Davantage d’inondations à cause des rivières atmosphériques

Le réchauffement de l’atmosphère pourrait bien exacerber les caractéristiques de climats pas forcément réputés pour leur soleil, comme au Royaume-Uni… Si dans plusieurs régions du globe on s’attend à un accroissement de la sécheresse, d’autres latitudes devraient à l’inverse subir davantage de tempêtes, de précipitations et de crues. Décryptage de cette situation en apparence paradoxale et due aux curieuses rivières atmosphériques.

 

Au Royaume-Uni il pleut souvent, mais l’année 2012 a été ponctuée d’inondations franchement sévères. Les dégâts occasionnés par ces catastrophes naturelles ont coûté 1,6 milliard d’euros au gouvernement. Il semble que ce type d’événements devrait se renforcer dans les décennies à venir en réponse aux modifications anthropiques de la composition de l’atmosphère. La météo britannique devrait connaître de plus en plus de précipitations continues et conséquentes.

Plus généralement, ce sont tous les pays se trouvant en moyenne latitude qui seront probablement concernés. Mais pourquoi ? Non loin de l’équateur, des rivières atmosphériques se forment. Elles se présentent comme des courants en basse troposphère, riches en vapeur d’eau et qui peuvent atteindre 300 km de large pour 1.000 km de longueur. Transportant l’excès d’énergie accumulée à l’équateur vers les plus hautes latitudes, ces « rivières » sont responsables de la formation des tempêtes extratropicales et peuvent provoquer crues et inondations aux moyennes latitudes. En 2010, la Californie avait les pieds sous l’eau car une rivière atmosphérique avait provoqué un véritable déluge, qui apporta en moins de deux jours, près de 250 mm d’eau.

Exemple d'événement de rivière atmosphérique (atmospheric river sur l'image) qui a provoqué d'importantes précipitations sur l'ouest des États-Unis. Les images montrent le taux de vapeur d'eau (integrated water vapor ou IWV en cm) en fonction de la latitude. L'échelle de couleur représente le taux de vapeur d'eau totale entre la surface de l'océan et l'espace.

Exemple d’événement de rivière atmosphérique (atmospheric river sur l’image) qui a provoqué d’importantes précipitations sur l’ouest des États-Unis. Les images montrent le taux de vapeur d’eau (integrated water vapor ou IWV en cm) en fonction de la latitude. L’échelle de couleur représente le taux de vapeur d’eau totale entre la surface de l’océan et l’espace. © NOAA

Les rivières atmosphériques ont été définies au début des années 1990. Elles font l’objet d’un intérêt croissant depuis l’utilisation des données satellite, qui permettent d’identifier clairement les tubes riches en vapeur d’eau. Dans une étude récemment publiée dans les Environnemental Research Letters, une équipe de l’université de Reading (Royaume-Uni) suggère que ces rivières devraient s’intensifier et apporter plus fréquemment de l’humidité aux moyennes latitudes dans les décennies à venir.

Les gaz à effet de serre en cause

D’après leur étude, l’augmentation de la température atmosphérique entraînera une augmentation progressive de la pression de vapeur saturante de l’eau. En d’autres termes, la vapeur d’eau atmosphérique augmentera, ce qui favorisera donc la formation de rivières atmosphériques. Les résultats de l’étude tendent à dire que les changements seront notoires en 2074.

Cinq modèles climatiques issus du projet CMIP-5, et utilisés par le Giec, convergent vers ces conclusions. Dans un premier temps, l’équipe a lancé ces modèles sur la période 1980-2005, l’objectif étant d’évaluer leur capacité à simuler correctement la formation des rivières atmosphériques. Les cinq modèles ont semble-t-il été concluants au test de contrôle. Pour déterminer l’évolution temporelle de ces rivières, les modèles ont été soumis à deux types de scénarios : RCP4.5 et RCP8.5, qui rendent compte des évolutions potentielles de la quantité de gaz à effet de serre dans l’atmosphère.

Plus d’inondations malgré les vagues de chaleur

Tous les modèles simulent au moins un doublement dans la formation de rivières atmosphériques pour les décennies à venir. Le niveau de cohérence entre la fréquence des événements et les émissions de gaz à effet de serre est, toujours d’après l’étude, tout à fait remarquable.

« Le lien entre les rivières atmosphériques et les inondations est déjà bien établi. Donc, une augmentation de leur fréquence est susceptible d’entraîner une augmentation du nombre d’événements de fortes pluies d’hiver et des inondations. Les rivières atmosphériques plus intenses sont susceptibles de conduire à des cumuls pluviométriques plus importants, et donc à plus d’inondations », explique le chercheur David Lavers, auteur de l’étude. Si la vague de chaleur que connaissent actuellement nombre de pays des latitudes moyennes nous montre que l’été existe toujours, cette étude vient rappeler que le réchauffement climatique nous réserve bien des changements.

SOURCE : Futura-sciences.com