Condamnation « indulgente » pour Emmanuel Giboulot le viticulteur résistant
Le viticulteur bio Emmanuel Giboulot a finalement été reconnu coupable. Lundi 7 avril, le tribunal correctionnel de Dijon a condamné à 1 000 euros d’amende, dont 500 avec sursis, ce vigneron de Côte-d’Or qui avait refusé de traiter chimiquement ses 10 hectares de chardonnay et de pinot noir contre une grave maladie de la vigne, la flavescence dorée. M. Giboulot a décidé de faire appel du jugement.
La cour a donc suivi les réquisitions de la procureure, Jeanne Delatronchette, qui avait requis, lors du procès le 24 février, cette peine légère alors qu’elle aurait pu pousser jusqu’à six mois d’emprisonnement et 30 000 euros. Le jugement était très attendu, tant l’affaire, largement médiatisée, a divisé militants écologistes et profession viticole.
« Je ne me sens pas du tout coupable, c’est intolérable aujourd’hui d’être obligé de se masquer, d’être dans la peur quand on assume une position », a déclaré à la presse Emmanuel Giboulot à l’issue du délibéré. Quelque 120 personnes étaient venues lui apporter leur soutien devant le tribunal.
La députée d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV) Sandrine Bélier, qui l’avait accompagné, a estimé, dans un communiqué, que ce jugement était un « signal extrêmement négatif envoyé à toutes celles et ceux qui, comme Emmanuel Giboulot, pratiquent une agriculture conciliant performance économique et écologique ». Elle a dénoncé « l’inadéquation de la loi qui amène bien souvent les viticulteurs à recourir systématiquement aux pesticides sans menace avérée » et appelé à « réviser impérativement » cette réglementation.
« LE PRINCIPE DE PRÉCAUTION DÉVOYÉ »
Au cours de l’audience du 24 février, la procureure avait argumenté en faveur d’une condamnation : « Par choix idéologique, M. Giboulot n’a pas respecté l’arrêté préfectoral » du 7 juin 2013 qui imposait de traiter toutes les vignes de Côte-d’Or contre la flavescence, maladie très contagieuse et mortelle pour la vigne. Alors que cette épidémie se répand en France depuis les années 1950, plus de la moitié du vignoble est aujourd’hui soumise à un plan de lutte obligatoire — en vertu de réglementations nationales et européennes.
Pour justifier son refus du traitement préventif, le vigneron avait de son côté évoqué l’absence de foyer avéré dans le département. « L’insecticide, même autorisé en agriculture biologique [le Pyrevert], n’est pas sélectif : il aurait détruit la cicadelle, l’insecte vecteur de la maladie, mais aussi une partie de la faune auxiliaire sur laquelle je m’appuie pour réguler l’écosystème de mon vignoble », avait argumenté le viticulteur, qui exploite depuis trente ans ses vignes en biodynamie.
La cicadelle
Son avocat, Benoist Busson, qui demandait la relaxe en arguant d’un arrêté « illégal », ironisait alors : « Dans le doute, on impose un traitement qui porte atteinte à l’environnement et à la santé des hommes dans l’ensemble d’un département et pas seulement sur les communes touchées. Le principe de précaution est complètement dévoyé. Pourquoi ne pas traiter tous les départements voisins, jusqu’en Champagne ? »
Source et fin de l’article : http://www.lemonde.fr/planete/article/2014/04/07/verdict-lundi-pour-le-viticulteur-bio-qui-a-refuse-de-traiter-ses-vignes_4396574_3244.html