Comprendre la dette : La Grèce a-t-elle un recours ?

Et si un gouvernement Syriza appliquait à la

lettre un règlement UE sur la dette ?

 

Voici une version largement augmentée de l’opinion d’Eric Toussaint publiée par le quotidien Le Monde le 22 janvier 2015. La présente version fait 15 000 signes alors que celle publiée par Le Monde en fait 6 000.

Depuis l’annonce des élections du 25 janvier 2015 en Grèce, la possibilité que Syriza sorte victorieuse des urnes et forme un gouvernement est présentée comme une menace à l’opinion publique internationale et en particulier celle de la zone euro. Pourtant, ceux qui tirent la sonnette d’alarme savent parfaitement que Syriza a annoncé qu’elle ne suspendrait pas le paiement de la dette et ne sortirait pas de l’euro une fois au gouvernement. Syriza propose une renégociation de la dette au niveau européen et souhaite que la Grèce reste dans la zone euro. En revanche, Syriza s’engage à mettre fin aux mesures injustes et antisociales prises par les gouvernements précédents et la Troïka.

Cette campagne sur les supposées menaces que représente Syriza vise à intimider les électeurs grecs afin qu’ils renoncent à leur droit au changement.

Elle vise également en cas de victoire de Syriza à dresser une partie de l’opinion publique européenne contre la Coalition de la gauche radicale grecque afin d’éviter que, dans la foulée, Podemos en Espagne puisse gagner les élections à l’automne 2015.

D’autres surprises pourraient également survenir dans d’autres pays comme le Portugal, la Slovénie, Chypre, si les citoyennes et citoyens considéraient que cela vaut la peine d’essayer de remplacer une politique ultraconservatrice désastreuse par une politique de gauche.

Les dirigeants européens et les grands groupes privés qui les soutiennent savent que la majorité de la population de la zone euro tire un bilan négatif des politiques qui sont menées ces dernières années et cherche à reporter sa voix vers des forces qui proposent le changement. Une victoire de Syriza en Grèce représenterait une grande menace pour les partis traditionnels, tant les conservateurs que les « socialistes », redoutant une contagion qui pourrait gagner l’Espagne.

La dette réclamée à la Grèce représente 175% de la richesse nationale produite en une année et constitue un fardeau insoutenable pour le peuple grec.

Que se passera-t-il si Syriza une fois au gouvernement décidait de prendre à la lettre l’article 7 d’un règlement adopté en mai 2013 par l’Union européenne concernant les pays soumis à un plan d’ajustement structurel ? En font partie, la Grèce, le Portugal et Chypre, notamment.

Le point 9 de l’article 7 prescrit aux États sous ajustement structurel de réaliser un audit complet de la dette publique afin d’expliquer pourquoi l’endettement a augmenté de manière exagérée et afin de déceler des irrégularités.

Voici le texte complet :

« Un État membre faisant l’objet d’un programme d’ajustement macroéconomique réalise un audit complet de ses finances publiques afin, notamment, d’évaluer les raisons qui ont entraîné l’accumulation de niveaux d’endettement excessifs ainsi que de déceler toute éventuelle irrégularité. » |1|

Le gouvernement grec d’Antonis Samaras s’est bien gardé d’appliquer cette disposition du règlement afin de cacher à la population grecque les véritables raisons de l’augmentation de la dette et les irrégularités qui y sont liées. En novembre 2012, le parlement grec dominé par la droite avait rejeté la motion déposée par Syriza pour la création d’une commission d’enquête sur la dette, avec 167 voix contre, 119 pour et 0 abstention.

Il est clair qu’à l’issue d’une victoire électorale de Syriza, un gouvernement qui se mettrait en place sous sa conduite pourrait parfaitement prendre au mot l’Union Européenne en constituant une commission d’audit de la dette (avec participation citoyenne) afin d’analyser le processus d’endettement excessif de la Grèce, de déceler de probables irrégularités et d’identifier des parties illégales, illégitimes, odieuses,… de cette dette.

La participation citoyenne est fondamentale dans un processus d’audit qui se veut rigoureux et indépendant.

Or il faut relever que dans le règlement de l’UE mentionné plus haut, à l’article 8, il est recommandé de faire participer les « partenaires sociaux et les organisations pertinentes de la société civile » à l’élaboration du « programme d’ajustement macroéconomique ». Raison de plus pour les associer activement à l’audit.

