RÉFLEXION : TUER EST-IL MOINS CULPABILISANT AUJOURD’HUI QU’HIER ?

Vous l’avez remarqué. Les infos sont pleines de cadavres… Accidents, attentats, guerres, phénomènes climatiques etc…

Alors que nous sommes anti chasse, anti corrida, qu’à juste titre nous nous élevons contre la maltraitance animale et la disparition des espèces, que nous signons des pétitions, notre seuil de tolérance par rapport aux victimes humaines semble avoir pris le large. Si nous sommes encore bouleversés par les morts à nos portes, celles d' »ailleurs », lointaines donc,  sont ressenties avec fatalisme, comme si certaines morts avaient moins de valeur que d’autres, et qu’elles correspondaient à une sorte de fatale « normalité ».

Que se passe-t-il ? Sommes-nous conditionnés ?

On ne peut répondre que par l’affirmative. Et depuis notre plus tendre enfance ! 

La Bible*  les légendes, puis  l’histoire de l’humanité sont pleines de violences et de guerres.  Elles nous sont présentées comme une chose nécessaire à l’avancée de la civilisation et les chefs de guerres sont portés au nues en tant qu’héros de l’humanité. Le tout avec l’aide d’Hollywood dont les films à la gloire des tueries mondiales ne se comptent plus.

Actuellement, on en arrive à des guerres « propres », « justes » (puisque visant à imposer à n’importe quel prix une soit disant démocratie), à des « frappes chirurgicales »comme si il fallait absolument en gommer l’image de l’horreur dans nos têtes de moutons soumis.

Pire, en fonction de nos relations d’amitiés avec l’auteur de l’agression et les cibles visées on nous ballade entre  rejet et solidarité, en cherchant à nous faire oublier qu’un conflit est toujours atroce et que cela ne devrait pas être négociable.

La diffusion de l’information, grâce au net, encourage une sorte d’habitude de l’esprit aux violences diverses et variées. Ce dernier paramètre est nouveau. Il diminue sans aucun doute notre réactivité en la rendant volatile, une brève émotion en chassant une autre…

D’autre part, le vocabulaire guerrier a envahi notre quotidien, particulièrement dans le milieu médiatique et commercial : on ne parle plus qu’en terme de conflits, de guerres, de killers et autres joyeusetés qui poussent deux concurrent à privilégier l’agressivité au détriment du respect de l’adversaire….

 

Enfin, le pacifisme est ridiculisé, ramené à l’idée de la lâcheté, de la collaboration… De temps en temps sort un héros tel que Gandhi ou Martin Luther King, mais on ne peut pas dire qu’ils soient très nombreux.  Ils servent de contrepoint en donnant bonne conscience à une humanité qui peut  ainsi se regarder sans culpabilité dans le miroir de l’histoire…

Certes, on négocie pour le principe, mais par derrière on s’arme avec des engins capables de rayer toute vie de la planète. Et celui qui montrera le plus ses biceps sera le plus respecté. Qu’il y a-t-il de changé depuis le « struggle for life » des cavernes ?

Bon.. ne soyons pas butés, admettons que nous ayons été « obligés » de passer par ces étapes barbares…

Mais aujourd’hui ??

Nous savons, grâce au travail d’analystes et de journalistes qui cherchent courageusement à comprendre le dessous des cartes, que bien des conflits sont provoqués et entretenus volontairement par les impérialismes politiques ou économiques (les deux étant étroitement liés). Pourtant, cela ne provoque pas de réactions, ou très peu. Pas de manifs, pas de pétitions… Nous laissons passer sans bouger… Notre silence ne serait-il pas une sorte de « permis de tuer » donné aux décideurs ?

Oui, nous sommes insidieusement, quotidiennement formatés.. Le système mis en place fonctionne. … A tel point que l’on peut lire chez les commentateurs  survivalistes qu’un des objets majeurs à posséder est une arme.. Au cas ou ils seraient agressés.On peut le comprendre, mais pourquoi ne pas envisager, d’abord, le partage ? « L’homme est un loup pour l’homme », on connaît ça par coeur, c’est tellement rabâché !  Mais l’homme ne pourrait-il pas être plutôt un frère pour l’homme ? 

Il va bien falloir commencer un jour, car :

Comment peut-on rêver d’un futur humaniste et ne pas changer en soi, tout d’abord, ce cadre de pensée ?

Moi je dis ça, je dis rien… Mais tout de même, il y a vraiment quelque chose qui cloche !

