Chypre va entériner un accord de coopération militaire avec la Russie

Un petit retour en arrière pour commencer Voici ce que disait  un article d’Alexandre Latsa, relayé par mondialisation.ca en mars 2013, cela ne manque pas d’intérêt pour lire ce qui vient après. Mais tout d’abord, une visualisation de la situation géo-politique de l’ile de Chypre :

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Chypre est divisée en deux, de facto, depuis 1974: les Chypriotes turcs au nord et les Chypriotes grecs au sud. Le pays a adhéré à l’Union européenne en 2004 mais le Nord est supervisé par la Turquie. La Grèce et la Turquie sont garants des pourparlers sur la réunification et le dialogue se déroule habituellement sous l’égide de l’Onu mais il a été interrompu il y a deux ans à l’initiative des Chypriotes turcs, qui protestaient contre la présidence de Chypre au Conseil de l’Europe.

http://fr.sputniknews.com/french.ruvr.ru/news/2015_01_24/Chypre-le-reglement-possible-sur-la-base-des-resolutions-de-lOnu-Moscou-3110/

Ce qui est intéressant, c’est qu’à la suite de l’indépendance chypriote, un accord fut signé qui permet aux Britanniques d’y conserver des bases militaires. Ces bases militaires servent dans la guerre contre la Syrie (1) mais aussi de centre d’espionnage pour les américains (2)

Sur le rapprochement Russo-Chypriote :

Mars 2013

Après la faillite de la Grèce, la Russie s’était engagée il y a près d’un an sur la voie du rachat du consortium gazier grec DEPA/DESFA par Gazprom. Ces négociations intervenaient quelques mois après la chute du régime libyen (et la perte financière importante liée pour Moscou) mais elles se sont visiblement arrêtées lorsqu’il y a un mois le département d’État américain a tout simplement mis en garde Athènes contre une coopération énergétique avec Moscou et déconseillé une cession de DEPA à Gazprom qui “permettrait à Moscou de renforcer sa domination sur le marché énergétique de la région”. Empêcher une plus grande intégration économique Russie-UE est-il vraiment dans l’intérêt de l’Europe aujourd’hui alors que le président chinois vient de faire sa première visite internationale à Moscou avec à la clef une très forte intensification de la coopération politique, militaire mais aussi et surtout énergétique entre les deux pays ?

En sanctionnant ainsi directement les actifs russes dans les banques de Chypre, c’est la Russie qui est directement visée et touchée. Bien sur les Russes ont logiquement des visées et elles sont bien plus importantes que la simple exploitation du gaz offshore dont le consortium russe Novatek a été exclu de façon assez inexpliquée. D’après l’expert en relations internationales Nouriel Roubini, la Russie vise simplement l’installation d’une base navale sur l’île (ce que les lecteurs de RIA-Novosti savent depuis septembre dernier) et que les Russes pourraient tenter de monnayer en échange d’une aide financière à Nicosie.

A ce titre, les négociations russo-chypriotes n’ont pas échoué contrairement à ce que beaucoup d’analystes ont sans doute hâtivement conclu. Mais Chypre ne se trouve sans doute pas suffisamment dans la sphère d’influence russe au vu de la dimension de tels enjeux. Il faudrait pour cela qu’elle quitte l’UE et rejoigne la Communauté économique eurasiatique, comme l’a clairement indiqué Sergueï Glaziev, le conseiller du président Poutine.

Il faut rappeler que Sergueï Glaziev avait au début de cette année dénoncé la “guerre financière totale que mènent les pays occidentaux contre la Russie aujourd’hui”. Une guerre financière qui semble confirmée par les dernières menaces de la BCE envers la Lettonie pour que celle-ci n’accueille pas d’éventuels capitaux russes qui pourraient vouloir sortir de Chypre.

Sur le plan extérieur, Chypre reste un maillon crucial pour la Russie dans le cadre de son retour au Moyen-Orient et en Méditerranée, mais aussi dans le cadre de ses relations avec l’Occident. Sur le plan intérieur, le pouvoir russe peut enfin montrer qu’il est décidé à maintenir ses objectifs de lutte contre l’offshorisation de l’économie russe, dont Vladimir Poutine avait fait un point essentiel, dans son discours de fin d’année 2012. C’est dans cette optique que le groupe public russe Rosneft vient d’indiquer qu’il allait rapatrier de plusieurs zones du monde réputées offshore les actifs hérités lors de l’acquisition de son concurrent anglais: TNK-BP, notamment de Chypre et des Caraïbes.

Au cœur du monde orthodoxe, la fin du rêve européen?

Mais pendant qu’Occident et Russie s’affrontent par territoires interposés au cœur de la Méditerranée (Grèce, Syrie, Chypre…) le peuple chypriote et les dizaines de milliers de travailleurs anglais et est-européens immigrés à Chypre vont payer la facture et sans doute traverser des années difficiles, Jean Luc Mélenchon a par exemple déjà promisl’enfer aux Chypriotes.

Alors que la Bulgarie a récemment  interrompu ses négociations d’intégration à l’euro, la Grèce continue à s’enfoncer dans l’austérité. A Chypre aujourd’hui, selon les derniers sondages, 67% des habitants souhaitent désormais que leur pays quitte la zone euro, l’UE, et se rapproche de la Russie, une position soutenue activement par l’église orthodoxe chypriote.

Au cœur de la Méditerranée et du monde orthodoxe, le rêve européen semble toucher à sa fin.

Alexandre Latsa

http://www.mondialisation.ca/crise-a-%D1%81hypre-et-si-le-reve-europeen-touchait-a-sa-fin/5328724

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8/02/2015

Chypre proposera à Moscou de déployer une base militaire sur le territoire de l’île, a annoncé dimanche le président chypriote Nikos Anastasiadis.

Selon le dirigeant de l’Etat insulaire, un accord de coopération militaire entre Chypre et la Russie sera signé lors de sa visite à Moscou programmée pour le 25 février.

« Il y a un ancien accord, qui doit être renouvelé. Dans le même temps, des sites supplémentaires seront mis à disposition, comme c’est le cas avec d’autres pays, dont la France et l’Allemagne », a expliqué M.Anastasiadis cité par l’agence Chine nouvelle.

La future base militaire russe destinée à accueillir des avions se situerait à une quarantaine de kilomètres de la base aérienne britannique d’Akrotiri (sud).

 

Donc, si l’on résume : il y aura dans cette île coupée en deux, des Anglais, des espions américains, des Allemands et des Français et des Russes…  C’est vraiment complexe la géo-politique !

(1)   http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2013/08/27/97001-20130827FILWWW00209-une-base-chypriote-pour-frapper-la-syrie.php