Fraude alimentaire. L’huile d’olive mieux que la cocaïne
L’huile d’olive ne serait pas aussi pure que l’image qu’on en a. Le marché qu’elle représente est si juteux qu’il attire aigrefins et mafias. Une enquête italienne est très inquiétante : 4 bouteilles d’huile d’olive extra-vierge « italienne » sur 5 sont en réalité coupées avec de l’huile étrangère (1)? C’est notre carton rouge de la semaine.
Huile d’olives – Gare à la la fraude !
La fraude porterait donc sur des quantités énormes car le marché pèse 5 milliards d’euros par an. La question est : faut-il vérifier l’huile d’olive que nous achetons dans nos magasins ? De quoi s’agit-il ?
De l’huile bas de gamme en provenance du Maroc, de Grèce, d’Espagne, du Maroc et de Tunisie se trouvait mélangée à de l’huile « de qualité » italienne. L’huile d’olive italienne étant plus chère, le bénéfice des fraudeurs est très important. En Italie les douanes et la police fiscale ont ouvert une enquête européenne.
- L’huile d’olive est « vierge extra » lorsqu’elle est issue d’une 1ère pression à froid par procédés physiques sans traitement chimique. Elle offre une couleur et un arôme parfaits. Elle ne contient pas d’huile raffinée ou d’huiles issues d’autres graines ou noix oléagineuses.
L’Italie réussit grâce aux filières de fraude « bien huilée » à faire un tour de passe-passe monumental : elle exporte plus d’huile d’olive qu’elle n’en produit ! Bien entendu, l’agri-mafia qui magouille dans l’huile d’olive joue sur la non-traçabilité des olives et des huiles pour embrouiller le consommateur.(1)
L’agri-mafia de l’huile d’olive contrôle le marché
« Il y a un groupe puissant dans l’agroalimentaire qui s’enrichit illégalement grâce à l’importation et l’absence de traçabilité des huiles mélangées » décrypte Stefano Masini, dans La Repubblica. La Grèce, le Maroc, l’Espagne et la Tunisie sont des pays producteurs d’huile d’olive qui vendent à des importateurs qui mélangent des huiles de toute provenance pour faire une huile passe-partout, pourtant présentée dans des emballages flatteurs aux couleurs de la Méditerranée.
- Repères : L’Italie produit environ 700 000 tonnes d’huiles d’olive et en exporte 1,5 million de tonnes ! (production mondiale = 2,1 Mt.)
- Depuis le 1er juillet 2009, les producteurs d’huile d’olive vierge et extra vierge d’Europe doivent indiquer l’origine géographique du moulin et des olives.
Celle-ci est ensuite ré-exportée aux États-Unis, au Canada, au Japon ou en Europe. Le gain est énorme : selon La Repubblica, l’huile d’olive étrangère est importée pour seulement 0,2 €/kg, puis est revendue plus de 4 €/kg. Ces importateurs « contrôlent les prix, ils contrôlent le marché. Il fut un temps où ces entreprises réputées pressaient les olives. Maintenant, ils ont des silos », a-t-il poursuivi.
Vous avez trouvé une bouteille d’huile Carapelli de 750 ml à 3,50 € ? Vu les coûts de production, de transport et de commercialisation des huiles de qualité, il n’est tout simplement pas possible d’avoir une authentique huile d’olive vierge extra à ce prix.
Un problème qui ne date pas d’hier
La fraude à l’huile d’olive ne serait pas nouvelle : déjà dans la Rome antique on avait été obligé de recourir à des étiquetage anti-fraudes sur les amphores stockant l’huile d’olive. Au Moyen Age, l’huile d’olive dont on se sert pour les Saintes huiles pouvait être « coupée » avec des huiles d’une autre provenance.
« On peut désormais parler de mafia agricole dans le secteur de l’huile d’olive « (2)
Tom Mueller, un écrivain américain a publié un livre sur la fraude dans l’industrie de l’huile d’olive italienne à partir d’une enquête publiée sur le sujet dès 2007 pour le New Yorker. Un grand marchand d’huile d’olive italien, Domenico Ribatti, a été condamné à 13 mois de prison au cours des années 1990 pour avoir faire passer de l’huile de noisette turque, raffinée dans sa propre usine, pour de l’huile d’olive italienne. Un autre grand importateur, Leonardo Marseglia, a été accusé de vendre des huiles non-européennes.
La fraude à l’huile d’olive, une vraie spécialité italienne
Selon l’Union Européenne en 2007, 95% de toutes les fraudes connues sur les subventions agricoles européennes sont recensées en Italie. (2) Pas étonnant donc que l’huile d’olive, chère à produire, soit concernée. Concrètement, la fraude commence par les étiquettes : elles doivent préciser le contenu des bouteilles et les mélanges. Celles provenant d’Italie ou exportées sont souvent trompeuses voire carrément illisibles. Ainsi les mentions «extra vierge» sont souvent très bien contrefaites.
En 2009, les mouliniers de PACA avaient protesté publiquement contre les revendeurs qui usurpent le qualificatif géographique « AOC Provence » pour vendre de l’ huile provenant surtout d’Espagne. Cette huile d’olive faussement provençale était vendue à des prix bien moins élevés que les AOC régionales : « L’ huile d’olive AOC Vallée des Baux est vendue en moyenne entre 16 et 23 € le litre. En Espagne, en vrac, elle est vendue 1,80 € et revendue l’ été sur les marchés 14 € ! «