Chronique d’une destruction annoncée du modèle social français : Le pacte irresponsable

Le gouvernement continue et confirme cette voie, malgré le coup de semonce électorale de dimanche dernier. Statistiquement, ce sont les « clients » de la gauche qui se sont le plus abstenus. Réaction du gouvernement : on persiste et on signe pour accentuer une ligne politique néo-libérale, alors que les chiffres du chômage sont déprimants et que les restaus du cœur on servi cette année le triste record d’un million de repas. Cela démontre que cette politique qui pilote la France depuis des dizaines d’année est un échec évident. Morgue, problèmes avec la justice, ambition débridée, œillères, manque d’imagination, perte de souveraineté face à l’Europe, soumission au Medef, ces gouvernants toutes couleurs confondues sont déplorables, et l’on comprend les réactions d’une certaine frange d’électeurs qui mettent leurs espoirs dans les promesses de ceux qui n’ont jamais participé au pouvoir, et de ceux qui, dégoûtés restent chez eux.

Le pacte irresponsable

Introduction:

En France, où les cotisations sociales sont la source du financement de la protection sociale, le débat sur la lourdeur des “charges” sociales pesant sur les entreprises est récurrent. Les arguments les plus fréquemment avancés sont d’une part que le coût du travail trop élevé, notamment au voisinage du Smic, dissuaderait les employeurs d’embaucher une main-d’œuvre non qualifiée devenue trop chère, et d’autre part que ce coût du travail constituerait un désavantage compétitif qui mettrait les entreprises françaises en difficulté dans la concurrence mondiale.

Dans une situation où la dévaluation monétaire est devenue impossible dans les pays de la zone euro, la baisse du coût du travail est ainsi envisagée comme une modalité de dévaluation interne, à même de stimuler la compétitivité et l’emploi sans agir directement sur les salaires et même selon certains sans nuire au pouvoir d’achat des salariés.

Sur le long terme, en France comme dans d’autres pays d’Europe, les entreprises ont de fait obtenu d’importantes réductions des « charges » tant sociales (cotisations) que fiscales (impôts sur les sociétés).

La France mène depuis plus de vingt ans des politiques de baisse des cotisations sociales employeurs : leur poids dans la valeur ajoutée des sociétés a baissé de 18,2% en 1992 à 16% en 2006, puis 16,7% en 2012.

Après les 22 milliards d’exonérations de cotisations employeurs, les 6 milliards du Crédit impôt-recherche, les 6 milliards de baisse de la taxe professionnelle, les entreprises ont obtenu, suite au rapport Gallois (2012), la mise en place du Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), qui devrait leur rapporter 20 milliards d’euros par an, en année pleine. Le Medef persiste à réclamer une baisse de 116 milliards de l’ensemble des impôts que les entreprises supporteraient.

Le Pacte de responsabilité annoncé le 14 janvier 2014 par François Hollande se présente comme le dernier avatar de ces politiques : il prévoit la suppression totale et sans contrepartie précise des cotisations familiales employeurs (35 milliards d’euros). Le dispositif ayant vocation à fusionner avec le CICE, le besoin de financement lié au

Pacte de responsabilité est généralement estimé à environ 10 milliards d’euros. Cela ne suffit pas au Medef, qui, pour envisager la création d’un million d’emplois, réclame 50 milliards supplémentaires, la remise en cause du droit du travail, une plus grande facilité pour licencier ou restructurer, la hausse des seuils imposant des obligations de consultation du personnel, la suppression des normes et réglementations des marchés, etc.… voire même une sorte de droit de veto sur les décisions susceptibles de « stresser les entrepreneurs ».

Ces exigences du Medef suivent une intense préparation du terrain par l’artillerie lourde des idéologues libéraux : Seules les entreprises créent de la richesse et de l’emploi, le secteur public vit aux dépens du secteur privé (comme si un pays pouvait fonctionner sans écoles, hôpitaux, routes et autres crèches), l’État ne doit pas se mêler de production, il faut laisser libres les chefs d’entreprises, (comme si la crise n’était pas causée par la liberté excessive laissée au secteur financier), il faut avant tout réduire les dépenses publiques pour permettre au secteur privé de se développer (comme si la crise n’était pas prolongée par le manque de consommation et d’investissement induit par les exigences de rentabilité des capitalistes). Le gouvernement a choisi de ne pas combattre cette offensive mais d’y céder.

Bien que les effets vertueux attendus de ces politiques de baisse des « charges », tant en termes de création d’emploi que de compétitivité, n’apparaissent guère, nombre d’économistes libéraux préconisent d’aller plus avant dans ces mesures.

Celles-ci réconcilient d’ailleurs les politiques de (presque) tous bords avec les revendications du Medef. Comment cela a-t-il été possible ?

Trois idées reçues nous paraissent centrales dans cette convergence de vues :

(1) Les prestations familiales étant universelles, elles n’ont pas à être financées par la cotisation sociale (qui finance les droits sociaux des travailleurs et de leur famille) mais par l’impôt. Cette « charge » n’a pas à peser sur les entreprises.

(2) Le coût du travail est trop élevé, ce qui limite la compétitivité et/ou les capacités d’embauche des entreprises. La baisse du coût du travail est donc un instrument pertinent de création d’emplois.

(3) Ce n’est que par la baisse des dépenses publiques et la recherche de compétitivité que l’Europe peut sortir de la crise. Cette note s’emploie à les démonter.

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