DOSSIER : GUERRE ET « ÉQUITÉ » CELA A-T-IL UN SENS ?
ÉQUITÉ ET « RÉPARATIONS » DE GUERRE
Comme vous le comprendrez, c’est ici également la scandaleuse loi du « deux poids deux mesures » C’est un sujet délicat, car il met en jeu ce qui est devenu un véritable tabou. Cependant, il y a des faits historiques et des dossiers en cours qu’il faut connaître car ils éclairent notre présent.
La décision au mois de décembre de François Hollande de verser des indemnités aux victimes américaines de la shoah, sous le prétexte que c’est dans les wagons de la SNCF qu’ils ont été déportés créée un malaise. En réalité, comme vous le lirez, il s’agit ni plus ni moins d’un chantage économique initié probablement par un lobbying pro-israélien, comme vous le savez, très puissant et très actif aux États-Unis.
Il semble en effet équitable que suite à un conflit qui tue, torture, déplace une population en masse et détruit ses structures, un pays agresseur ou les pays agresseurs, une fois la paix et la prospérité revenues, à la fois indemnisent les victimes civiles et réparent les dégâts matériels de l’agression.
Il y a plusieurs bénéfices à cela : le plus évident est que la reconnaissance d’un tort, l’acceptation d’une réparation par la reconstruction d’un pays et le retour, sinon de la prospérité, du moins d’une situation économique stable sont un gage de réconciliation et de paix.
Le second bénéfice dont on ne parle pas ou peu, est que les champs de ruines sont des lieux de reconstructions qui n’échappent pas aux entreprises locales, certes, mais surtout aux multinationales… Bâtiments, modules de production, ce sont des marchés de milliards de dollars qui s’ouvrent ainsi à l’appétit des entreprises (occidentales pour la plupart) sous un masque humanitariste.
Le troisième bénéfice qui devrait être le but essentiel est la réparation des blessures faites aux victimes par devoir d’humanité.
Et c’est là que le bat blesse. Apparemment les souffrances des uns ou des autres n’ont pas la même valeur selon leur situations géographiques et leur pouvoir de lobbying, et c’est assez écœurant.
Pire, il semble bien que les réparations en question n’arrivent pas jusqu’aux victimes. Selon un article paru en 2012,
Près de 200.000 survivants de la Shoah vivent en Israël. Mais près d’un quart d’entre eux vivent sous le seuil de pauvreté et presque la moitié souffre de solitude. Un système opaque de redistribution des aides serait la cause de cette pauvreté endémique.(1)
L’on ne peut qu’en déduire qu’au sein même de la communauté des victimes l’équité est une notion très relative.
Pour traiter ce sujet, il faudrait un livre entier. Entre les génocides des peuples premiers, la déportation des esclaves africains, l’ensemble des victimes déportées ou tuées par les nazis, Hiroshima et Nagazaki, le Kosovo, l’Irak, la Lybie, les victimes du 11/9 et les innombrables conflits qui ont émaillé et émaillent l’histoire contemporaine la liste des prédations et le nombre incalculable de leurs victimes est malheureusement très longue.
De nombreuses instances internationales ont été créées pour tenter de faire face à cet épineux problème de l’indemnisation des victimes et des réparations de guerre. (Vous trouverez la liste dans l’avant-dernier article ci-dessous). Nous ferons une comparaison entre Israël et la Palestine qui est un cas d’école. La différence de traitement est tellement patente qu’elle laisse un goût amer.
Israël sur les bases du drame subi par une partie de sa population, grâce à l’aide financière internationale a conçu un système de défense compréhensible évidemment, mais qui touche à présent à l’obsession paranoïaque. (Nous ne développerons pas ici, les jeux d’alliances croisées qui se font en coulisse, sur la demande d’un empire expansionniste, avec ceux qui sont officiellement ses ennemis mortels.)
Système de défense, pas que. On pourrait au regard de ses actions militaires lui appliquer cette maxime : « La meilleure des défenses, c’est l’attaque » surtout utilisée lorsque l’on est pas clair vis à vis de ses propres agissements. Son armée est hyper-équipée et entraînée, elle est dotée d’armes nucléaires et probablement de la bombe. Son service de police externe, le Mossad, est le plus craint au monde. Ce petit pays, qui ne prospérerait sans doute pas aussi bien sans les aides extérieures qui affluent notamment des États Unis et de l’Allemagne depuis sa création, s’est petit à petit emmuré dans une forteresse bâtie sur le rejet et l’agressivité pour tout ce qui ne lui ressemble pas. Si on est pas avec lui, on est contre lui, et ce n’est pas discutable . Grâce à cela, il s’autorise un respect très particulier et très modulé des lois internationales.
