Minute de vérité : Quand la Marseillaise est prise en otage
L’univers du football m’est totalement inconnu. Pourtant, je reste curieuse et je dois bien avouer que je me suis laissée appâter par la diffusion en direct du dernier match qui opposait la France à la Suisse (5-2, pour ceux qui ne seraient pas au courant). J’ai été à peine étonnée d’apprendre que TF1 avait réalisé 61% de parts de marché sur ce direct « sportif », avec plus de 16,7 millions de téléspectateurs. (Quand on y pense quand même, presque 3 français sur 10 étaient devant leur télé, sur TF1, j’ai un peu honte finalement…)
Mon objectif était double en regardant ce match :
– Objectif 1 : Entendre et écouter la Marseillaise chantée par les français, joueurs et supporters, qui ont suivi les bleus jusqu’au Brésil (là encore, je me dis « tiens, c’est pas la crise pour tout le monde »). J’en profite pour préciser que les brésiliens ont un niveau de vie bien en dessous du nôtre, et que le salaire moyen est de 700€/ mois (prix moyen d’un billet pour un match du Mondial : 600€. Le compte est vite fait. Reste 100€ pour payer le loyer, nourrir les enfants, et payer les transports en commun pour aller gagner son demi-smic.
Le prix des transports en commun a d’ailleurs augmenté dans les grandes villes brésiliennes depuis peu – comme c’est étrange…
– Objectif 2 : Voir un peu ce que ça donne un jeu qui réunit 22 bonhommes sur un terrain avec un ballon, depuis qu’on n’est plus à l’ère Zidane. Je pourrais parler de l’ère Platini pour faire plaisir aux plus anciens, mais les souvenirs sont flous…
– Objectif caché : Pour une fois qu’on peut regarder TF1 sans se manger 10 minutes de coupures pub tous les ¼ d’heure… (Même s’il paraît que la Coupe du Monde est un « gouffre financier pour TF1 », qui a investi 130 millions d’euros pour les droits, et qui ne parviendra pas à récupérer la mise avec les spots publicitaires, dont les prix se sont pourtant envolés – Source Europe 1).
Je vous plante le décor :
Donc, pour un match de l’équipe de France durant la coupe du Monde, on ne fait pas les choses à moitié :
- popcorn à foison (dommage, j’ai raté mon caramel mais on a quand même tout mangé),
- lumière tamisée (difficile à cette époque de l’année sans fermer les volets)
- et on monte le son à fond (à fond chez moi, c’est volume à 22 sur la télécommande).
Je précise que :
- nous n’avons pas commandé de pizzas,
- nous n’avons pas consommé de boisson alcoolisée
- et nous ne portions pas les maillots de l’équipe (qui de toute façon sont introuvables : rupture de stock, mais rien à voir avec notre choix de « rester nous même » devant la télé, dans notre salon. Nous ne sommes tout simplement pas fans des déguisements, et je crois savoir que les maillots de foot sont en polyester, une vraie usine à sueur !)
Je précise également que la coupe du Monde de foot n’a pas provoqué chez nous le besoin d’un achat compulsif d’un écran de 2 mètres (question d’envie certes, pis un peu de moyens quand même). Donc nous regardons le match sur notre 82 cm (c’est déjà pas mal quand on n’habite pas un château ou un loft, et je n’habite ni un château, ni un loft)…
Blablabli, blablabla… Les commentateurs font leur entrée avant les joueurs : Christian Jeanpierre (son prénom c’est Christian), très chamaillé sur le net d’ailleurs et Bixente Lizarazu (qui ne veut plus vivre du foot, mais qui ne dit pas « non » quand il s’agit de voir tous les matchs en direct (et d’en commenter quelques uns) depuis les stades brésiliens. Pour un gars qui ne veut pas vivre du foot, il reste l’un des footballeurs français les mieux payés, avec, il paraît, plus de 90 millions d’euros empochés en 2014 – Sources People With Money)…
Et enfin l’un des moments que j’attends arrive : la Marseillaise démarre. Je déteste d’ailleurs ce choix de ne pas jouer les hymnes en direct, par un orchestre.
Mais ça serait trop de frais (déjà que là, ils font les poches de qui ils peuvent)… Un réflexe idiot me pousse à faire « chuuuut !» et à monter le volume à 24 (oui, je suis une déglinguée). Non pas que je trouve les paroles incroyablement jolies, ni la mélodie d’ailleurs, mais simplement parce que ça me fait frissonner de voir à quel point un chant patriote efface toutes les barrières au sein du peuple.
