Des visages floutés sur YouTube

L’organisation de défense des droits de l’homme Witness s’en était émue : aucun site de partage de vidéos sur internet ne permettait de flouter automatiquement les visages. Dans un pays comme la Syrie, les conséquences peuvent être dramatiques pour des personnes filmées pendant une manifestation. YouTube a réagi en ajoutant cette fonctionnalité à son éditeur de vidéo.

C’est un outil tout nouveau qui vient d’apparaître sur l’éditeur de vidéos de YouTube. En trois clics, on peut désormais flouter les visages des personnes qui apparaissent à l’écran. Attention, la techno est encore jeune et ne fait pas de miracle. Selon les conditions de tournage de la vidéo (mode d’éclairage, angle de prise de vue, etc.), l’opération peut ne pas fonctionner – sur la page de présentation de YouTube, le site conseille alors de diffuser uniquement la vidéo en mode privé…

Une alerte de l’organisation de défense des droits de l’homme Witness

Reste que l’automatisation de la fonction «flou » sur un site de partage de vidéos est une première. Et c’est loin d’être un gadget. En effet son ajout fait suite de à la publication du rapport cameras everywhere de l’organisation de défense des droits de l’homme Witness : il indiquait qu’aucun site de partage de vidéos ne permettait de préserver l’anonymat des personnes représentées sur les images.

L’exemple de la Syrie

Or dans des pays en guerre ou en proies à une grande instabilité, les vidéos que tournent les manifestants, comme preuves de leurs mobilisations, peuvent se retourner contre eux… Ainsi, Witness s’alarme qu’en Syrie, par exemple, beaucoup de gens sont identifiés et pourchassés à cause des vidéos qu’ils mettent en ligne. Witness rapporte ainsi le témoignage de Rafeeq, originaire de Homs, en Syrie, qui raconte comment beaucoup de personnes sont arrêtées non pas directement sur le lieu des manifestations, mais dans les checkpoints qui encadrent la ville. « Le gouvernement a des agents spécialement chargés de regarder les films que nous tournons pendant les manifestations et ensuite publiés sur internet, témoigne Rafeeq. L’un de mes amis a été détenu pendant une courte période de temps. Pendant qu’il était torturé, l’un de ses tortionnaires lui a demandé s’il avait participé à des manifestations contre le régime. Comme mon ami niait farouchement, on lui a fait regarder des extraits d’une vidéo où son visage était parfaitement visible ».

 

Olivier Lascar
Sciences et Avenir
24/07/12