La bagnole vs la petite reine

En France, la pollution atmosphérique, et notamment les particules, fait chaque année 42.000 morts. En raison de dépassements récurrents des valeurs limites de particules, l’Hexagone est poursuivi depuis 2014 par la Commission européenne, qui lui reproche également l’absence de plans d’action dans onze zones couvrant notamment onze agglomérations de plus de 100.000 habitants.
«Les Français ne comprennent pas que dans la situation que nous venons de vivre aucune mesure n’ait été prise».
Les Français ont besoin de mesures, de réglementations qui les oblige à revoir leur mode de transport mais il est impensable pour la plupart de laisser leur très chère bagnole au garage
Le Chacun pour soi encore et toujours,et tant pis si on en crève.
Quelques initiatives voient le jour:

 

A Dijon, la sobriété heureuse des livreurs à vélo

Dimitri et Adrien sont de jeunes passionnés de cyclisme et viennent de créer à Dijon leur entreprise de livraison de colis à vélo. En plus de proposer une alternative au tout-voiture, ils défendent une « altermobilité » animée par le plaisir et la liberté, et s’inscrivant dans une forme de « sobriété heureuse ».

C’est dans le cadre de course urbaine d’orientation que Dimitri (Normand d’origine) et Adrien (natif de Dijon) se sont rencontrés, en 2013, à Dijon. Dimitri (ancien étudiant en informatique) s’était installé sur Dijon avec sa compagne dans le cadre de la poursuite de ses études universitaires.

Fort de ses quatre années d’expériences en tant que livreur à vélo, lorsqu’il résidait sur Strasbourg, Dimitri avait toutes les cordes à son arc pour mûrir ce projet sur le dijonnais. C’est à ce moment là qu’Adrien l’a rejoint, alors cordiste en Franche Comté.

Alternative au tout-voiture

Septembre 2014, ils ont créé « TransMoutardeExpress » une entreprise de livraison à vélo. Leurs motivations sont simples : allier la passion du vélo à la livraison de colis pour proposer une alternative au « tout voiture » qui s’impose comme outil de travail « responsable de la pollution »et « des émissions de gaz à effet de serre en ville ». En ce qui concerne l’écologie et le transport, pour eux, la solution « ne se trouve pas dans la voiture électrique ».

« Le transport de colis à vélo promeut une autre forme de mobilité social, souple, rapide, valorisante pour la société et au sein des villes ». Ils ont créé leur entreprise en sollicitant le Pôle d’Économie Solidaire de Côte d’Or. Ils ont été reçus « par un bénévole qui a validé le projet »puis, un chargé d’accompagnement a travaillé avec eux pour la « réalisation concrète ».

La dernière étape étant celle du financement participatif via la plate forme Graines de Start. L’objectif « était de récolter de l’argent pour la création de l’entreprise, soit 1 500
euros »
. En quelques 60 jours, 58 personnes ont effectué des dons. Ils ont récolté au total 3 900 euros ! Sur le long terme, ils souhaitent se développer en SCOP (société coopérative et participative) en proposant à l’aide de vélos cargos d’effectuer des déménagements d’un point à un autre de la ville.

Altermobilité

Adrien et Dimitri se déplacent exclusivement en vélo et revendiquent cette altermobilité, une forme de « sobriété heureuse ». Le vélo est « un moyen de transport à part entière », respectueux des écosystèmes et qui permet face à « l’isolement de la voiture », à son« cloisonnement », d’évoluer, d’être en « adéquation » permanente avec le monde « tout en s’entretenant physiquement ».

Comme ils me le font remarquer, « on nous enseigne dés notre plus jeune âge à faire du vélo ». « Il y a toute une forme de pédagogie autour de cela, de plaisir et de liberté, alors que la voiture, la conduite, le fait d’être coincé dans un embouteillage provoque énervement, irritation, on ne ressent pas cela en vélo ». « De plus, la voiture est
une forme de barrière avec l’autre ».

Enfin, « faire du vélo » en ville implique un savoir faire. Un des constats qu’ils dressent, c’est qu’il y a une forme de culpabilité du cycliste vis-à-vis de l’automobiliste, le cycliste va « serrer le trottoir » quand une voiture arrive à sa hauteur comme « s’il dérangeait » l’automobiliste.

Quid de l’aménagement en ville de pistes cyclables ? « En plus d’être tardives », elles sont « mal pensées, car le trottoir est pour les piétons et non pour les vélos, car nous roulons plus vite ».

