Revenus des médecins : « Je dois assurer mon train de vie »

Claude*, anesthésiste-réanimateur dans l’Ouest

Claude, anesthésiste-réanimateur dans l’Ouest, touche à 60 ans, entre 175.000 et 180.000 euros par an, soit environ 14.500 euros chaque mois. Il a conscience de bien gagner sa vie. Mais après 15 ans d’études, le médecin estime que ce n’est pas volé. D’autant que pour conserver son train de vie, il a dû multiplier les actes dans la clinique où il est installé depuis 34 ans. Il se souvient qu’à ses débuts, il ne travaillait que le matin. L’après-midi, c’était tennis. Aujourd’hui, Claude commence à 7h30 et ne repart pas avant 20h. Sans compter les péridurales avant accouchements au milieu de la nuit et la garde qu’il doit assurer tous les dix jours. Une progression de l’activité rendue possible par le perfectionnement des médicaments et des équipements de surveillance. Le métier, lui, reste toujours aussi stressant : « on est les premiers et les derniers à sortir du bloc ». Claude en secteur 1, comme 70% des confrères de sa spécialité, prend 28 euros par consultation : « je vis dans une région où il y a beaucoup d’agriculteurs et de smicards. Je ne me vois pas leur demander plus d’argent ».

Julien*, ORL en Savoie

« Aujourd’hui, les tarifs conventionnels, parmi les plus bas d’Europe, ne sont plus tenables. Le prix fixé par la Sécu pour une amygdalectomie n’a pas changé depuis 25 ans. Le secteur 2 m’a juste permis de suivre l’inflation.On assiste à une paupérisation rampante de la profession. Je partage mon cabinet avec un confrère en secteur 1. Il doit multiplier les rendez-vous. Moi, je passe plus de temps avec mes patients. En une journée, j’en vois 18, quand lui en reçoit 29. La différence entre nous deux? Le voyage est le même, mais avec moi, c’est la première classe, avec lui la seconde. J’ai une consultation tous les 15 jours à l’hôpital, je garde mes patients moins longtemps, c’est certain. A 55 ans, je gagne 69.000 euros par an, plus 7.000 euros issus de mon activité à l’hôpital (en tout, 6333 euros par mois, NDLR). Mes revenus sont au-dessus de la moyenne, mais c’est un avantage acquis, pas un privilège. »

Dominique*, radiologue en Seine-et-Marne

« Je touche environ 10.000 euros par mois, après 14 ans d’études. J’ai choisi le secteur 2, en option de coordination, ce qui veut dire que je m’engage à facturer 30% de mes honoraires sans dépassements. Etre en secteur 2 me permet de garder une marge de manœuvre, car il suffit qu’on ait 5% de charges en plus pour basculer. Un radiologue gagne bien sa vie, c’est certain, mais il ne faut pas oublier que cette spécialité est l’axe central en médecine. Regarder, par exemple, si un ganglion n’a pas augmenté de 3 mm est crucial pour établir un diagnostic. Et c’est nous qui avons plaidé pour que soit organisé un dépistage du cancer du sein de grande ampleur.  »

Jean*, urologue dans le Val-de-Marne

« J’ai étudié pendant de longues années, en espérant un retour sur investissement. J’ai ensuite été chirurgien à l’hôpital, sous-payé pendant 20 ans. Ouvrir un ventre, ne pas savoir ce qu’on va trouver dedans, ce n’est pourtant pas rien. Aujourd’hui, en cabinet, je prends entre 60 et 70 euros par consultation. En France, on pense que les médecins doivent être tributaires des Caisses d’assurance maladie. On ne veut pas qu’ils soient indépendants. C’est un système soviétique. J’ai 69 ans, 45 ans d’expérience, j’exerce toujours, car je dois assurer mon train de vie. Je gagne 7.500 euros par mois. »

source: http://tempsreel.nouvelobs.com/le-dossier-de-l-obs/20121026.OBS7181/revenus-des-medecins-je-dois-assurer-mon-train-de-vie.html

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