Grèce, attention, démocratie en grand danger !

Kostas Vaxevanis – journaliste et éditeur de « La boîte de Pandore »

Kostas Vaxevanis a été arrêté ce matin vers 10h (heure grecque) par la police, pour avoir publié la liste de Lagarde que les deux ministres des finances successifs avaient « perdu ». Celle liste comporte plus 2000 noms et fonctions de grecs suspectés de fraude fiscale. Libéré quelques heures après son arrestation, il devra se présenter demain au tribunal. Cette arrestation fait grand bruit dans les médias internationaux et pour cause : c’est la liberté d’expression et la démocratie en Grèce qui sont en danger.

Hier soir, la police a lancé un mandat d’arrêt contre Kostas Vaxevanis pour « avoir publié la liste Lagarde dans son magazine HOTDOC ». Recherché par la police depuis  hier soir, il a été arrêté ce matin puis libéré vers 14h sous l’obligation de se présenter demain après-midi au tribunal.  D’après son propre témoignage cette nuit, la police était présente dans tous les endroits où il avait l’habitude d’aller (restaurants, bureau, domicile, amis). Une recherche active qui a atterré les journalistes.

Hier, on pouvait lire, sur le site de la police :

ΡΧΗΓΕΙΟ ΕΛΛΗΝΙΚΗΣ ΑΣΤΥΝΟΜΙΑΣ

Αθήνα, 2Οκτωβρίου 2012

ΑΝΑΚΟΙΝΩΣΗ

Κατόπιν παραγγελίας της Εισαγγελίας Πλημμελειοδικών Αθηνών, διενεργούνται έρευνες από την Ελληνική Αστυνομία για τον εντοπισμό και τη σύλληψη του εκδότη του περιοδικού HOTDOC., όπου δημοσιεύονται ονόματα της Λίστας Λαγκάρντ.

»À la demande du procureur d’Athènes, une enquête est menée par la police grecque pour identifier et arrêter le rédacteur en chef du magazine de HOTDOC qui a publié la liste Lagarde ».

Tout est donc parti de la publication de cette fameuse liste de Christine Lagarde, qui est devenue une blague de très mauvais gout pour qui suit l’actualité grecque.  Fournie par C. lagarde en 2010, à l’époque ministre des finances en France, elle n’a jamais été utilisée. Pire, la liste sur support CD aurait été perdue, puis retrouvée, puis reperdue, finalement transféré sur une clef USB puis reperdue. Les ministres des finances successifs ont même été entendus au parlement pour s’expliquer sur ces disparitions.  Tout porte à croire que personne dans les gouvernements successifs ne souhaitait utiliser et/ou diffuser cette liste.

Kostas Vaxevanis, journaliste d’investigation et créateur du site « To Kouti Ths Pandoras » (« La boîte de Pandore ») est réputé pour ses documentaires et ses investigations. Dans son article, il a lui même mentionné qu’il ne pouvait pas garantir son authenticité, qu’il n’était pas non plus possible de savoir si cette liste a été modifiée avant sa réception. Comme il n’est pas prouvé que les personnes présentes dans  cette liste ont fraudé le fisc grec : il est tout a fait légal d’exporter ses économies si les impôts des sommes exportées ont été payés. Il avait fait appel à 3 avocats avant la publication pour connaitre la légalité de cette diffusion. La liste comporte donc des noms et des fonctions mais aucun chiffre.

Reporter sans frontière à réagit immédiatement :

« Nous sommes particulièrement inquiets de la rapidité avec laquelle les autorités ont émis le mandat d’arrêt. Kostas Vaxevanis n’est pas un dangereux criminel et aurait pu simplement être convoqué administrativement. La pression que fait peser le mandat d’arrêt sur le journaliste est de toute évidence disproportionnée. Cette procédure excessive encourage par ailleurs le blackout que les autorités semblent vouloir imposer au traitement de cette affaire certes sensible mais d’un intérêt public incontestable. »

« Si les autorités devaient procéder à l’arrestation de Kostas Vaxevanis, nous exigeons qu’il puisse disposer dès les premiers instants de la présence d’un avocat et que tous ses droits soient respectés. Il ne saurait en être autrement dans un état membre de l’Union européenne. Nous rappelons également que le journaliste est parfaitement en droit de faire valoir la nécessaire protection de ses sources »

Ce matin, sur twitter, Kostas Vaxevanis twittait en direct les évènement :

@KostasVaxevanis    Ils arrivent maintenant avec un procureur. Ils vont m’arrêter. Diffusez “

Une heure avant l’arrestation :

« Il y a 15 policiers dehors. Laisson les venir et m’arrêter comme les collabos allemands.” »

A l’heure où ces lignes sont écrites, 1000 personnes seraient devant le palais de justice d’Athènes en soutien avec le journaliste Arrêté. Des utilisateurs  parlaient de nouveau de junte sur twitter.  Car l’arrestation d’un journaliste le jour de la commémoration du « NON » à Mussolini et à l’Allemagne nazie donne effectivement à réfléchir sur les risques encourus désormais par quiconque souhaite délivrer la vérité dans un pays ravagé par la crise.

Le mois d’octobre aura tout montré en Grèce :

un utilisateur de Facebook arrêté pour blasphème envers l’Eglise (sur demande des néonazis de l’Aube Dorée),

– des activistes antifascistes arrêtés et torturés dans le quartier général de la police,

– le soutien inconditionnel du ministre de la défense Dendias à la police et l’accusation de « mensonge » envers The Guardian qui avait décidé de rendre l’affaire publique,

– des agressions de la police envers les manifestants qui ne souhaitent pas  voir leur environnement détruit par la mine d’or de Skouries, et toujours les même propos de Dendias,

des évènements indignes sur une des chaînes de télévision la plus regardée,

– des révélations sur l’infiltration de la police par les néonazis de l’aube dorée, sans lutte des gouvernements successifs,

– (cette liste n’est pas exhaustive).

Et la liste des évènements des dernières années en Grèce montre invariablement le même constat : la démocratie en Grèce est en train de s’effriter.

Et aujourd’hui, l’arrestation d’un journaliste suite à un mandat d’arrêt lancé sans un mot d’explication du gouvernement.

Il y a quelques mois, quand Elias Kasidiaris, le député néonazi de l’aube dorée, avait frappé plusieurs fois L. Kanelli sur les plateaux de télévision, un mandat d’arrêt avait aussi été lancé. Kasidiaris n’a jamais été arrêté. Il est toujours libre et ouvrait aujourd’hui le bureau de l’aube dorée de Corinthe.

En octobre 2012, 23 activistes antifascistes ont été arrêtés et certains torturés par les autorités. Aucun néonazi.

Grèce, attention, démocratie en grand danger !

Source : http://www.okeanews.fr/arrestation-de-kostas-vaxevanis-la-democratie-est-en-grand-danger-en-grece/

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