Adrien et Dimitri, sont investis auprès d’ associations d’auto-réparation de vélo comme celui de La Rustine ou La Bécane à jules sur Dijon. Ce sont « des lieux d’éducation populaire conviviaux » où l’image du « client » disparaît puisque « l’on répare son vélo avec quelqu’un ». Dimitri et Adrien participeront au village Alternatiba de Dijon ainsi qu’a la « Fête du vélo de Quétigny » afin de promouvoir une autre forme de mobilité sociale alliant travail et plaisir.

Les sociétés confrontées au déplacement urbain délaissent de plus en plus la voiture pour le vélo. Coursiers, plombiers, glaciers ou encore infirmiers libéraux, ces cycloentrepreneurs voient là un gain de temps et d’argent, et défendent une certaine vision de la ville.

En 2009, Arane Dumont décide qu’il est temps de ne plus être un plombier comme les autres.« La difficulté à trouver des places lors des interventions, la perte de temps, les PV, ça m’a vraiment amené à un ras-le-bol de la voiture », explique le Toulousain. Avec deux amis, il lance le collectif des Zecoplombiers, artisans intervenant à vélo au cœur de la ville rose.

D’après l’Ademe, plus de la moitié des trajets urbains font moins de trois kilomètres (zone de pertinence du vélo). Alors que seuls 3 % de ces déplacements se font en pédalant ! Nombre de sociétés regardent le vélo comme un véhicule efficace.

Au premier rang d’entre eux, les coursiers, dont l’efficacité n’est plus à prouver dans des villes comme Paris. Viennent ensuite les sociétés de livraison, qui résolvent à moindre coût l’enjeu du« dernier kilomètre », considéré comme étant le plus coûteux (la faute aux centre-villes engorgés et bondés).


– Arane Dumont –

Et il y a cette large catégorie d’entrepreneurs pour qui l’acheminement n’est pas forcément la finalité. Les Zecoplombiers n’y sont pas seuls, on s’en rend compte avec le collectif Boîtes à vélo, fondé fin 2013. Un glacier, un infirmier, un peintre en bâtiment, des cafetiers itinérants et bien d’autres, tous pédalant à Nantes.

Un atout en zone urbaine dense

« Le vélo n’a pas d’intérêt dans les villes de taille moyenne. Nous, on agit sur l’île de Nantes où la densité urbaine justifie l’usage du vélo, avec 18 000 habitants pour quatre kilomètres carrés », explique Céline Emoulou-Zoa qui livre des paniers bio pour Croquinelle.

A Rennes, Sébastien Le Menac’h fait le même constat. Sa SCOP Toutenvélo propose, entre autres, des déménagements intra-muros faits entièrement à vélo. « Tant qu’on reste dans l’hypercentre, il y a un vrai gain de temps : avec les remorques on se faufile partout. Sur une heure de temps, on gagne quinze minutes comparé au camion », constate-t-il. Cela dépend aussi de la qualité des aménagements cyclables décidés par les villes, que le Rennais juge corrects chez lui, malgré la rudesse du pavé breton.

Le gain de temps n’est pas le seul avantage de cette mobilité douce. « Les frais n’ont aucune commune mesure avec la voiture. Nos vélos électriques valent 3 000 euros, un coût très vite amorti. Derrière, pour le client, on n’est pas forcément moins cher qu’un autre sur la main d’œuvre. Mais on facture le déplacement à 15 euros là où
d’autres sont à 50 »
, garantit Arane Dumont.

A Toutenvélo, grâce à ces économies, on se dit 40 % moins cher qu’un déménageur classique. Contrepartie du biclou : le périmètre d’action forcément restreint limite le nombre de clients potentiels. Pas forcément une contrainte selon les Zécoplombiers. « Moins il y a de distance, mieux on se porte. Si on voulait se développer, au lieu d’élargir le périmètre, on créerait plusieurs équipes autours de plusieurs pôles, comme pour quadriller la ville. »

L’entrepreneur, acteur de la ville de demain

Cette stratégie entrepreneuriale fait écho à une philosophie plus globale, empreinte d’écologie. Les Nantais de Croquinelle font dans l’alimentation durable, les Rennais de Toutenvélo insistent sur le caractère non-polluant, les Zecoplombiers promeuvent les dispositifs d’économies d’eau.

A écouter Arane Dumont, c’est surtout d’une vision de la cité dont il est question. « On défend une ville à échelle humaine : on fait plus facilement des rencontres à vélo. Une ville avec une facilité de circulation, une ambiance sonore… L’étalement urbain, ce n’est pas le futur. Il faut relocaliser la ville, quartier par quartier. »

source:http://www.reporterre.net/