 

Voici quelques éléments clés qui pourraient être mis en

lumière par la réalisation de l’audit :

 

La dette grecque qui représentait 113% du PIB en 2009 avant l’éclatement de la crise grecque et l’intervention de la Troïka, qui détient 4/5 de cette dette, a atteint 175% du PIB en 2014. L’intervention de la Troïka a donc été suivie d’une très forte augmentation de la dette grecque.

A partir de 2010 et jusqu’en 2012, les crédits octroyés par la Troïka à la Grèce ont servi très largement à rembourser les principaux créanciers de la Grèce jusqu’à cette période, à savoir les banques privées des principales économies de l’Union Européenne, à commencer par les banques françaises et allemandes |2|.

Environ 80% de la dette grecque étaient en 2009 possédés par les banques privées de 7 pays de l’Union européennes. A elles seules, en 2009, les banques allemandes et françaises possédaient environ 50% du total des titres de la dette grecque.

Un audit de la dette grecque montrera que les banques privées européennes ont très fortement augmenté leurs crédits à la Grèce entre fin 2005 et 2009 (les crédits ont augmenté de plus de 60 milliards € passant de 80 milliards à 140 milliards) sans tenir compte de la capacité réelle de la Grèce à rembourser. Les banques ont agi de manière aventureuse, convaincues que les autorités européennes viendraient à leur secours en cas de problème.

Comme indiqué plus haut, l’audit montrera que le plan de soi-disant sauvetage de la Grèce mis au point par les instances européennes avec l’aide du FMI a en réalité servi à permettre aux banques des quelques pays européens qui ont un poids décisif dans les instances européennes de continuer à recevoir des remboursements de la part de la Grèce tout en transférant leur risque sur les États à travers la Troïka. Ce n’est pas la Grèce qui a été sauvée mais une poignée de grandes banques privées européennes implantées principalement dans les pays les plus forts de l’UE.

Les banques privées européennes ont ainsi été remplacées par la Troïka devenue le principal créancier de la Grèce à partir de la fin 2010.

L’audit analysera la légalité et la légitimité de ce plan de sauvetage.

Est-il conforme aux traités de l’UE (notamment l’article 125 qui interdit à un État membre de prendre en charge les engagements financiers d’un autre État membre) ?

La procédure européenne normale de prise de décision a-t-elle été respectée ? Les prêteurs publics en 2010 (c’est-à-dire les 14 États membres qui ont octroyé des prêts à la Grèce pour un total de 53 milliards €, le FMI, la BCE, la Commission européenne, etc.) ont-ils respecté le principe d’autonomie de la volonté de l’emprunteur, à savoir la Grèce, ou ont-ils profité de sa détresse face aux attaques spéculatives des marchés financiers pour lui imposer des contrats qui vont à l’encontre de son propre intérêt ?

Ces prêteurs ont-ils imposé des conditions léonines, notamment en exigeant des taux de remboursement exagérés ? |3| Les 14 États membres qui ont chacun octroyé un prêt bilatéral à la Grèce ont-ils respecté les dispositions légales et constitutionnelles de leur pays et celles de la Grèce ?

Il s’agit également d’auditer l’action du FMI. Nous savons qu’au sein de la direction du FMI plusieurs directeurs exécutifs (le Brésilien, le Suisse, l’Argentin, l’Indien, l’Iranien, le Chinois, l’Egyptien) avaient fait part de leur plus grande réserve à l’égard du prêt accordé par le FMI en affirmant notamment que la Grèce ne serait pas capable de le rembourser vu les politiques qui lui étaient imposées |4|.

Le gouvernement grec a-t-il, en collusion avec le directeur général du FMI de l’époque, demandé à son administration en charge des statistiques de fausser les données exactes afin de présenter un bulletin de santé financier tellement mauvais que cela permettait au FMI de lancer un plan de sauvetage ? Plusieurs hauts fonctionnaires grecs l’affirment.

La BCE a-t-elle outrepassé de manière grave ses prérogatives en exigeant du parlement grec qu’il légifère sur le droit de grève, la santé, le droit d’association, l’éducation et sur la réglementation des niveaux de salaire ?