L’équité ne saurait s’appliquer qu’à lui-même. Tous les pays occidentaux écrasés par une culpabilité soigneusement entretenue lui ont ouvert leurs tribunes et leur bourses, et ceux qui ne disent rien sont présumés consentant. Ce qui est curieux, c’est que la religion juive à une fête particulière, Yom Kippour, qui célèbre et incite au pardon.. Pas de doute, Israël est bien un état laïque où l’on ne confond pas politique et religion.
Par comparaison, où en sont les réparations pour les victimes palestiniennes de l’occupation de leurs terre, et des guerres menées depuis 1948 ?
Un rappel :
[Conflits Israélo-arabes et israélo-palestiniens
Guerre de Palestine de 1948 ·
Guerre de Suez ·
Guerre des Six Jours ·
Guerre d’usure ·
Guerre du Kippour ·
Guerre du Liban ·
Première Intifada ·
Seconde Intifada ·
Opération Jours de pénitence ·
Opération Arc-en-ciel ·
Conflit israélo-libanais de 2006 ·
Opération Pluies d’été ·
Guerre de Gaza de 2008-2009 ·
Confrontation de 2011 ·
Confrontation de 2012 ·
Opération Pilier de défense ·
Guerre de Gaza de 2014]
Les statistiques de l’occupation Palestinienne
Depuis 1948 et ses 800.000 déplacés, le poids d’un conflit jamais résolu et ses morts, n’ont fait qu’accentuer la pression sur une société civile humiliée par un occupant arrogant, qui voit se rétrécir son espace, et qui supporte de façon endémique la pauvreté, le mépris, l’indifférence, voire la stigmatisation internationale dès que, sur ce terreau misérable, s’organise une lutte résistante. On est très loin, comme vous le lirez ci-dessous de la notion d’équité et de réparation.
Le terrorisme est une horreur, c’est sans appel. Mais lorsque l’on créée et entretien un terreau semé d’injustices de rancoeurs et de désir de vengeance depuis près de 70 ans, il ne faut pas trop s’étonner qu’elle s’exprime.
Je le dis sans honte. Si j’étais née en Palestine, j’ignore vraiment si je n’aurais pas grandi la haine au ventre dans un tel contexte. Mais si j’étais née en Israël, j’ignore aussi si sous la pression d’une campagne incessante de peur qui sévit dans cette société, j’aurais été parmi les résistants à cette honte. J’espère que oui.
Je laisse tout cela à votre réflexion.
Galadriel
VOICI QUELQUES ARTICLES AFIN DE VOUS AIDER A RÉFLÉCHIR SUR LA
VALEUR DES NOTIONS D’ÉQUITÉ ET DE RÉPARATION.
La France va verser 60 millions de dollars aux victimes américaines de la Shoah
Décembre 2014
L’État français va verser 60 millions de dollars aux victimes américaines transportées par les trains de la SNCF vers les camps de la mort durant la Seconde Guerre mondiale, selon les termes d’un accord passé avec Washington. Les négociations, entamées en février dernier ont abouti à cet accord qui sera signé lundi.
«Ça concerne des centaines de survivants, des conjoints, enfants et héritiers» a déclaré Patrizianna Sparacino ambassadrice pour les droits de l’Homme, chargée de la dimension internationale de la Shoah. «Pour l’instant, l’objectif, c’est que les déportés survivants touchent environ 100.000 dollars». Le fonds sera alimenté par Paris tandis que Washington assurera la répartition.
…/…Derrière la réparation symbolique se cache pourtant un enjeu financier de taille pour la SNCF. En échange de ces millions consentis, ce sont des milliards de dollars de contrats que pourrait toucher l’entreprise ferroviaire sur le sol américain. Depuis de nombreuses années, des élus américains s’opposent en effet à ce que la SNCF gagne des appels d’offres sur leur territoire, tant que celle-ci n’a pas indemnisé les victimes et descendants de victimes de l’Holocauste.
