MEDECINE ALTERNATIVE : LE DISCOURS RAISONNABLE ET COURAGEUX D’UNE ÉCOLO AU SENAT

Lutte contre les « dérives sectaires » : les écologistes rompent pour la première fois l’unanimité politique

Lors du débat sur les conclusions de la commission d’enquête menée par le Sénat sur «l’influence des mouvements à caractère sectaire dans le domaine de la santé», le 11 juin 2013, Hélène Lipietz, au nom du groupe écologiste, a tenu un discours en rupture avec l’idéologie affichée sans discontinuer durant près de trente années de lutte contre les «sectes» en France. Une première suit et éclaire l’abstention des Verts lors du vote sur le rapport.

Pour la première fois, une parlementaire, Hélène Lipietz, ne s’est pas contentée des lieux communs et des clichés sur les « sectes ». En présentant la position de son groupe parlementaire au moment des conclusions de la commission d’enquête menée par le Sénat sur « l’influence des mouvements à caractère sectaire dans le domaine de la santé », la sénatrice a voulu aborder le dossier en profondeur, en faisant appel plus à la raison qu’à la peur, habituel levier des politiques dans ce domaine :

« Après six mois de commissions, soixante-douze auditions, un voyage, une visite au salon du Bien-Etre un petit peu épuisante, je suis désolée de constater que je reste sur ma faim. Je ne sais toujours pas ce qu’est une secte, ce qu’est une dérive et ce qui relève de l’escroquerie ou de l’abus de faiblesse classique ».

 

Elle s’est déclarée insatisfaite de « l’orientation » de la mission confiée aux parlementaires :

« Le problème n’est pas de savoir si certaines sectes utilisent le biais de la santé pour couper leurs patients du reste de la société ou de leurs familles, tout en leur soutirant de l’argent, mais bien de savoir comment faire pour que l’emprise, qu’exerce nécessairement celui qui sait sur celui qui ne sait pas, ne dérive pas vers des pratiques contraires à la liberté et à la dignité de l’humain ».

 

Élargissant le débat, Mme Lipietz a demandé :

« Un médecin allopathe ne dérive-t-il pas lorsqu’il n’explique pas le pourquoi des examens prescrits ou des traitements ? Lorsqu’il impose son savoir à celui qui lui fait confiance ? Ne dérive-t-il pas quand il ne prend pas le temps d’écouter parce qu’il n’a pas été formé à cela ou parce qu’il n’a plus le temps matériel de le faire tant notre système de santé est en crise. Et cette réflexion est pour l’ensemble des personnels médicaux bien sûr ».

« Ces mainmises existent dans tous les domaines sociaux : notaires, avocats ou entraîneurs sportifs peuvent aussi dériver »

« 60% des malades d’un cancer consulteraient un praticien de soins parallèles. Sont-ils tous embrigadés dans une secte ? Ou sont-ils tous victimes d’escroquerie ? Compromettent-ils réellement ainsi leurs maigres chances de guérison pour certains cancers ? Il faudrait faire enfin une comparaison sur les derniers moments de vie, en qualité, en conscience, en absence de douleur, entre les patients allopathes et les patients alter-médicaux. (…) La question n’est donc pas le choix des méthodes de soin, mais bien l’emprise que peuvent avoir certains sur des personnes, notamment en période de fragilité liée à la maladie ou au mal-être. D’autant que ces mainmises existent dans tous les domaines sociaux : notaires, avocats ou entraîneurs sportifs peuvent eux aussi dériver ».

S’agissant plus spécialement des dérives en matière de santé, Hélène Lipietz a posé la question de fond : « Tout autant que de savoir si des charlatans abusent de la détresse des gens, il faudrait mieux aussi se demander pourquoi les malades ou leur famille se laissent ainsi abuser. Qu’est-ce qui, dans notre société, comme d’ailleurs dans celle d’hier, fait que certains n’ont pas, à un moment de leur vie, assez d’esprit critique et se laissent abuser ».

« Y a-t-il des thérapies non officielles qui pourtant font du bien ? »

 

Enfonçant le clou, elle a mis le doigt sur un thème de l’enquête parlementaire qui avait provoqué des échanges assez vifs : celui de la reconnaissance ou de la labellisation de certaines pratiques non conventionnelles :

« Autre interrogation sans réponse : y a-t-il des thérapies non officielles qui pourtant font du bien ? Et si oui, comment les détecter et surtout comment les labelliser permettant ainsi aux citoyens, citoyennes de les utiliser tout en connaissant leurs limites comme on connaît les limites de certains médicaments allopathiques ?

« Or les rares tentatives d’évaluer les pratiques non conventionnelles sont immédiatement considérées comme visant à faire entrer le loup dans la bergerie. Alors même que certaines de ces pratiques sont regardées moins défavorablement dans d’autres pays ».

« Bref, plus qu’une chasse aux sorcières, le groupe écologiste plaide pour une démarche pragmatique ».

 

Qu’une élue de la République plaide pour une politique qui soit autre chose qu’une « chasse aux sorcières » constitue une première : c’est la reconnaissance que, jusqu’ici, les pouvoirs publics s’étaient contentés de poncifs calomnieux au service d’une politique discriminatoire. C’est aussi – et surtout – une avancée considérable pour une compréhension plus réaliste et, partant, une possible meilleure gestion du délicat dossier des « alternatives » thérapeutiques ou autres.

SOURCE : Sott.net

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