Fonds vautours: l’Argentine dit « merde » à ses créanciers

Voilà comment les fonds spéculatifs mettent à genou les états en crise. L’Argentine fait la une, mais ces charognards s’attaquent également à l’Europe. Après la Grèce (1) maintenant à l’Espagne (2). Bientôt la France ?

L’Argentine et les fonds spéculatifs ne sont pas parvenus à s’entendre sur le remboursement de la dette de Buenos Aires. Un défaut de paiement relatif qui porte sur 7% de la dette du pays et une logique judiciaire qui pose la question de la fétichisation de l’Etat de droit.

Le ministre de l'Economie, Axel Kicillof, face aux photographes, à New York - SIPANY/SIPA

Le ministre de l’Economie, Axel Kicillof, face aux photographes, à New York – SIPANY/SIPA

« C’est une situation inédite, insolite, injuste » s’est insurgé le ministre de l’Economie argentin, Axel Kicillof en conférence de presse, hier, à New York. Considérée en défaut de paiement, l’Argentine a pourtant remboursé, comme prévu ses créanciers. Seulement, la somme, un peu plus de 500 millions de dollars, a été bloquée aux Etats-Unis. Par un juge fédéral. Thomas Griesa.

Un peu plus tôt cet été, le magistrat avait en effet condamné l’état argentin à honorer tous ses créanciers, sans exception, y compris les 7% ayant refusé, après la faillite du pays en 2001, de restructurer leur dette, autrement dit de revoir à la baisse les marges de leurs bénéfices. Faute de quoi, aucun des 93% de créanciers restants ne pourraient, à leur tour, percevoir leur dû. Ce qui est arrivé hier, date à laquelle les pourparlers arrivaient à échéance.

Ainsi l’Argentine doit-elle payer. Les prêts que leur ont accordés ces fonds vautours qui se nourrissent allègrement de la débâcle des états mais plus encore : les intérêts. Colossaux. Elliot Management et Aurelius Capital, les deux comparses américains à l’origine des poursuites judiciaires, eux, se réjouissent déjà. Ils vont multiplier leur mise, 50 millions de dollars, prêtés en 2008, par vingt !

Une aubaine. Sauf que la présidente Cristina Kirchner, ne l’entend pas de la même oreille. Elle avait prévenu. La casa Rosada n’a aucune intention de se « laisser rançonner ». Depuis l’une de ses résidences, la Quinta de Olivos, la présidente « dédramatise »  d’ailleurs. Ce qui arrive « était attendu » confient ses visiteurs à la Nación, quotidien d’opposition.

En coulisses cependant, l’équipe gouvernementale riposte. Face aux caméras, le ministre de l’Economie, Axel Kicillof accuse. Reproche au médiateur, Daniel Pollack, désigné par le juge lui-même, de « faire le jeu » des fonds d’investissement. A Caracas, Cristina Kirchner choisit quant à elle la voie diplomatique. Tente de rallier le MERCOSUR, le marché du Sud, et les dirigeants des états membres, à sa cause. L’hôte, le président du Venezuela Nicolas Maduro, lui a déjà manifesté son soutien. De l’autre côté de l’Amérique, le juge Griesa a pour sa part refuser d’accorder plus de temps à l’Argentine.

Au-delà de la responsabilité des uns et des autres, se pose ici une question fondamentale d’équilibre entre le droit et la politique et de la légitimité de tribunaux – qui plus est étrangers- de décider de la faillite d’un état. Un rapport de forces si cher au modèle libéral.

Patricia Neves pour Marianne

(1) En Grèce voici venu le temps des fonds vautours

http://www.suisse.attac.org/spip.php?page=impression&id_article=2776

(2) Les fonds vautours qui dépècent l’Argentine se jettent sur l’Espagne

(cliquer sur le titre)

ET AUSSI :

Les « fonds vautours », ou comment piller l’Afrique en toute légalité

http://www.bandung-presse.org/2011/03/fonds-vautours-dette-pays-afrique/