En 2011, la SNCF avait reconnu avoir été un «rouage de la machine nazie d’extermination». Son directeur, Guillaume Pépy avait exprimé sa «profonde peine». 70 ans après les faits. Mais le mea culpa de l’entreprise n’avait pas suffi: «Ce n’est pas une demande de pardon, ce ne sont pas des excuses complètes», avait ainsi affirmé Rositta Kenigsberg, vice-présidente de l’Holocaust Documentation and Education Center, près de Miami, alors que la SNCF entendait répondre à un appel d’offre dans l’État de Floride.
http://www.lefigaro.fr/societes/2014/12/05/20005-20141205ARTFIG00353-la-france-va-verser-60-millions-d-euros-aux-victimes-americaines-de-la-shoah.php
La Shoah : Pompe à finance et religion planétaire
On connaît tous le terme «génocide» inventé par Raphaël Lemkin un ancien juif déporté, à propos des massacres de masse à l’endroit des juifs.
Au cours de ces vingt dernières années, le mot génocide est devenu une marque déposée qui ne peut être utilisée que pour désigner la tragédie des Juifs sous le troisième Reich Pendant près de trente ans, l’instrumentalisation de la douleur des déportés était limitée et les compensations faites par l’Allemagne et d’autres pays n’avaient pas atteint les proportions actuelles d’autant que les survivants des camps de la mort n’en profitent pas directement ce qui a fait écrire à Norman Finkielstein: «L’industrie de l’holocauste».
Dans cette contribution nous voulons insister justement sur cette pompe à finances qu’est devenue la douleur des juifs déportés et rescapés; mais aussi sur la fausse singularité de la Shoah qui est devenue un horizon indépassable, une religion planétaire plus crainte- dans les pays occidentaux- que réellement respectée voire suivie.
La pompe à finances de l’exploitation de l’holocauste
Est-ce que les Allemands sont «toujours et à jamais redevables» pour les crimes commis pendant la Seconde Guerre mondiale?
En fait, depuis l’Accord du Luxembourg de 1952, l’Allemagne a été le créancier attitré de cet état-voyou d’Israël, puis son soutien diplomatique n°2 après les USA. Au début des années 1950, des négociations sur les réparations d’après-guerre ont lieu entre le Premier ministre d’Israël, David Ben Gourion, le secrétaire général du Congrès juif mondial, Nahum Goldmann, et le chancelier de l’Allemagne de l’Ouest, Konrad Adenauer. En raison de la sensibilité du dossier, cette décision a été intensément débattue à la Knesset israélienne. En 1952, des accords de réparations sont signés. Dans l’ensemble, à partir de 2007, l’Allemagne avait versé 25 milliards d’euros en réparation à Israël et aux survivants de l’holocauste nazi.(1)
Dans le même ordre on apprend que les méthodes pour faire payer les Allemands sont multiples et l’imagination des demandeurs est débordante.
Sur le site de langue anglaise du «Spiegel Online International», un article de David Gordon Smith à Berlin signale que, d’après Ingeburg Grüning, porte-parole du ministère des Finances allemand le gouvernement allemand, qui a déjà versé un total d’environ 64 milliards d’euros aux survivants de l’Holocauste, n’a pas l’intention de payer ces frais de traitements psychologiques.
L’auteur de l’article, réaliste, ajoute que l’Allemagne pourra bien finir par être obligée de payer encore des millions pour ces traitements psychologiques. Les sommes en question ne seraient pas énormes, prétend Baruch Mazor, directeur général du Fonds Fischer: juste 10 à 20 millions de dollars par an…La technique est rodée. En cas de refus, la menace est là: «Si les négociations que nous menons en ce moment ne portent pas leurs fruits, alors il faudra s’attendre à des revendications soutenues à 100% par le public.» (2)
Les autres pays concernés par les indemnisations
A des degrés divers , tous les pays ont du à un moment ou un autre indemniser, les victimes de l’holocauste. Nous verrons plus loin avec Norman Finkielstein, que ce ne sont pas ,nécessairement les ayant droit qui en profitent.
On apprend que Paris et Washington ont entamé des négociations sur d’éventuelles indemnisations des familles des victimes américaines de l’holocauste transportées par la Sncf entre 1942 et 1944, dossier sensible qui menace de priver le groupe ferroviaire français de contrats aux Etats-Unis. (… En 2011, le groupe avait reconnu avoir été un «rouage de la machine nazie d’extermination»). Dans le Maryland, deux élus ont présenté une proposition de loi restreignant l’accès de la Sncf aux marchés publics tant qu’elle n¹aura pas versé d¹indemnités pour son rôle dans la déportation des juifs. Après plusieurs rencontres informelles en 2013, des diplomates des deux pays ont entamé ces négociations, le 6 février 2014, à Paris, ont indiqué, le 21 février 2014, à l’AFP l’avocat des familles des victimes, Stuart Eizenstat et l’ambassade de France à Washington confirmant le Washington Post.
