Pigeons, moutons, dindons … La ferme se rebelle contre les hausses d’impôts!
Depuis la présentation du projet de loi de finances pour 2013, les revendications se succèdent contre les hausses d’impôts et de prélèvements. Les pigeons ont montré le chemin, suivis par d’autres mouvements animaliers éphémères qui ont chacun connu des fortunes diverses…
Les chefs d’entreprise n’ont pas attendu le vote de l’article 6 du projet de loi de finances (PLF) pour 2013 à l’Assemblée pour voler dans les plumes du gouvernement. Regroupés sous la bannière des pigeons, ces jeunes patrons de start-up et créateurs d’entreprises ont dès la présentation du PLF 2013 fait leur apparition dans le paysage fiscal, exigeant le retrait de la mesure incriminée qui visait à aligner la fiscalité des revenus du capital sur celle du travail.
Dans le détail, ils s’indignaient du projet du gouvernement de taxer les plus-values sur les cessions d’entreprise au barème de l’impôt sur le revenu, soit à un taux pouvant atteindre 45%, celui de la nouvelle tranche marginale d’imposition créée par ce même Budget 2013. Ces gains étaient auparavant taxés à un taux forfaitaire de 19%… Outrés par une imposition totale des plus-values maximale de 60,5%, en intégrant les prélèvements sociaux (CSG, CRDS,…) de 15,5%, les « pigeons » ont reçu un renfort de poids, en l’occurrence celui de plusieurs organisations patronales, dont le Medef.
Pigeons précurseurs
Passés de chassés à chasseurs, les « pigeons » font progressivement reculer le gouvernement. Les ministres du Budget Jérôme Cahuzac et de l’Economie et des Finances Pierre Moscovici ont tenté chacun à leur tour de calmer les velléités des oiseaux mutins. « A un moment, il faut savoir atterrir, mettre fin à une mauvaise querelle, trouver des compromis intelligents », déclarait Pierre Moscovici aux Echos le jeudi 18 octobre, laissant ainsi la porte ouverte au dialogue avec les patrons réfractaires à toute hausse de l’imposition sur les entrepreneurs. Une notion bien difficile à dissocier de celle d’investisseur, véritable cible du gouvernement. Après la modification substantielle de l’article 6 et la marche arrière du gouvernement, les pigeons peuvent roucouler de plaisir. Un taux forfaitaire de taxation des plus-values est conservé, « seulement » majoré de 5 points à 24% pour les actionnaires, les entrepreneurs conservant une taxation des gains sur les cessions d’entreprise à 19%, sous conditions. Selon le porte-parole des pigeons Jean-David Chamboredon, interrogé sur Radio Classique, les amendements apportés au texte original permettent « dans la quasi-totalité des cas, de revenir aux règles actuellement en vigueur ». Une victoire pour les pigeons et leurs cousins nantais, les « canaris », qui demandaient également au gouvernement de reculer sur le durcissement de taxations des plus-values. Une bataille remportée donc, mais pas la guerre. Dans un communiqué du 19 octobre, six entrepreneurs, dont Jean-David Chamboredon, enjoignent l’ensemble des entrepreneurs français à demander au président de la République de s’asseoir à la table des négociations. « Nous demandons une concertation urgente, autour d’hommes et de femmes de bonne volonté et d’experts reconnus », peut-on lire dans le manifeste. Insistant sur « la gravité de la situation », ils estiment que « les amendements votés par l’Assemblée Nationale apportent des réponses partielles, complexes et sont sources de multiples injustices et inefficacités économiques ».
Dans le même temps, l’association française des biotechnologies France Biotech fait un appel à témoin et demande « sous 24 heures des exemples de distorsion qu’apportera la loi sur la taxation des plus-values de cessions de titres ». Par la voix de son président André Choulika, France Biotech entend « rédiger un document explicatif à l’intention de nos pouvoirs publics sur l’absurdité de la loi sur la taxation des plus-values de cessions de titres ». Preuve que le combat continue…
Un combat pour les pigeons, un évitement des réels problèmes de l’entreprenariat français selon les « moineaux », mouvement indépendant de jeunes créateurs d’entreprises portés par « la passion de l’innovation, le désir d’indépendance, l’envie de réussir, l’idée que l’on puisse apporter sa contribution à l’évolution de notre société ». Dénonçant « des parcours administratifs du combattant, des charges et des taxes qui grèvent [leurs] budgets, un code du travail trop rigide, des recherches de financement déjà compliquées, un déséquilibre face aux grandes entreprises qui payent peu d’impôts », ils demandent principalement un assouplissement des normes contraignant la création d’entreprise. Une revendication bien éloignée des considérations du Budget 2013, plus terre à terre, qui laisse encore les moineaux sur leur faim.
Les employeurs à domicile : dindons de la farce ?
Plus nombreux mais moins médiatisés, les particuliers employeurs sont particulièrement touchés par le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). En effet, dans l’optique d’augmenter « les droits sociaux des salariés », Jérôme Cahuzac et les députés de la majorité ont voté l’article 15 du Budget de la Sécurité sociale qui prévoit la suppression de la déclaration au forfait des salariés par quelque 2 millions de particuliers employeurs. La fin d’un avantage fiscal qui permettait à ces patrons à domicile de déclarer leur(s) employé(s) sur la base du Smic (1.425,67 euros) mensuel. D’où une hausse des cotisations pour ces employeurs de 475 millions d’euros par an, à peine compensée par un allègement de charge forfaitaire de 0,75 euro par heure de travail, introduit par un amendement du député de Meurthe-et-Moselle Christian Eckert et voté par les députés dans la nuit du mercredi 24 au jeudi 25 octobre.
« Une bonne réforme, gagnante pour tout le monde », pour le ministre du Budget Jérôme Cahuzac, mais peu goûtée par un mouvement hostile à cette taxation supplémentaire. A l’origine d’une pétition qui a déjà recueilli plus de 20.000 signatures, le mouvement des dindons s’oppose à cet article synonyme de « taxation massive et destructrice des emplois à domicile ». Créé le vendredi 19 octobre mais resté dans l’ombre de revendications plus médiatisées, à l’instar de celles des pigeons, « We are not #dindons » demande purement et simplement la suppression de l’article 15. Relayées par l’opposition dans l’Hémicycle, les craintes des dindons portent principalement sur « la destruction de dizaines de milliers d’emplois », « 85.000 » selon le député UMP des Bouches-du-Rhône Dominique Tian. La hausse des charges sur les employeurs à domicile « va compliquer la vie de millions de familles, sans aucun bénéfice social ou fiscal », glougloutent les protestataires dans leur pétition. Une pétition restée lettre morte qui fait de ces employeurs les véritables dindons de la farce du PLFSS 2013.
Les indépendants, « pas des moutons »
Dans le collimateur du gouvernement, les travailleurs indépendants sont également touchés par le PLFSS 2013. Les non-salariés vont en effet subir une forte hausse de leurs cotisations sociales suite au vote de l’article 11 du Budget de la Sécu à l’Assemblée nationale. Au programme 1,1 milliard d’euros de prélèvements nouveaux sur les indépendants, dont 150 millions pour les seuls auto-entrepreneurs. « Ne nous laissons pas tondre », avait pourtant prévenu le mouvement des « moutons » lors de sa première apparition mercredi 17 octobre au siège du RSI (Régime social des indépendants). Une première sortie peut être un peu tardive pour un mouvement qui se sera contenté de suivre les autres animaux de la ferme…pour l’instant !
Source : http://www.toutsurlesimpots.com/pigeons-moutons-dindons-la-ferme-se-rebelle-contre-les-hausses-d-impots.html