En mars 2012, la Troïka a organisé une restructuration de la dette grecque qui a été présentée à l’époque comme un succès. Rappelons que G. Papandreou, premier ministre, avait annoncé début novembre 2011 à la veille d’une réunion du G20, son intention d’organiser pour février 2012 un référendum sur cette restructuration de la dette grecque préparée par la Troïka.

Sous la pression de la Troïka, ce référendum n’a jamais eu lieu et le peuple grec s’est vu retirer le droit de se prononcer sur les nouvelles dettes.

Les grands médias ont relayé le discours selon lequel la restructuration permettait de réduire de 50% la dette grecque. En réalité, la dette grecque est plus élevée en 2015 qu’en 2011, l’année qui a précédé la grande annulation de soi-disant 50%.

L’audit montrera que cette opération de restructuration qui constituait une vaste supercherie était liée à un approfondissement des politiques qui sont contraires à l’intérêt de la Grèce et de sa population.

L’audit devra aussi évaluer si les conditions strictes imposées par la Troïka à la Grèce en échange des crédits qui lui sont apportés constituent une violation caractérisée d’une série de traités et conventions que sont tenus de respecter tant les pouvoirs publics du côté des créanciers que du côté de l’emprunteur la Grèce.

Le professeur de droit Andreas Fischer-Lescano, commissionné par la Chambre du travail de Vienne |5| a démontré de manière irréfutable que les programmes de la Troïka sont illégaux en vertu du droit européen et du droit international.

Les mesures définies dans les programmes d’ajustement auxquels la Grèce a été soumise et les politiques concrètes qui en sont la conséquence directe violent une série de droits fondamentaux tels que le droit à la santé, à l’éducation, au logement, à la sécurité sociale, à un salaire juste mais aussi la liberté d’association et de négociation collective.

Tous ces droits sont protégés par de nombreux textes juridiques aux niveaux international et européen tels la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, la Convention européenne des droits de l’homme, la Charte sociale européenne, les deux Pactes de l’ONU sur les droits humains, la Charte de l’ONU, la Convention de l’ONU sur les droits de l’enfant, la Convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées, mais aussi les conventions de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) qui ont le statut de principe général du droit (PGD).

La liste des articles violés par les memoranda imposés à la Grèce, que dresse méticuleusement le professeur Fischer-Lescano, est impressionnante et engage la responsabilité juridique des entités formant la Troïka ou mises en place par elle (le Mécanisme Européen de Stabilité, par exemple).

L’audit devra vérifier si, comme le prescrit le Règlement (UE) n ° 472/2013 du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 mentionné plus haut, le « programme d’ajustement macroéconomique respecte pleinement l’article 152 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et l’article 28 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ».

L’audit doit aussi vérifier si le passage suivant du Règlement est respecté :

« Les efforts d’assainissement budgétaire énoncés dans le programme d’ajustement macroéconomique tiennent compte de la nécessité de garantir des moyens suffisants pour les politiques fondamentales, comme l’éducation et la santé publique. »

Il s’agit aussi de vérifier si est appliqué ce principe fondamental du Règlement : « Conformément à l’article 9 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, l’Union doit prendre en compte, dans la définition et la mise en œuvre de ses politiques et actions, les exigences liées à la promotion d’un niveau d’emploi élevé, à la garantie d’une protection sociale adéquate, à la lutte contre l’exclusion sociale, ainsi qu’à que le droit à un niveau élevé d’éducation, de formation et de protection de la santé humaine. »

Il s’agit de mettre en regard ce qui précède avec le rapport d’évaluation de la mise en œuvre du deuxième programme d’ajustement structurel publié en avril 2014 par les services compétents de l’UE dans lequel les auteurs se félicitent de la réduction de 20% des emplois dans la fonction publique grecque |6|. Dans un encadré intitulé les « succès du programme économique d’ajustement » (« Success stories of the Economic Adjustment Programme »), on peut lire que les réformes du marché du travail ont permis de réduire le salaire minimum légal et que 150 000 emplois sont supprimés dans l’administration publique (« decrease in general government employment by 150,000 », p. 10).

L’audit devrait pouvoir montrer clairement que les mesures dictées par les créanciers constituent des régressions manifestes de l’exercice des droits humains fondamentaux et une violation caractérisée d’une série de traités. D’importantes irrégularités peuvent être identifiées.