Par ailleurs, selon des révélations du Spiegel, Berlin a effectivement livré à l’État hébreu des sous-marins pouvant être dotés d’une capacité nucléaire. Au sein de l’opposition, les sociaux-démocrates et les écologistes multiplient les critiques contre le gouvernement d’Angela Merkel. Israël, qui n’a pas signé le traité de non-prolifération nucléaire (TNP), n’a jamais confirmé ni démenti ses capacités nucléaires. L’État hébreu est cependant largement considéré comme étant la seule puissance nucléaire de la région. Israël maintient une politique d’ambiguïté sur son programme atomique et refuse de signer le traité de non-prolifération nucléaire et de soumettre sa centrale de Dimona à un contrôle international.» (3)
Le Spiegel a révélé qu’Israël est en train d’équiper les sous-marins fournis par l’Allemagne de missiles de croisière à têtes nucléaires. Les sous-marins allemands deviennent ainsi une pièce maîtresse dans la dissuasion face au régime iranien, Berlin a constamment nié que ces sous-marins puissent faire partie de l’arsenal nucléaire israélien. L’Allemagne a livré trois de ces sous-marins et trois autres seront livrés d’ici à 2017. Selon des experts militaires étrangers, Israël dispose d’un arsenal nucléaire de plus de 200 ogives.» (3).
Gaza: l’ONU suspend son aide aux réparations de maisons
L’Agence pour l’aide aux réfugiés de Palestine, en manque de fonds, dénonce les promesses internationales non tenues.
L’ONU a annoncé mardi suspendre son aide financière à des dizaines de milliers de Palestiniens pour réparer leur maison ou payer leur loyer à Gaza, dévastée par la guerre avec Israël. «5,4 milliards de dollars avaient été promis en octobre à la conférence du Caire» pour la reconstruction du territoire après la guerre de juillet-août 2014, et rien «n’est pour ainsi dire arrivé à Gaza. C’est douloureux et inacceptable», a dit dans un communiqué Robert Turner, directeur à Gaza de l’Agence pour l’aide aux réfugiés de Palestine (UNRWA).
L’agence lance un appel «urgent» à la levée de 100 millions de dollars pour ce seul premier trimestre. Elle met en garde contre le risque de déstabilisation de la petite enclave durement frappée par la pauvreté et le chômage et contrôlée par le mouvement islamiste Hamas. Ce dernier a dénoncé dans un communiqué une décision «inquiétante» qui vient «aggraver la tragédie que vivent des milliers de familles» à Gaza. Il a appelé l’UNRWA à «faire pression sur les donateurs pour qu’ils honorent leurs promesses pour la reconstruction».
SUITE DE L’ARTICLE : http://www.liberation.fr/monde/2015/01/27/gaza-l-onu-a-court-d-argent-suspend-son-aide-aux-reparations-de-maisons_1189642
EXTRAIT D’UN TRÈS INTÉRESSANT ARTICLE, NON POLÉMIQUE, SUR LE SUJET QUE JE VOUS RECOMMANDE DE LIRE :
UN PRINCIPE UNIVERSEL, CELUI DE L’ÉQUITÉ DU TRAITEMENT DES VICTIMES DE GUERRE
La réparation du dommage de guerre est particulièrement ancrée ans une notion d’équité, tant la recherche du juste s’avère naturelle en ce domaine. En effet, toute justice visant à réparer des torts ou des violences suite à un conflit se doit de préserver le principe d’égalité entre les victimes.
Lorsque nous nous trouvons en présence de réclamations en masse, nous parlerons aussi d’équité horizontale et d’équité verticale, la première cherchant à s’assurer que des victimes semblables sont traitées de manière comparable, la deuxième cherchant à éviter toute différence de traitement du fait même de la différence de situation. En d’autres mots, l’équité des victimes dans une procédure d’indemnisation de masse est intimement liée à l’égalité de traitement au sein des titulaires d’un même régime d’actions et l’égalité entre traitement des victimes d’un même préjudice.