JGC

—————————————————————————————————

ARTICLE :

Voici la réflexion d’un psychologue, ciblée, car elle vise plutôt l’armée, mais sa démonstration est claire et ne nous exclut pas, nous les civils. La question soulevée est majeure : Retournerions grâce à la technologie à plus de barbarie ? J’imagine hélas, que vous avez déjà la réponse…

iStock_000010314704Large

Deux officiers du corps des US Marines publient aujourd’hui un article dans le Hufftington Post* qui interpellent sur la manière dont nous normalisons aujourd’hui l’acte de tuer.

D’après des recherches effectuées par l’armée américaine après la deuxième guerre mondiale, il semblait que même en situation de guerre, les êtres humains étaient hésitants à se tuer les uns les autres. La solution des armées à ce « problème » a été de trouver un conditionnement psychologique conçu pour réduire l’aversion naturelle à tuer.

 

Pour ce faire, une batterie de changements a été introduite dans la formation des soldats. C’est ainsi par exemple que les anciennes cibles concentriques des stands de tir ont été remplacées progressivement par des silhouettes humaines, et qu’avec l’évolution de la technologie, ces silhouettes se sont elles-mêmes transformées en figurines de plus en plus réalistes. Cette « humanisation » des cibles utilisées à l’entrainement implique une « normalisation » de l’acte de tirer sur une cible humaine, en effectuant ce qui est aujourd’hui est reconnu par les neurosciences comme un « recablage » des circuits neuronaux afin d’établir un « habitus » différent de celui qui s’est mis en place par la naissance et l’éducation.

 

Un des problèmes soulevés par l’article en question, est la différence d’accompagnement de ce changement dans la normalisation entre l’univers civil et l’univers militaire. En effet, ces mêmes silhouettes et figurines se sont retrouvées aussi bien dans les stands de tirs militaires, les stands de tirs civils, les stands de tirs de foires, puis dans les jeux vidéos, devenus jeux de guerre, et dans lesquels le simple fait de tuer (ou de violer) fait partie du comportement normal pour avancer dans le jeu, au prétexte qu’il ne s’agit « que d’un jeu ». Dans l’univers militaire, toujours selon les auteurs de l’article, cet apprentissage est doublé d’un autre apprentissage, celui du discernement entre le tir « moral et justifié » et le tir « non justifié ».

 

J’ose suspecter une forme d’angélisme dans cette dernière distinction, mais c’est bien la première partie de l’analyse qui me frappe. De plus, même en situation de tir réel, on sait que plus une cible est distante, et plus l’arme agit comme une « intermédiation », plus la propension à effectuer l’acte létal est élevée. Ainsi, il est beaucoup plus difficile de poignarder de sang froid un soldat adverse, de l’étrangler avec une corde que de l’abattre au fusil, et qu’activer un missile ou un drone est encore moins difficile, puisque plus on s’éloigne de la cible, moins le sentiment d’apporter la mort est présent.

 

L’hypothèse de l’article est donc soutenue par deux ensembles d’argument: l’acte d’utiliser une arme à fin de tuer est de plus en plus normalisé par le réalisme des scènes dans lesquels cet acte est simulé (stand de tir, jeux vidéos, simulation de combats), et de moins en moins perçu comme une responsabilité personnelle au fur et à mesure que l’arme agit à distance.

 

Dans le domaine militaire, on peut semble-t-il démontrer que le réalisme de la formation des soldats a « porté ses fruits » puisque, toujours selon l’article cité, si seulement 20% des soldats américains engagés dans la seconde guerre mondiale ont effectivement tirés sur leurs ennemis pendant le combat, ce taux était monté à 95% au Vietnam et atteint 100% en Afghanistan.

 

Si telle est la situation, il faudrait pouvoir mesurer dans quelle mesure les mêmes conclusions peuvent être tirées en analysant l’usage non militaire des armes, principalement dans un contexte où l’on peut en plus détacher ce problème « éducatif » de celui de la détention des armes, problèmes particulièrement sensible aux Etats-Unis…

D. FOUCART

*Article du Huffingtonpost (en anglais) :

http://www.huffingtonpost.com/michael-haf/videogames-and-gun-violence_b_2594373.html

SOURCE : http://wordpress.interactes.be/tuer-est-il-moins-culpabilisant-aujourdhui-quhier/

_________________________________________________________

*Outre les récits impitoyables de guerres et de destructions menées au nom, quand ce n’est pas sur l’ordre, de DIeu,  les anges eux-mêmes sont  organisés en légions et leur chef, St Michel est en cuirasse l’épée à la main ! N’est ce pas la plus magnifique des cautions ??

 

 

 

Le but des brins est de tenter de vous informer différemment en mettant en lumière certains sujets et en les proposant à votre réflexion. Utilisez toujours votre discernement et votre libre-arbitre.

 

 

 

Commentaires sont clos