En conséquence, la commission chargée de l’audit pourra émettre un avis argumenté sur la légalité, l’illégitimité, voire la nullité de la dette contractée par la Grèce auprès de la Troïka.

Notes

|1| Règlement (UE) n ° 472/2013 du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 relatif au renforcement de la surveillance économique et budgétaire des États membres de la zone euro connaissant ou risquant de connaître de sérieuses difficultés du point de vue de leur stabilité financière http://eur-lex.europa.eu/legal-cont…

|2| C. Lapavitsas, A. Kaltenbrunner, G. Lambrinidis, D. Lindo, J. Meadway, J. Michell, J.P. Painceira, E. Pires, J. Powell, A. Stenfors, N. Teles : « The eurozone between austerity and default », Septembre 2010. http://www.researchonmoneyandfinanc…
Voir aussi Eric Toussaint, « Grèce-Allemagne : qui doit à qui ? (2) Créanciers protégés, peuple grec sacrifié », publié le 8 octobre 2012, http://cadtm.org/Grece-Allemagne-qu…

|3| Les taux exigés qui étaient de 4 à 5,5% en 2010 – 2011 ont été ramenés à environ 1% en 2012 suite aux protestations qui s’élevaient de différents endroits (y compris du gouvernement irlandais qui s’était vu également imposé un taux très élevé à partir de la fin 2010) . En abaissant fortement les taux, les 14 États ont de fait reconnu que les taux antérieurement exigé étaient exagérés.

|4| Voir les révélations faites par le Wall Street Journal : http://blogs.wsj.com/economics/2013… Voir également : http://greece.greekreporter.com/201…

|5| Voir son rapport « Human Rights in Times of Austerity Policy », publié le 17 février 2014, disponible sur http://www.etui.org/content/downloa...).pdf.

|6| European Commission, Directorate-General for Economic and Financial Affairs, The Second Economic Adjustment Programme for Greece, Fourth Review – April 2014, p. 3, Voir http://ec.europa.eu/economy_finance… Le rapport comporte 304 pages.

http://cadtm.org/Si-un-gouvernement-Syriza

(CADTM : Comité pour l’Annulation de la Dette du Tiers-Monde)

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Un rapport de la FIDH (Fédération Internationale des Droits

de l’Homme) vient appuyer la démonstration ci-dessus :

JE VOUS CONSEILLE TRÈS VIVEMENT DE LIRE LES EXTRAITS DE L’ARTICLE SUIVANT :

Bien que nous ne soyons pas (encore) arrivés à la situation grecque, certaines dérives dénoncées vous rappelleront utilement ce qui est actuellement entrain de se jouer en France : Loi Macron, privatisations, démantèlement de la protection sociale et du système de santé, augmentation des impôts et du chômage, surveillance policière accrue, (justifiée avec l’approbation des moutons par l’affaire Charlie Hebdo qui, pardonnez-moi ce cynisme, tombe vraiment à pic..)

En Grèce, le coût social et humain de

l’austérité

Extraits :

C’est à un désastre économique et social que l’on assiste en Grèce depuis le début de la mise en place des politiques d’austérité, en 2010. Mais les conséquences de ces mesures vont encore au-delà : c’est ce que nous enseigne le dernier rapport de la FIDH, la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme, rendu public à Athènes ce jeudi 18 décembre. Elles touchent en effet à la question même des droits de l’homme, qui se sont sensiblement dégradés depuis quatre ans.

…/… Les conclusions sont accablantes. Le droit au logement et le droit à l’éducation sont particulièrement bafoués, mais aussi le droit au travail et l’accès à la santé. Quelques chiffres, glanés au fil du rapport : depuis 2010, 180 000 petites et moyennes entreprises ont mis la clef sous la porte. Le taux de chômage est allé jusqu’à toucher 28 % de la population active en septembre 2013 – il en est aujourd’hui à près de 26 %. Cependant, souligne le rapport, « le chômage réel doit être de 5 à 6 % supérieur aux statistiques officielles »