Aujourd’hui, la notion d’équité est devenue importante tout simplement parce que « dédommagement », « réparation », « restitution », et « indemnisation » sont des terminologies plus courantes. De façon plus systématique, les victimes des conflits demandent à être indemnisées pour des torts subis jadis. Ainsi, il n’est pas rare de voir les anciens belligérants être impliqués aux travaux d’instances internationales, afin de dresser la liste des demandes de restitution et d’indemnisation des spoliations et dommages qui ont eu lieu lors du conflit. Le passé récent nous a montré que plusieurs interventions militaires dites « justes », afin de mettre fin au bain de sang dans les Balkans ou récupérer le territoire conquis par Saddam Hussein en 1990, ont fait place à des opérations d’indemnisation de grande envergure. Très récemment la presse a aussi abondamment parlé du dédommagement des victimes des attentats du 11 septembre. Dans ce cas précis, environ 7.300 dossiers ont été traités sur 33 mois de procédure, pour un dédommagement à hauteur de 7 milliards de dollars.
Aujourd’hui, réparation et restitution traduisent la nécessité pour un agresseur, dont le comportement est jugé injuste par le camp des vainqueurs, de dédommager à la fois collectivement et individuellement ses anciennes victimes.
Définissons un peu plus les concepts. La réparation est une procédure mise en place suite à une guerre ou une oppression afin que l’institution politique reconnue responsable ou coupable puisse indemniser financièrement la partie lésée à hauteur de son dommage.
Par exemple, un réfugié palestinien de 1948 sera indemnisé de la valeur marchande de la terre agricole tombée entre les mains des Israéliens et non restituée. Un travailleur égyptien expulsé du Koweït sera indemnisé de la perte de son salaire sur une période définie. La restitution, quant à elle, correspond à une exigence juridique, économique et morale formulée par des victimes et/ou leurs représentants après le conflit. La partie lésée demande à être restituée de son bien dans l’état dans lequel elle l’a laissé.
Pourtant, le concept d’équité ou d’égalité des victimes devant un préjudice de guerre reste relativement flou et toujours sujet à de multiples interprétations. Bien évidemment, l’impression qui prévaut aux yeux d’un observateur extérieur est qu’un cadre juridique international existe et s’applique à tout dommage de guerre. Est-ce bien le cas ?
…/…
Venons-en au problème des réfugiés palestiniens de la guerre de 1948, tout aussi important que celui du sort des Koweitiens de la guerre de 1991, et pourtant la notion de réparation y est appliquée de façon différente. La première guerre en 1948 peut être considérée comme une guerre de légitime défense des juifs attaqués par des arabes. Elle peut aussi être considérée comme une guerre « injuste » au sens ou le territoire palestinien sous mandat britannique a été délaissé par la communauté internationale au moment de la partition de 1947 avec la certitude qu’une guerre était inévitable. Laissons de coté les causes et les conséquences de la guerre et posons le problème délicat du dédommagement.
Les réfugiés palestiniens attendent toujours que leur sort soit décidé et cela malgré un cadre juridique tout aussi clair que celui établi lors de l’invasion du Koweït par l’Irak. Dans le cadre de l’après guerre en Palestine, nous pouvons citer la résolution 194 du 11 décembre 1948 de l’Assemblée générale des Nations unies [14] Voir aussi le texte officiel de la résolution 194 sur… [14] .
Cette résolution décide, à la suite du départ forcé de centaines de milliers de Palestiniens,
qu’il y a lieu de permettre aux réfugiés qui le désirent, de rentrer dans leurs foyers le plus tôt possible et de vivre en paix avec leurs voisins. Et que des indemnités doivent être payées à titre de compensation pour les biens de ceux qui décident de ne pas rentrer dans leurs foyers et pour tout bien perdu ou endommagé lorsque, en vertu des principes du droit international ou en équité, cette perte ou ce dommage doit être réparé par les gouvernements ou autorités responsables ».
Une instance onusienne, la Commission des Nations unies pour la Conciliation en Palestine (ou un UNCCP), dont la vocation est de trouver un accord quant à la restitution ou la réparation, voit le jour après la guerre de 1948 mais se solde par un échec pour trouver un accord sur la réintégration des réfugiés.
Par contre, la Commission a été chargée de réunir les informations précieuses sur les biens meubles et immeubles des réfugiés palestiniens, ce travail servant aujourd’hui de base pour établir le dossier de demande de dédommagement dû par Israël aux réfugiés palestiniens [15] Nous pouvons citer deux ouvrages importants concernant… [15] .
Ainsi, malgré un cadre juridique clair et des travaux d’évaluation des pertes subies, les réfugiés de 1948 attendent depuis (+ de) 60 ans qu’une solution soit trouvée. Le dossier des réfugiés est au centre du conflit des négociations sur le statut final. Il y a certes d’autres dossiers importants, tels le mur, Jérusalem, les ressources, les frontières, les colonies mais le dossier des réfugiés occupe une place symbolique.
