Energies alternatives: ce qui marche, ce qui ne marche pas

Priorité aux énergies renouvelables en Europe, exploitation massive des gaz et huiles de schiste aux Etats-Unis. Des choix stratégiques qui bouleversent le secteur énergétique mondial. Bilan.

Les énergies fossiles se raréfient, le nucléaire inquiète de plus en plus après Fukushima. En France, la transition énergétique en est à ses balbutiements. La Cour des comptes, dans un rapport sur les énergies renouvelables paru jeudi 25 juillet, constate que l’effort financier à apporter d’ici 2020 va devoir être démultiplié. Elle conseille de recentrer les aides et subventions sur certaines filières plutôt que d’autres.

Mais déjà, alors que les énergies renouvelables ont compté pour près de la moitié de la puissance électrique installée dans le monde en 2011, le classement des gagnantes et des perdantes se dessine. BFM Business fait le point.

 

Les énergies qui ont le vent en poupe

La géothermie

En 2005, la géothermie pourvoyait pour 1% de la consommation mondiale d’énergie. La France, leader européen avec ses 34 exploitations, mise beaucoup sur la géothermie. Elle doit monter en puissance pour atteindre les 600.000 installations dans l’Hexagone d’ici 2020. Au niveau européen, un quasi-doublement de capacité est prévu d’ici sept ans, incitations fiscales aidant.

 

L’énergie issue de la terre, générée en captant la chaleur des nappes d’eau en sous-sol, constitue une source d’électricité et de chaleur écologique. Elle émet 10 fois moins de CO2 que les centrales à gaz naturel, est renouvelable puisqu’elle ne vide pas son « réservoir » à mesure qu’elle l’exploite. Et elle est accessible à tous, la chaleur des sous-sols étant présente sur tous les continents. Un bémol: la fracturation hydraulique, considérée comme extrêmement nocive pour l’environnement, est nécessaire pour aller chercher l’eau des sous-sols.

 

> La biomasse

 

L’Europe souhaite que la production d’électricité et de chaleur via la combustion de déchets et de résidus représente 10% de la production d’électricité d’ici 2020, soit la moitié de l’objectif total de production d’énergie. En 2010, le secteur de la biomasse devenait celui qui attire le plus les investisseurs, devant le solaire et l’éolien, selon le cabinet KPMG.

 

Celle qui est devenue la 2ème énergie renouvelable dans le monde présente des atouts indéniables en termes d’émissions de gaz à effet de serre. Mais comme pour les biocarburants, la question de l’utilisation de ressources telles que le bois ou les matières premières agricoles pour se chauffer ou rouler, plutôt que pour se nourrir, ou construire fait débat.

 

> Les hydroliennes

 

EDF, Alstom, DCNS, E.ON, Siemens, Iberdrola… Ces géants européens de l’énergie sont tous impliqués dans des projets d’ampleur dans les énergies océaniques. Un engouement qui s’explique notamment par les objectifs nationaux ambitieux et les aides à la recherche et à l’investissement dans la filière houlomotrice.

 

Aujourd’hui, pour transformer les courants et les marées en énergie, l’hydrolienne a volé la vedette aux barrages. Mais malgré les investissements des industriels, la multiplication des prototypes et des tests, de nombreux défis techniques restent à relever, comme le raccordement des turbines au réseau sur la terre ferme. La phase d’exploitation commerciale n’est pas pour tout de suite.

 

Les secteurs qui suscitent moins d’enthousiasme

 

> L’éolien

La puissance du parc de l’Union européenne approche des 100 GW sans pouvoir dépasser ce seuil à fin 2011, constate l’Observatoire des énergies renouvelables. C’est pourtant l’une des filières, avec le solaire, qui a explosé ces dernières années.

Ce coup d’arrêt constitue d’ailleurs la rançon du succès. Avec la crise économique et financière, les aides à l’investissement et les prix garantis sur ce type d’énergie constituent des dépenses telles que les gouvernements ne peuvent plus les assumer. En Europe, les Etats appliquent des procédures administratives de plus en plus contraignantes et délivrent des autorisations au ralenti.

> Les sable bitumineux

Ce n’est pas une énergie renouvelable, puisqu’il s’agit en fait de pétrole. Mais à mesure que le prix du baril augmente, l’extraction de l’or noir des sables bitumineux, extrêmement longue et technique, donc très coûteuse, était devenue compétitive. De nombreuses compagnies, à l’instar de Total ou d’Exxon, investissaient dans des champs au Canada, 3ème réserve mondiale de pétrole dont 97% de la manne est engluée dans les sables.

Mais entre-temps, les Etats-Unis se sont lancés massivement dans l’exploitation des gaz et des huiles de schiste, faisant mécaniquement baisser les cours du pétrole. L’extraction des sables bitumineux n’étant plus rentable, les majors pétrolières sont enlisées et tentent de se désengager du Canada.

> Le gaz naturel

Exploitation massive des gaz de schiste aux Etats-Unis à coût imbattable, chute des prix du charbon, prix subventionnés de l’énergie renouvelable en Europe qui dérégulent le marché, investissements massifs dans des gazoducs qui traversent les continents… Autant de facteurs qui font exploser les prix du gaz naturel en Europe. Les consommateurs comme les fournisseurs d’énergie délaissent le secteur. GDF Suez met trois centrales à gaz sous cocon, en attendant des jours meilleurs.

> Le solaire

Le photovoltaïque, dont la croissance exponentielle a pris de court les Etats européens, reste la première énergie renouvelable européenne en termes de puissance générée (51 274 MW en 2011). Mais la filière européenne est actuellement à la peine.

Une série de faillites en atteste, celles des Allemands Q-Cell et Solarhybrid, et du Français Solar France. Le géant de l’énergie Siemens tente bien, depuis octobre 2012, de se défaire de sa branche photovoltaïque, mais plus de six mois plus tard, il ne trouve toujours pas preneur.

Premières causes de ce désamour, la concurrence de la Chine, soupçonnée de dumping, et la fin brutale des aides fiscales au secteur. Reste à voir si les taxes de Bruxelles sur les panneaux solaires chinois vont redonner du souffle au secteur.

EN CHIFFRES

> 14,3 mds d’euros: dépenses supportées par la collectivité entre 2005 et 2011 pour développer les énergies renouvelables. Il faudra investir 6 à 7 fois plus d’ici 2020

> 23%: part de renouvelables dans la production totale d’énergie (électricité, chaleur, transports) que la France s’est engagée à atteindre en 2020

> 49,5euros au MWh: coût de production du nucléaire

> Entre 43 et 188 euros au MWh pour l’énergie hydro-électrique, la moins chère des renouvelables

> Entre 62 et 102 euros au MWh pour le solaire, la plus chère des renouvelables

> 59,4% de l’énergie renouvelable est utilisée pour produire de la chaleur, 40,6% de l’électricité

16,3% de la production d’électricité était d’origine renouvelable en 2011 (objectif 2020: 27%)

16,5% de la production de chaleur provenait d’énergies renouvelables en 2011 (objectif 2020: 33%)

Source: Cour des comptes

Photo à la une : (Siphiwe Sibeko – Reuters)

SOURCE : BFM Business

 

 

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