Pesticides : l’équation de tous les dangers

Alors qu’une étude choc française sur les OGM fait la Une, une autre étude anglaise parue discrètement pendant l’été avance des résultats particulièrement préoccupants.

Pesticide + pesticide = nocivité × 30.

C’est ainsi qu’on pourrait résumer l’équation établie par des chercheurs anglais de l’Université d’Aston.
Leur étude montre que les interactions entre différents composants de pesticides démultiplient les risques sanitaires.
Rapportés par Les Echos, ces travaux montrent que des substances individuellement considérées comme inoffensives, endommageraient notre système nerveux lorsqu’elles sont combinées.
C’est le cas des associations de substances comme le cyprodinil, le fludioxonil ou le pyriméthanil, toutes trois très présentes dans les raisins ou dans notre eau du robinet.
Elles démultiplient par 20 ou 30 fois les dommages occasionnés sur nos cellules !
Pour les chercheurs, cela signifie une vulnérabilité accrue face aux pathologies neuro-dégénératives comme les maladies d’Alzheimer, de Parkinson ou la sclérose en plaques.

Cette bombe sanitaire a-t-elle provoqué un sursaut des autorités en France ou en Europe ?
Pas vraiment. D’abord car la réglementation européenne REACH évalue chaque produit de façon séparée, ignorant les effets générés par les interactions entre résidus de agricoles ou chimiques.
Alertée sur le sujet il y a quelques mois, la commission européenne a même botté en touche, en refusant d’examiner l’impact induit par les effets cocktails.
En France, le sénateur Roland Courteau a bien essayé de poser la question du danger des ces mélanges de substances  à la ministre de la Santé. Sans réponse à ce jour.
Les pesticides devaient également être au menu de la table ronde Santé Environnement pendant la Conférence environnementale il y a 15 jours.
En vain. Même l’engagement de réduire de 50% l’usage de pesticides en France d’ici 2018 a été passé à la trappe. Pendant la conférence, l’industrie du pesticide s’est même payé le luxe de communiquer sur un record historique de ses ventes en 2012.
Pourtant, de plus en plus d’études établissent un lien entre pesticides et maladies chroniques. Et cette question des interactions devient même cruciale à propos de la qualité de l’eau en France.
Ainsi une étude de l’Institut Français de l’Environnement révèle-t-elle que 96% des eaux superficielles contiennent des résidus de pesticides.
Ce sont même près de 201 résidus de pesticides qui ont été décelées dans les eaux de surface. Et 123 substances ont été identifiées dans les eaux souterraines.
Quelles sont les interactions entre ces centaines de résidus toxiques dans notre eau de consommation ?
Faut-il multiplier par 30 la nocivité de polluants agricoles que les stations de filtrations échouent à éliminer totalement ?
On sait qu’une étude de l’Anses – prévue de longue date – sur les effets de 7 cocktails de pesticides est en cours.
Mais au vu des enjeux sanitaires, les moyens d’investigation annoncés paraissent un peu faibles, lorsqu’on sait que :
– plus de 150 études réalisées dans 160 pays depuis 1980 ont détecté la présence de produits polluants chimiques ou agricoles (dont de nombreux pesticides) dans nos organismes.
– qu’aux USA, une étude menée en 1999 sur un échantillon représentatif de la population a conclu que100% des personnes testées avaient des pesticides dans leurs organismes.
La France est le 3ème consommateur mondial de pesticides et le premier consommateur en Europe. Nous sommes particulièrement exposés aux pesticides contenus dans nos fruits, légumes et dans notre eau du robinet. Il serait donc temps d’enquêter sérieusement sur l’impact sanitaire de ces produits qui peuvent potentiellement se fixer dans nos organismes.