Ce dossier concerne environ 730 000 réfugiés de 1948 ou plus de 6 millions de personnes aujourd’hui, descendants des réfugiés et vivant toujours dans des camps.
Le montant estimé de réparation pour ces réfugiés est énorme : environ 3 milliards de dollars en valeur de 1948, soit en valeur actualisée environ 200 milliards de dollars, pour des dommages très variés : perte de travail, perte de biens personnels et collectifs, destruction des mosquées et des infrastructures publiques, pertes de standards de vie, pertes d’exploitation des entreprises, perte d’avoirs financiers, etc.
Qu’en est-il dès lors que l’on passe ces différents régimes au crible de l’équité ? Quand, à l’origine, il pouvait paraître inéquitable qu’une victime ait à porter la charge d’un risque qu’elle n’avait pas créé, l’iniquité, aujourd’hui, est manifeste pour le réfugié palestinien.
On ne comprend pas pourquoi les victimes d’un fait de guerre puissent être traitées de manière si disparate ou soient indemnisées de manière si différente selon les cas ou les tribunaux [16] Nous renvoyons le lecteur aux cycles organisés par… [16] . Au travers des deux exemples ci-dessus, nous pouvons conclure que nous nous trouvons dans un cadre juridique international à deux vitesses.
D’un côté, nous nous trouvons en présence d’opérations de réparation à grande échelle, déployées en peu de temps et capables de distribuer des indemnisations importantes. De l’autre, nous voyons des instances internationales incapables de proposer et d’imposer des mesures de réparation et d’indemnisation, et cela malgré un cadre juridique international bien défini.
Justice réparatrice : la volonté du plus fort ?
Réparer et restituer ne sont donc plus des actes neutres, ils dépendent souvent du bras de fer entre vainqueur et vaincu, plus particulièrement du rapport entre la perte des vainqueurs et les gains du vaincu. À ceux qui trouvent cette perspective d’une naïveté certes sympathique mais peu réaliste, on ne peut que recommander de se référer aux exemples mentionnés ci-dessus concernant les guerres du Golfe en 1991 et de Palestine en 1948.
Nous pourrions aussi rappeler que les victimes de la guerre au Vietnam ou celles du génocide au Rwanda n’ont pas connu cette chance d’être dédommagées des violations et préjudices subis au cours de conflits souvent violents. À l’inverse, les victimes des attentats du 11 septembre ont déjà été indemnisées à hauteur de 7 milliards de dollars [17] Voir le rapport final préparé par Kenneth Feinbergsur… [17] . Concernant la guerre du Kosovo en 1998 1999, la Commission des réclamations immobilières du Kosovo est aussi en train de mettre en place les procédures d’indemnisation et de restitution des biens. À l’évidence, la notion de préjudice et de responsabilité peut être interprétée de façon différente. Il n’existe pas aujourd’hui de normes universellement reconnues.
Il faut noter que le succès de bon nombre de commissions d’indemnisation et de restitution voit le jour grâce à l’agressivité juridique de certains pays. Un bon nombre de ces demandes sont adressées depuis la société américaine en raison du principe de juridiction universelle. L’individualisme des sociétés occidentales crée des conditions particulièrement favorables à l’écoute des doléances, à leur dissémination et à la récrimination au nom des corps souffrants. Prenons l’exemple récent arménien. Suite au génocide, les assurances n’ont pas honoré les dossiers d’assurance-vie souscrit dans la Turquie Ottomane. Malgré le passage du temps et les rachats successifs d’une compagnie d’assurance par une autre, des avocats américains ont retrouvé la trace de ces contrats. C’est pourquoi les avocats des ayants droits ont pu négocier un accord pour obtenir dédommagement, d’abord auprès de la compagnie d’assurance américaine New York Life, puis du groupe français AXA. Aujourd’hui, l’assureur recueille les demandes de réclamations. Voilà de quelle façon peut naître une commission d’indemnisation.
L’ARTICLE INTÉGRAL ET SES LIENS :
http://www.cairn.info/zen.php?ID_ARTICLE=TOP_102_0023
LÀ ENCORE, ÉQUITÉ ?
Hollande refuse la réparation financière de l’esclavage
http://www.saphirnews.com/Hollande-refuse-la-reparation-financiere-de-l-esclavage_a16764.html
(1) http://www.slate.fr/story/53609/pauvrete-rescapes-shoah-israel