Une proposition de loi pour éradiquer l’ambroisie

Une loi pour éradiquer l’ambroisie ? C’est l’une des plantes les plus invasives et les plus nuisibles. Originaire du continent américain, l’ambroisie a été introduite involontairement en France au milieu du XIXe siècle. Elle a colonisé la vallée du Rhône et s’étend désormais sur tout le territoire. Bords de rivière, bords de route, jardins, champs, cette « mauvaise herbe » pousse partout. Rien ne la gêne, ni la sécheresse, ni la salinité, ni le goudron. Et son pollen, qui se disperse de la mi-juillet jusqu’à octobre, est responsable d’allergies graves, conjonctivites, rhinites, asthmes, dermatoses, trachéites, eczémas.

Malgré les alertes lancées depuis vingt ans par les associations de malades, les dispositifs d’arrachage mis en place en France ont été vains. Un député UMP de l’Isère, l’un des départements les plus affectés, Alain Moyne-Bressand, vient de déposer une proposition de loi à l’Assemblée nationale visant à rendre obligatoire et permanente la lutte contre l’ambroisie sur tout le territoire métropolitain. Une précédente tentative n’avait pas pu aboutir. Le texte déposé déclare le végétal « nuisible pour la santé publique » et demande que l’Ambrosia artemisiifolia soit inscrite sur la liste des organismes nuisibles.

« Tout occupant légal d’une parcelle avec la présence de l’ambroisie serait tenu de procéder à ses frais à sa suppression avant sa floraison », stipule la proposition de loi. La responsabilité des opérations serait confiée aux préfets, et dans chaque commune, un agent référent, élu ou fonctionnaire, devrait être désigné pour organiser et coordonner la lutte.

 

PLUS D’UN MILLION D’ALLERGIQUES

Pour les spécialistes de santé, la lutte contre la prolifération de l’ambroisie revêt un caractère d’urgence : dans la seule région Rhône-Alpes, la plus infestée, 10 % à 20 % de la population est allergique au pollen d’ambroisie. Sur l’ensemble du pays, le réseau national de surveillance aérobiologique, RNSA, estime à 1,2 million le nombre de Français qui sont allergiques à l’ambroisie. Les allergies n’atteignent pas seulement les personnes prédisposées génétiquement, comme c’est le cas pour les autres pollens.

Les conséquences économiques sont lourdes. Pour la seule région rhônalpine, l’ambroisie a entraîné 20 millions d’euros de dépenses de santé en 2011. Pour les agriculteurs, l’ambroisie est également synonyme de pertes financières. Selon une étude du centre technique interprofessionnel des oléagineux et du chanvre, les pertes peuvent atteindre les deux tiers des récoltes sans désherbage, et un tiers en cas de désherbage mal maîtrisé.

Est-il possible d’éradiquer cette plante ? Bruno Chavel, chercheur à l’INRA, préfère parler de « gestion ». « L’éradication sera très difficile à atteindre car l’ambroisie s’est déjà trop installée sur le territoire. » Il y a quelques années, le Canada, après des campagnes d’arrachage intensives, avait vu la plante disparaître. Mais quatre années de relâchement de la surveillance avaient suffit pour que l’ambroisie reprenne vigueur. « Ses graines peuvent survivre de très nombreuses années dans le sol avant de germer. Lutter contre la prolifération de l’ambroisie est un travail qui ne s’arrêtera pas », prévient Bruno Chauvel.