La bande-son démarre, les supporters sur place ou dans leur salon frissonnent et s’emballent, je me retiens de ne pas chanter (en partie parce que je chante faux). La caméra balaye les joueurs français, et on commence par Mathieu Valbuena (mal cadré d’ailleurs), puis Karim Benzema et mince, il a manqué le coche! Sans doute qu’il n’a pas fait gaffe que ça commençait. A moins qu’il ne connaisse pas les paroles. A moins qu’il n’ait pas envie de chanter la Marseillaise, l’hymne de son pays… Tous les autres joueurs vont chanter (même s’ils ne semblent pas tous avoir révisé les paroles…)
Bah voilà, les bleus auront gâché mon petit plaisir, et le match n’a même pas commencé. Et c’est grâce à Benzema que j’ai eu envie d’écrire cet article. J’ai voulu comprendre pourquoi ce type, né à Lyon en 1987, refusait d’adhérer à notre chant patriotique. Dois-je en conclure qu’il fait grève de la Marseillaise? Prend-il en otage l’une des valeurs de la République?
Karim Benzema, né le 19 décembre1987 à Lyon, est un footballeur international français évoluant au poste d’avant-centreau Real Madrid.
Il débute sa carrière professionnelle à l’Olympique lyonnais, son club formateur et s’y impose comme titulaire au cours de la saison 2007-2008, à l’âge de 19 ans. Meilleur buteur du championnat de France et meilleur joueur de ligue 1, il remporte le championnat et la coupe de France et est élu meilleur jeune joueur d’Europe en 2008. Ses prestations, notamment en ligue des Champions, attirent très tôt l’attention des grands clubs européens, et France Football nomme le joueur, tout juste âgé de 21 ans, dans la liste des candidats au ballon d’or 2008.Après cinq saisons passées dans le club de sa région natale, il rejoint le Real Madrid en juillet 2009. Il s’impose progressivement comme titulaire à la pointe du club de la capitale espagnole et devient le meilleur buteur français de l’histoire de la Liga, avant de devenir le meilleur buteur français de l’histoire du club madrilène devant Zinédine Zidane. À l’issue de la saison 2013-2014, Benzema remporte la 10e ligue des champions de l’histoire du club sous les ordres de Carlo Ancelotti. Il est à ce jour le 2e meilleur buteur français de l’histoire de la ligue des champions, derrière Thierry Henry.
Karim Benzema honore sa première sélection en équipe de France dès le mois de mars 2007. Non retenu par Raymond Domenech pour la coupe du monde 2010, il devient sous le mandat de Laurent Blanc un joueur clé de la sélection. Meilleur buteur en activité de la sélection tricolore, il dispute la coupe du monde 2014 au Brésil en tant que joueur le plus expérimenté de la sélection menée par Didier Deschamps, suite au forfait de Franck Ribéry.
Mais pour trouver des infos sur le truc qui me turlupine (pas au point de me ronger les ongles, de faire les 100 pas, ou de retapisser ma chambre pour m’occuper l’esprit), il me faut faire la recherche « Benzema ne chante pas la Marseillaise ». Et là, blum, le 1er lien renvoie sur le journal le Monde, en mars 2013 « On ne va pas me forcer à chanter la Marseillaise… », dit notre petit Kaka (on va lui donner un p’tit surnom, sans connotation aucune avec une quelconque idée scatologique, Bében aurait pu tout aussi bien faire l’affaire, Mama aussi, mais Mama ça fait cucul).
Pour bien comprendre, voici le lien qui mène aux propos rapportés de Kaka (ou Bében comme vous voulez), lors d’une émission de radio appelée « Luis Attaque » diffusée sur les ondes de RMC. Kaka qui dit clairement que son pays c’est l’Algérie et que la France c’est pour le coté sportif.
Bon, on peut comprendre qu’il dise que l’Algérie c’est son pays de cœur, car ses parents sont nés là-bas. Jusque là, ce fil de pensée ne devrait déranger personne.
Mais là où ça coince, c’est que Kaka ne parle pas d’amour pour son pays, la France. Je ne cherche pas du tout à créer un débat sur l’immigration (d’autant qu’il est français), débat qui par dérivé donnerait du crédit aux extrémistes ou à je ne sais qui. Je ne tiens pas à ce que les commentaires qui pourraient découler de cet article conduisent à des réflexions d’extrême-droite ou autres. Ah non, venez pas pourrir mon article, hein !?
