Le prix « irréel » des paradis fiscaux
Comment ne pas faire le rapprochement ?
La semaine dernière, un nouveau scandale bancaire éclatait.
Après Goldman Sachs, JP Morgan, Barclays, UBS, c’était au tour de HSBC d’être pris dans les mailles du filet.
Une commission d’enquête du Sénat américain venait de mettre à jour dans un rapport de plus de 300 pages les agissements de la banque. Une enquête accablante : HSBC a non seulement favorisé l’évasion fiscale, mais a fermé les yeux sur des pratiques criminelles. Elle a détourné son regard du blanchiment d’argent et du trafic de drogue et d’armes au Mexique, des liens avec le terrorisme en Arabie Saoudite, ou du financement d’armes au Soudan ou en Iran.
Plus de 60 000 comptes liés à sa seule filiale mexicaine ont trouvé l’hospitalité dans les îles Caïmans. Sur 41 % de ces comptes, la banque n’avait quasiment aucune information, ne faisait aucun contrôle, en dépit des mises en garde de plusieurs responsables insistant sur les risques immenses de blanchiment d’argent de la drogue. Prise la main dans le sac, la direction de HSBC s’est déclarée « profondément bouleversée », a présenté ses excuses à ses salariés et à ses clients, renvoyé quelques lampistes, et promis de pleinement coopérer avec les autorités américaines. Une fois de plus, l’affaire risque de se terminer par une amende record, excluant toute autre peine. Et on passera à autre chose.
Dimanche, une fondation indépendante, Tax justice network, publiait dans The Observer une longue étude sur l’évasion fiscale et les paradis fiscaux. Menée par un ancien économiste en chef de MacKinsey, James S. Henry, l’étude a tenté de cerner ce « trou noir » de plus en plus important de la finance mondiale, le prix réel de l’off shore. Selon lui, tout pousse à sous-estimer l’ampleur de cette évasion fiscale. Les statistiques des diverses organisations internationales – FMI, Banque mondiale, Banque des règlements internationaux – amènent à évaluer les actifs financiers cachés dans les paradis fiscaux autour de 17 000 milliards d’euros.
D’après ses estimations, il les chiffre plutôt autour de 25 500 milliards d’euros. Cela représente plus que l’addition du PIB des États-Unis et du Japon. Et encore insiste-t-il : « Il s’agit juste de la richesse financière. Une bonne partie des actifs investis dans l’immobilier, les yachts, les écuries de courses et tant d’autres choses qui comptent pour les grandes fortunes sont détenues au travers des structures off shore qui rendent impossible l’identification de leurs propriétaires ».
Mais il est un autre chiffre encore plus éloquent : « Une analyse détaillée des 50 premières banques privées internationales révèle qu’à la fin de 2010, elles géraient collectivement plus de 15 milliards d’euros d’investissements internationaux pour le compte de clients privés, y compris à travers des trusts et des fondations », note l’étude. Contrairement à ses démentis répétés, le système bancaire international est donc bien la pierre angulaire de ce système d’évasion fiscale.
Source : http://www.mediapart.fr/journal/international/240712/le-prix-exorbitant-des-paradis-fiscaux