En France, un enfant sur cinq est pauvre
A trois jours de la Conférence nationale de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale, le groupe de travail sur les « familles vulnérables » rend les conclusions d’un rapport alarmant.
Deux millions six cent soixante-cinq mille. C’est le nombre d’enfants qui vivent sous le seuil de pauvreté en France. Dans la patrie des droits de l’Homme, un pauvre sur trois est un enfant, qui se voit privé de ses droits fondamentaux- santé, éducation, logement. Ce chiffre est issu du rapport présenté vendredi par le groupe de travail « familles vulnérables, enfance et réussite éducative », l’une des équipes chargées par le gouvernement de trouver des solutions concrètes face à une précarité en constante progression.
Autant le dire, il y a du pain sur la planche. Et beaucoup de fonds à débloquer pour y parvenir. Le groupe de travail, co-présidé parPierre-Yves Madignier, Président du mouvement ATD Quart Monde France, et Dominique Versini, ancienne Défenseure des enfants, a mis plusieurs propositions en exergue pour endiguer la pauvreté chez les jeunes. Par exemple, la création de 240 000 places en crèches d’ici dix ans. 92% des familles vulnérables se trouvant dans l’obligation de garder elles-mêmes leurs enfants, condtion nécessaire pour qu’elles puissent trouver un travail. Coût annuel de l’opération : près d’un milliard d’euros.
Autres propositions: une meilleure formation à la précarité des familles pour tout le personnel éducatif, des espaces « parents » dans les écoles, un numéro Vert pour les aider. Les experts soulignent également la nécessité de développer une véritable politique de santé pour les jeunes, trop souvent soignés dans l’urgence, et dépourvus d’un suivi régulier. Bref, les idées ne manquent pas. Les moyens, si.
Crédits mal répartis
Mais comment expliquer un tel dénuement chez les plus jeunes en France, pays pourtant réputé pour la qualité de sa politique familiale? De l’aveu même de Dominique Versini, « les crédits alloués à la famille sont très mal répartis. Nous sommes l’un des pays qui investissent le plus, mais nous obtenons les pires résultats! ». Ainsi, les gouvernements précédents ont encouragé la multiplication d’assistantes maternelles. Mais ces aides coûtent aux parents – 245 euros par mois en moyenne, contre 56 euros pour une garde en crèche. « Les familles les plus vulnérables, dont la moitié perçoit des revenus globaux de 780 euros, en sont exclues ». Une politique familiale généreuse, mais peu redistributive.
La même logique est à l’oeuvre, selon le groupe de travail, avec le quotient familial, dont le coût pour l’Etat s’élève à 13 milliards d’euros. « Les deux tiers de cette somme vont aux 20% les plus riches ». Le groupe suggère de remplacer le quotient familial par un « crédit d’impôt universel », soit 715 euros par enfant, quels que soient les revenus perçus. Dominique Versini l’affirme : « 500 000 enfants pourraient ainsi sortir du seuil de pauvreté ».
De fait, seule une action politique forte, par le vote d’une loi, peut réellement changer la donne, estiment les experts consultés. Car sur le terrain, les familles vulnérables ont tendance à éviter les institutions qui pourraient les épauler. « Il y a un sentiment de honte sur lequel il faut aussi travailler », explique Dominique Versini.
Par Marion Guérin
source: http://www.lexpress.fr/actualite/societe/en-france-un-enfant-sur-cinq-est-pauvre_1196565.html