(Je pense d’ailleurs qu’un prochain article sera justement sur le thème de l’immigration, mais plus précisément sur les vrais chiffres, qui vous le verrez, donnent à réfléchir et discréditent totalement les points de vue extrémistes…Mais pour le moment, parlons sport – enfin presque!)
Seulement, je suis choquée d’entendre qu’un français, qui vit en Espagne certes, mais qui a été formé par les clubs français, notamment l’OL (Olympique Lyonnais), n’ait pas tout simplement envie de pousser la chansonnette quand ça se présente (et ça n’arrive pas tous les jours). Si aujourd’hui Kaka empoche le pactole, parce qu’il joue en équipe de France, il aurait p’têt fallu ajouter une prime à la Marseillaise pour le faire chanter (du coup, on aurait aussi pu le faire chanter : tu chantes pas la Marseillaise, t’as pas de prime ! Et là, notre Bében qui claque les 120 décibels et qui met tout le monde d’accord. On imagine…)
Mais combien ils gagnent les 23 petits cocos envoyés sur la pelouse et sur les bancs du Mondial ?
Pour faire simple, et après de nombreuses recherches sur la toile, voilà ce que j’ai compris (source : gqmagazine.fr), sachant qu’on fait exploser les primes (les montants n’ont jamais été aussi élevés, alors que la France galère…non les français pardon !).
- Si élimination au 1er tour (ce qui n’arrivera donc pas) : 75 000 € par tête. Rien qu’en mettant les pieds au Brésil, et sans compter les autres rentrées d’argent des uns et des autres, les joueurs peuvent déjà investir dans un Studio au Cap d’Agde.
- Si élimination en ¼ de final : 133 000 €. Là on commence à penser aux 2 pièces (toujours au Cap d’Agde) et au petit balcon.
- Si défaite en finale : 200 000 €. On se projette dans la maison avec jardinet…y’en a quelques unes au Cap d’Adge.
- Si victoire en finale : 330 000 €. On pose son bateau sur la jetée et on rejoint sa maison chez les culs-nus idée reçue : il n’y a pas que des gens qui se promènent à poil au Cap d’Agde, mais j’aime bien imaginer les bleus à poil au milieu des vacanciers).
Donc tous ces chiffres ne sont pas des salaires, ce ne sont « que » des primes. Comme les primes que touchent les cheminots, ces privilégiés (je blaaaague, mais je fais de la promo pour mon dernier article, sur le sujet de la grève des cheminots, plus de 7000 vues à l’heure où j’écris soit 15h30, en ce jour de la fête de la musique).
Donc, que Kaka ne veuille pas chanter la Marseillaise parce que la France, c’est juste pour le sport, bah ça me fout en colère ! Et pour en ajouter à ma colère, j’ai lu des absurdités de la part d’internautes lambda (ceux-là même qui trouvent pas normal que les cheminots les prennent en otage). En voici un petit florilège :
- Tant que Benzema marque des buts, c’est pas grave s’il ne chante pas la Marseillaise.
- Pourquoi devrait-il choisir un pays ?
Aïe, ça pique la connerie non ? Perso, plus que piquer, ça me file des boutons. Je suis allergique aux cons, et encore plus aux cons qui s’ignorent. Donc je pense simplement que Benzema, en bon français qu’il est, devrait montrer l’exemple et tout connement chanter la Marseillaise. S’il ne veut pas y croire, tant pis, il lui suffit de faire un retour en arrière, en classe de CM1, quand il récitait les fables de la Fontaine devant les élèves de sa classe. A moins qu’à l’époque, déjà, il disait « Fuck la Fontaine ! » (bon, c’est pas mon préféré chez les auteurs classiques français, mais pas « fuck » quand même, du respect pour les anciens).
Alors Kaka, Bében ou Mama, pour conclure, et pour qu’on ne me reproche pas d’avoir été trop expansive dans mes propos, il faut que tu saches que t’as vraiment flingué ma soirée d’hier avec tes sales manières, mais tu me confirmes que le foot, c’est pas pour moi. Tout ce fric, réunit sur un terrain de 1,8 hectare, ça me donne le vertige et ça me rappelle que j’ai mieux à faire que de regarder un match pour rendre mes soirées et mes journées meilleures…
(Encore un grand merci à mon complice…)
Audrey Volfart