Survol par des drones des centrales nucléaires française : danger ?
C’est tout de même curieux cette histoire… Après la répétition du même scénario lundi, l’idée de petits plaisantins reste plausible, bien sûr mais lorsque l’on regarde la carte des centrales (nucléaires, ne l’oubliions pas) survolées, soit les rigolos ont du temps et de l’argent à perdre, soit il s’agit d’un groupe plutôt organisé.
Dans les médias, le sujet est soit traité version rassurante, (tout va bien dormez braves gens), soit sur un mode plus inquiétant.
Voici un échantillon :
Depuis un mois, treize centrales françaises ont été survolées par des aéronefs sans pilote à une ou plusieurs reprises, soit un total de dix-neuf survols
Le Monde :
…/… « La menace directe est faible. Le 30 octobre, le ministère de l’intérieur a assuré que ces survols ne représentaient « aucun danger pour la sécurité des installations survolées ». « La capacité d’emport des drones est insuffisante pour remettre en cause la sécurité des installations nucléaires », confirme le secrétariat général à la défense et à la sécurité nationales (SGDSN), dépendant du premier ministre et chargé de la sécurité des centrales.
Les drones, même transportant des explosifs, ne peuvent en effet pas infliger de graves dégâts à une centrale nucléaire vu leur petite taille, leur faible poids et le fait qu’ils ne peuvent pas porter de grosse charge. Or l’enceinte de béton du bâtiment réacteur – composée d’une ou deux parois, selon la puissance du réacteur, épaisse de 55 à 120 centimètres –est censée résister au crash de petits avions. »
l existe par contre une menace indirecte, à savoir la possibilité d’un repérage des équipements des centrales en vue d’un acte terroriste
L’hypothèse d’un repérage semble toutefois peu réaliste pour les experts d’EDF chargés des centrales. Les plans et les photographies présentant les installations, notamment la situation des divers bâtiments, sont accessibles assez facilement. Ils ont même accompagné la présentation des centrales, sur le site ou sur des plaquettes diffusées au public, expliquent-ils.
Les écologistes, de leur côté, craignent une attaque des installations nucléaires et donc un risque pour la sûreté des centrales. Selon un rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques datant de 1998, les 58 réacteurs français sont conçus pour résister à la chute (accidentelle ou volontaire) d’un avion de type Cessna 210 ou Learjet. Soit, pour le premier, un monomoteur à hélice de 1,5 tonne et, pour le second, un biréacteur d’affaires de plus de 5 tonnes. Mais aucun test n’a été réalisé en ce qui concerne les gros porteurs de type Airbus A320 ou A380 ou Boeing 747 – d’un poids de 400 à 500 tonnes –, dont le risque de chute accidentelle avait été jugé improbable. Les stress tests, réalisés en 2011 sur toutes les centrales européennes à la suite de l’accident de Fukushima, n’ont pas non plus porté sur ces risques.
Enfin, aucun test n’a été réalisé quant à la résistance du toit en bardage métallique et des murs des piscines qui abritent les combustibles usés. « Les installations nucléaires sont des cibles, et leur point faible réside dans les piscines, qu’il s’agisse de celles des réacteurs ou celles de La Hague, où peut être stocké un millier de tonnes de combustible radioactif, prévient Denis Baupin, vice-président EELV de l’Assemblée nationale. Un endommagement de la piscine entraînerait un écoulement de l’eau et donc la mise à l’air libre des combustibles irradiés. » L’ancien rapporteur de la commission d’enquête sur les coûts du nucléaire demande la bunkérisation des piscines et l’ajout d’appoints indépendants en eau, ainsi que la réalisation de stress tests sur les risques de chute d’avion, d’agression extérieure ou de piratage informatique. (1)
…/…
CE QU’EN PENSE BRUNO COMBY:*
Belleville-sur-Loire (18) : Trois jeunes gens ont été interpellés mercredi en possession d’un drone aux abords de la centrale nucléaire de Belleville-sur-Loire.
Deux hommes et une femme, ont été placées en garde à vue dans l’enquête sur la survol répété de centrales nucléaires françaises par des drones.
Pour mémoire, en août dernier, l’État Islamique a conquit une place forte des forces gouvernementales syriennes… grâce à un drone à 450 euros
Les combattants islamistes ont ainsi utilisé un simple drone grand public made in China, le DJI Phantom FC40, pour réaliser un repérage aérien de la base à attaquer.
Sans doute l’un des plus vendus au monde, avec ceux du français Parrot, ce simple drone de loisirs commandé par radio ou via un simple smartphone est doté de quatre hélices et d’une caméra intégrée. Piloté à distance, il peut se stabiliser à des coordonnées GPS prédéterminées, puis balayer les environs. N’importe qui peut en commander un sur Internet. Le tout pour 450 euros…
Grâce au repérage du drone, les djihadistes ont pu détecter les points faibles de la défense de la base de Tabqa, puis ont envoyé deux camions-suicides pour les détruire. La conquête de cette base stratégique située au nord de la ville de Raqqa leur aurait également permis de mettre la main sur un système de défense sol-air Manpads, capable de lancer des missiles contre des avions et des hélicoptères à 16.000 pieds d’altitude.
« Des personnes qu’on ne connaît pas préparent peut-être quelque chose de beaucoup plus grave que l’attentat du 11 septembre avec la coupure du réseau électrique. La conséquence en serait l’effondrement de toute l’économie. Le meilleur moment pour commettre ce genre d’acte serait lors de la première vague de froid, début décembre. »
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*Bruno Comby :
Il est ingénieur de l’Ecole Polytechnique et ingénieur en génie nucléaire de l’Ecole Nationale Supérieure de Techniques Avancées de Paris.
Conférencier dans le domaine de l’énergie et écrivain de renommée internationale, il est le Fondateur de l’Association des Ecologistes Pour le nucléaire (AEPN), le directeur scientifique de l’institut qui porte son nom (IBC)
Sources de l’Article :
(La carte d’illustration provient de cet article)