Le business dynamique des armes pour enfants aux États-Unis
Une marque américaine, Crickett, s’est spécialisée dans la vente d’armes pour les enfants.
Inconcevable en Europe, le port d’armes à feu par de jeunes enfants est une réalité aux États-Unis. Ce véritable phénomène de société a interpellé le monde entier après le drame survenu ce mardi dans le Kentucky: un petit Américain de 5 ans qui jouait avec un fusil reçu en cadeau d’anniversaire un an plus tôt a tué sa sœur cadette âgée de 2 ans. Le médecin légiste en charge du dossier explique que «c’est un fusil pour enfant, de la marque Crickett. Le petit garçon avait l’habitude de tirer avec».
Au-delà de l’horreur suscitée par ce fait divers, l’accident met en lumière le business florissant de Crickett, une marque spécialisée dans la vente d’armes pour les enfants de 4 à 10 ans. La filiale de l’entreprise familiale Keystone Sporting Arms se targue de proposer «des armes à feu de qualité pour la jeunesse américaine».
Un concept qui a fait fureur outre-Atlantique où le second amendement de la Constitution, qui autorise le port d’armes à feu, est sacré. Ainsi, selon le site Internet du groupe, les fondateurs Bill McNeal et son fils Steve McNeal ont commencé à fabriquer des armes dédiées aux enfants en 1996. Ils engageaient alors 4 salariés pour une production annuelle de 4000 fusils. Aujourd’hui, Crickett compte près de 70 personnes et conçoit 60.000 fusils pour enfants par an, selon les chiffres de 2008. Signe que le fusil pour enfants est en plein essor: il est aujourd’hui commercialisé chez Walmart, première chaîne de supermarchés et premier employeur aux États-Unis.
Mécanique bien rodée
Il faut dire que la mécanique mise en place par Crickett est bien rodée. Son slogan est éloquent: «Crickett, ma première carabine», le nom de la gamme de produits pour enfants l’est tout autant: «mon premier fusil». Les parents y trouvent ainsi des modèles roses pour les filles, bleus pour les garçons ou façon camouflage pour coller au plus près des armes détenues par les parents… Les prix de ces objets enfantins sont abordables: le modèle de fusil utilisé lors du drame coûte près de 150 dollars (soit 115 euros), un peu moins cher que la «Maison de rêve Barbie»… La société fournit en outre des pièces de rechange: pour une crosse rose, il faudra débourser 40 dollars (30 euros).
Crickett ne s’arrête pas là: le groupe propose la panoplie complète du parfait tireur. On trouve ainsi des livres au nom évocateur: My first rifle book («Mon premier livre de fusils»), des vestes de chasse, des casquettes ou encore des boucles de ceinture. Par ailleurs, fidèle au «mythe» de l’Amérique des grands espaces, des romans mettent en scène le petit Jack qui poursuit des ours dans la forêt ou qui effectue un périple en Alaska.
Et le groupe est particulièrement actif sur la Toile. Il dispose d’une chaîne YouTube avec des vidéos qui défendent l’intérêt des armes à feu. Un groupe Facebook et la page «My First Rifle» ont toutefois été supprimés après le drame de mardi. Par ailleurs, le site du groupe est aujourd’hui inaccessible. Reste à savoir si cette tragédie va remettre en cause la folle croissance du spécialiste des armes à feu pour enfants. La tuerie de Newtown dans le Connecticut, qui a coûté la vie à vingt enfants et six adultes en décembre dernier, a déjà relancé le débat national sur la détention d’armes. Mais la National Rifle Association (NRA), le lobby des armes à feu aux États-Unis, se réunit en cette fin de semaine pour faire entendre sa voix… et ses intérêts.
Source : lefigaro