « en résistance ». « On s’expose, nous (les lanceurs d’alertes, Ndlr). Et on n’a pas les moyens de payer nos avocats, on est avec des avocats de résistance, qui sont là et qui mouillent leur chemise pour l’intérêt général ».

source:Écrit par Alexandre Le Mer pour BFM/TV

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