Effondrement du système bancaire : le compte à rebours vient de commencer

 

Le métier principal de la banque est de prêter de l’argent qu’elle n’a pas. Alors, pour attirer à elle les fonds qu’elle louera à des emprunteurs, sous forme de loyers avec intérêts, elle rémunère les dépôts des épargnants. Il ne lui est pas nécessaire de disposer en fond propre l’équivalent de ce qu’elle prête. Car elle met dans la balance les loyers qu’elle perçoit sous forme de remboursement d’emprunts de ses débiteurs, pour rassurer ses créanciers. L’équilibre est donc précaire et tient aussi longtemps qu’elle donne le sentiment de disposer de plus d’argent qu’elle n’en prête, même si cette balance est purement virtuelle. Si bien que lorsqu’elle est dans l’incapacité de démontrer que ses revenus couvrent les prêts qu’elle a consentis, le système vacille.

 

En 2008, les principales banques spéculatives américaines avaient abondamment prêté à des débiteurs qui ne pouvaient plus honorer leurs crédits, en particulier immobiliers. Paulson, chef du trésor américain de l’administration Bush et ancien patron de Goldman Sachs, a donc imaginé et mis en place un plan pour empêcher l’écroulement du système. Les états ont renfloué le système bancaire par milliards de milliards afin de remettre à niveau l’équilibre fragile de la balance virtuelle du système bancaire mondial. Mais le système a impérativement besoin de l’épargne “populaire”, car cette épargne est l’une des composantes essentielles de la garantie offerte aux créanciers des banques. C’est pourquoi, pour vendre le plan Paulson aux opinions publiques, il a été promis aux épargnants que leurs économies d’une vie de travail ne seraient pas affectées, mieux, qu’elles étaient garanties à hauteur de 100 000 € par épargnant. Car il était hors de questions que ces derniers retirent leur argent du système financier au risque de le voir totalement s’écrouler.

Mais le rêve absolu de la finance est de ne plus à avoir à rémunérer l’épargne. Ce qui lui permettrait d’accroitre considérablement ses profits. C’est d’ailleurs d’ores et déjà le cas depuis quelques décennies. Le taux de rémunération de l’épargne tourne autour de 2%. Le taux d’intérêts des prêts avoisine les 3,5% et l’inflation est inférieure à 2%. Si bien que le taux d’intérêt réel est de + 1,5% en faveur des banques. Dans les années 70, le taux d’intérêt était proche des 10%. La rémunération de l’épargne quelque part autour de 8 et surtout, l’inflation taquinait les 12%. Si bien que le taux d’intérêt réel était favorable à l’épargnant car le coût de ses crédits diminuait de 4% chaque année. On l’aura compris, la “lutte contre l’inflation”, qu’a imposé partout dans le monde le courant néo libéral monétariste de l’école de Chicago à la fin des années 70, dont Paulson est un des héritiers, n’avait d’autre objectif que d’accroitre la rémunération spéculative, c’est à dire le coût de l’argent sur les marchés en fabriquant de la dette. On commence à comprendre pourquoi, depuis le début des années 80, la machine économique réelle est grippée et pourquoi la machine financière s’emballe.

L’étape suivante consistait finalement à faire payer l’épargne plutôt que de la rémunérer. Et c’est désormais chose faite. Car depuis ce lundi 18 mars 2013, les épargnants chypriotes devront payer entre 6,75 et 10% du montant de leurs dépôts en banque. Ce précédent majeur brise tous les tabous que le plan Paulson de 2008 était sensé dissimuler. L’épargne populaire n’est plus garantie et elle finance désormais directement les exigences de rendements des fonds spéculatifs. Le seul mérite de ce holdup incroyable est la franchise. Son inconvénient : il rend payant l’épargne de manière visible et non plus déguisée.

La suite logique de cet incroyable holdup sera un retrait massif des épargnants du système bancaire. Et pas seulement à Nicosie. Car selon la thèse des avantages comparatifs des libéraux, mieux vaudra rembourrer son matelas de billets réels que de laisser en banque une épargne “payante”. Or, sans l’épargne populaire, les banques sont condamnées à une mort rapide car incapables de garantir leurs débits auprès de leurs créanciers avides. Or, Chypre fait partie de l’Union Européenne. Or, Chypre est intégrée à la zone Euro. Voilà pourquoi les bourses européennes s’affolent, dévissent, voient rouge. Tout simplement parce que l’effet “dominos” est déjà en marche.

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Comme en 2008, le pari de la finance est de miser sur les états pompiers. A une différence de taille. Les épargnants sont directement mis à contribution sans passer par des mécanismes complexes et incompréhensibles comme le MES ou autre TSCG. On touche directement au porte monnaie de l’Européen, on se sert dedans et pas qu’un peu. Car, jusque là, on lui demandait de payer pour obtenir un prêt. Maintenant on lui demande de payer pour prêter son argent à sa banque. En 2008, l’épargnant risquait de perdre son épargne. Alors il s’est résigné aux promesses de sauvetage. En 2013 on lui promet de voler son épargne pour rémunérer la finance mondiale. Et quand on n’a plus rien à perdre…

Source : agoravox

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