7 bombes à désamorcer pour sauver l’euro


DECRYPTAGE Le mois de septembre sera le mois de tous les dangers pour la zone euro. Les défenseurs de la monnaie européenne vont devoir se démener pour éviter le pire.

Depuis quelques jours un bal diplomatique effréné s’est ouvert entre chefs d’Etat et de gouvernement. Ce jeudi l’espagnol Mariano Rajoy recevra François Hollande. Le 6 septembre, Angela Merkel. L’Italien Mario Monti était hier à Bruxelles avec Jose Barroso, il sera aujourd’hui à Berlin et accueillera le Président français la semaine prochaine à Rome. Le week end dernier, Antonis Samaras, Premier ministre grec, est, lui, passé à la chancellerie fédérale, puis à l’Elysée. Les rencontres se multiplient, comme pour pallier le manque d’actions concrètes. Le Conseil européen de fin juin avait promis des mesures rapide pour doper la monnaie unique (notamment la mise en œuvre du MES) qui tardent à venir. Or, 7 bombes menacent l’euro.

LE JUGEMENT DE LA COUR DE KARLSRUHE

La cour constitutionnelle de Karlsruhe examine la constitutionnalité du MES (mécanisme européen de stabilité). Saisis en urgence avant l’été par plusieurs plaignants – dont une députée sociale-démocrate qui estime que le mécanisme plombe les comptes des générations futures-, les juges ont le pouvoir de tout bloquer. Véritable contrepouvoir, ils sont très sourcilleux de souveraineté des députés du Bundestag, notamment sur les questions budgétaire. Principale économie de l’Europe, l’Allemagne est aussi le principal contributeur aux mécanismes de sauvetage de l’euro. Un camouflet de la Cour reviendrait à compromettre le pare feu de la monnaie unique. Verdict le 12 septembre.

L’INTRANSIGEANCE DE LA BUNDESBANK

Autre épée de Damoclès, toujours outre Rhin. Comment la Bundesbank va-t-elle ou non se montrer conciliante. Son patron, le jeune et inflexible Jens Weidmann, donne régulièrement le signal qu’il est indépendant de Berlin et qu’il ne lâchera pas sur ses lignes rouges, en particulier sur sa bête noire : les eurobonds. Dernière déclaration fracassante en date : sa grande interview ce lundi à l’hebdomadaire Spiegel, dont il fait la « une », en se posant, une nouvelle fois en garant de la stabilité monétaire. Sa mise en garde : les interventions massive de la BCE –le rachat de dettes- sont dangereuses (il l’a répété plusieurs fois). Elles provoquent un effet d’accoutumance, comme « une drogue » (l’expression dans sa bouche est nouvelle)

LA CAPACITE D’ACTION DE LA BCE

La Banque centrale européenne est attendue de pied ferme. Investi à l’avenir d’un rôle plus actif par le Conseil européen de fin juin, son président, Mario Draghi, a impressionné les marchés par une déclaration ferme début août. Il s’est dit prêt à frapper fort, proposant une action concertée de la BCE et du FESF (Fonds européen de stabilité financière, ndr) sur les marchés de dette. Depuis, silence radio. Les investisseurs piaffent. Les grands argentiers de Francfort disent préparer une stratégie adéquate. Mario Draghi vient d’ailleurs de renoncer à aller ce week end à Jackson Hole, le Davos américain des banquiers centraux. Réponse probable de la BCE en faveur de l’euro : le 6 septembre, lors du prochain conseil des gouverneurs.

LE VOTE INCERTAIN DES NEERLANDAIS

Le 12 septembre s’annonce décidément crucial. Outre la décision de la Cour de Karlsruhe, on attend aux Pays Bas les résultats des élections législatives anticipées. Malgré leur Triple A, les Néerlandais sont entrés en récession, ce qui a crispé ses politiques. Même le Premier ministre libéral sortant, Mark Rutte, longtemps allié indéfectible de Berlin, a montré les dents, déclarant qu’il ne donnerait pas un euro de plus aux Grecs. Au centre gauche, les travaillistes sont eux décidés à être plus coulants sur les déficits. Plus à gauche, les socialistes et leur leader, le très charismatique Emile Roemer, annoncent non seulement qu’ils refuseront d’appliquer la règle des 3% du PIB, mais aussi qu’ils rejetteront tout transfert supplémentaire de souveraineté à Bruxelles. Minoritaire, mais influent le parti populiste d’extrême droite parle, lui, de quitter l’euro.

L’EUROPHILIE VACILLANTE DES FINLANDAIS

En Finlande, pays le plus vertueux du Vieux Continent, ce n’est pas un parti extrême qui parle de sortir de l’euro, mais… le ministre des affaires étrangères ! Fort du Triple A le plus solide de l’eurozone, les Finnois ne veulent pas voir leurs efforts de rigueur de la décennie précédente partir en fumée. Déjà l’an dernier, ils avaient réclamé des garanties spéciales à Athènes pour accepter de participer au plan d’aide à la Grèce. Aujourd’hui une nouvelle expression se répand comme une trainée de poudre : le fixt, Finland exit.

LA SANTE CHANCELANTE DE L’ITALIE ET L’ESPAGNE

Les économies italienne et, surtout, espagnole sont chancelantes. Les mauvais résultats s’accumulent. C’est pour cela que le Conseil européen avait décidé des mesures d’urgence pour pallier les attaques des spéculateurs. Le pare feu tarde à se mettre en place, les aides à se débloquer. Madrid maintient l’incertitude sur son possible recours à une aide internationale, qui impliquerait le coaching d’une troïka plus ou moins light. Les marchés doutent. Ils n’ont pas oublié ce fameux 2 mars où Mariano Rajoy a revu ses efforts d’économies à la baisse, sans en avertir ses partenaires.

LES DOUTES SUR LE MAINTIEN DE LA GRECE DANS L’EUROZONE

La Grèce va-t-elle rester dans l’euro ? Les bailleurs internationaux vont-ils continuer leur programme d’aide ? Athènes va mal. Son PIB, qui devait baisser de 4,7% cette année, chutera en réalité de 7%. La semaine dernière, le nouveau Premier ministre Antonis Samaras est venu négocier un délai à des pays, Allemagne en tête, qui perdent patience face au manque de résultat des réformes. La Troïka repart cette semaine sur place pour faire un dernier état des lieux. De son rapport dépendra l’octroi de la tranche d’aide suivante, et de fait, la sortie ou non de la Grèce de la monnaie unique.

Source : http://www.challenges.fr/economie/20120829.CHA9883/7-bombes-a-desamorcer-pour-sauver-l-euro.html

Commentaires sont clos