« Cette situation [de chômage très élevé] ne résulte pas seulement de la crise économique, mais c’est aussi le résultat de la manière dont cette crise a été gérée au niveau politique, c’est-à-dire les politiques spécifiques engagées par les autorités. Rien que dans le secteur public, 75 000 postes ont été supprimés entre fin 2012 et début 2013. Bien que le besoin de réformer pour faire face à de sérieuses déficiences structurelles dans le service public était communément admis, les coupes rapides et massives décidées en conséquence dans le secteur public ne reposaient pas sur la base d’une évaluation adéquate. Au contraire, ces coupes étaient fondées sur le besoin d’une conformité rapide avec les exigences formulées dans les mémorandums d’accord entre la Grèce et la Troïka et ont été appliquées uniquement pour des raisons budgétaires. » Autrement dit, les coupes ont été faites à l’aveuglette, sans logique aucune,

…/…

Au bout du compte, sur environ 1,4 million de chômeurs, seulement 110 000 ont pu recevoir des indemnisations.

« Les autorités grecques n’ont pas seulement pris des mesures qui ont sérieusement exacerbé la situation du chômage, mais elles ont en outre échoué à offrir le soutien social nécessaire pour faire face à la hausse rapide du chômage »,

écrit la FIDH.

Mais au-delà du chômage, c’est la précarité et l’absence de garde-fous pour les salariés qui se sont développés sous l’effet des mesures d’austérité :

– disparition des conventions collectives,
– baisse du Smic,
– multiplication des contrats précaires,
– renversement des rapports de force en faveur des employeurs

…/…

Il (ce rapport) montre aussi combien la politique d’austérité a pu se répercuter sur les droits civiques et politiques.

Les manifestations en réaction à la rigueur ont ainsi été l’occasion pour la police grecque d’exercer une violence injustifiée à l’égard de simples quidams et de multiplier les arrestations arbitraires.

De nombreuses interpellations ces dernières années ont en outre été accompagnées de mauvais traitements : en s’appuyant sur des cas précis, la FIDH dénonce des abus de pouvoir et un usage « excessif et inutile de la force dans la répression de protestations pacifiques » :

« Une telle force comprend le tabassage de manifestants et l’usage de gaz chimiques toxiques irritants et de gaz lacrymogènes. De tels actes constituent un comportement illégal, viole les obligations de la Grèce en matière de droit international. » Sans compter les arrestations préventives ni l’impossibilité d’avoir accès à un avocat pendant ces arrestations, en particulier à la veille de grandes manifestations ou de visites d’officiels étrangers

…/…

La police semble s’être radicalisée, aggravant les réponses à la dissidence et montrant une intolérance croissante à l’égard des voix critiques. »

Ces années d’austérité n’ont pas non plus laissé indemnes les immigrés. Montée de la xénophobie, montée des violences policières à leur égard, impunité jusqu’à il y a peu des criminels, difficulté de plus en plus grande pour obtenir des papiers : les migrants en Grèce sont particulièrement touchés par cette dégradation des droits de l’homme. Le discours de la haine et les violences racistes du parti néonazi Aube dorée – autrefois complètement marginal – ont en outre aggravé la situation.

« Aube dorée n’aurait jamais pu connaître un tel succès sans le soutien des autorités, en particulier la police, et les médias », relève la FIDH.

Enfin, l’austérité a eu un impact sur la liberté de la presse : la Grèce a largement reculé dans les classements internationaux.

Dans un dernier chapitre intitulé « Qui est responsable ? », la FIDH renvoie la balle aux autorités grecques et européennes :

« Le tragique déni des droits que la mission a observé et documenté en Grèce n’aurait pas pu arriver sans les contributions de la Grèce, d’autres États membres de l’UE et en particulier les membres de l’Eurogroupe, mais aussi l’UE et ses institutions comme la commission et la BCE, ainsi que d’autres institutions financières internationales, comme le FMI. »

La FIDH a-t-elle prévu d’envoyer son rapport à Pierre Moscovici et Jean-Claude Juncker ? Ces deux derniers, plutôt que d’appeler le parlement grec à élire à la présidence le candidat du gouvernement Samaras, feraient bien de lire ce que la politique qu’ils défendent bec et ongles encore aujourd’hui a provoqué dans la péninsule hellène…

ARTICLE COMPLET :

http://www.mediapart.fr/journal/international/211214/en-grece-le-cout-social-et-humain-de-lausterite