A ARCHIVER : « Guide du manifestant arrêté », version originale + version corrigée 2013

Guide élaboré par
le Syndicat de la Magistrature

Vous trouverez ci-joint un petit guide des droits du manifestant arrêté, élaboré à partir des formations données par le Syndicat de la Magistrature (SM) en juin et juillet aux manifestants de l’anti G8 et au collectif des intermittents du spectacle. Ces formations citoyennes s’inscrivent dans le cadre des actions de « legal team » (observatoire des libertés), que nous comptons proposer à nouveau lors du FSE.
Vous pouvez diffuser largement ce document, le mettre sur vos sites, mais nous vous demandons seulement d’y laisser le sigle « Syndicat de la Magistrature ».

QUE FAIRE LORSQU’ON EST ARRÊTÉ PAR LA POLICE LORS D’UNE MANIFESTATION?

I- LORS D’UN CONTRÔLE D’IDENTITÉ

VOS DROITS

Si vous êtes de nationalité française, vous pouvez établir votre identité par tout moyen, il n’est pas obligatoire d’avoir sur vous une pièce d’identité

Si vous êtes de nationalité étrangère, vous devez, en principe, toujours avoir avec vous le titre ou les documents vous autorisant à circuler ou à séjourner en France (une carte de séjour, un passeport avec un visa datant de moins de 3 mois , un récépissé de demande de titre de séjour ou encore une convocation à la préfecture etc..)
En effet, la police peut à tout moment, contrôler la régularité de leur séjour en France des étrangers.
Les mineurs étrangers peuvent prouver par tout moyen leur identité. Ils sont inexpulsables du territoire français.

Les motifs du contrôle d’identité :

art 78-2 du code de procédure pénale : outre les contrôles spécifiques des étrangers, les forces de l’ordre peuvent contrôler votre identité s’il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’une personne a commis ou a tenté de commettre une infraction, se prépare à commettre un crime ou un délit, ou est susceptible de fournir des renseignements sur une enquête pénale en cours, ou fait l’objet de recherches judiciaires.
Mais le Procureur peut aussi requérir des contrôles d’identité pour les infractions qu’il précise (recherches de stupéfiants, ports d’armes…). Enfin l’identité peut être contrôlée pour  » prévenir une atteinte à l’ordre public »

Les motifs du contrôle sont donc très larges, mais ils doivent répondre à l’un de ces critères, sous peine de nullité du contrôle. Par exemple, le fait de porter un autocollant (ou une banderole), avec un sigle syndical ou associatif, ou une inscription licite quelconque, ne justifie en aucun cas un contrôle d’identité. La police n’a pas le droit de vous demander de retirer l’autocollant, car c’est une atteinte à la liberté d’expression. Autre exemple: vous avez le droit de photographier ou de filmer une manifestation, et rien n’interdit de filmer les policiers dans des lieux publics. Ils n’ont pas le droit de confisquer votre matériel ou le film.

La rétention en vue de vérifier votre identité (art 78-3 du code de procédure pénale):
Si vous n’avez pas de preuve de votre identité, vous pouvez être retenu par la police qui souhaite vérifier votre identité pendant 4 heures maximum à partir de début du contrôle.
Ne tentez pas de vous soustraire par la force à un contrôle d’identité, c’est un délit de rébellion. Restez toujours calme et poli.

CONSEILS pour les contrôles d’identité

Vous avez le droit de faire aviser le procureur de la république de votre rétention. Si vous êtes mineur, le procureur de la République doit être informé dès le début de la rétention. Exercez le droit de faire prévenir le procureur

Une copie du procès-verbal de contrôle d’identité doit vous être remise après 4h, (s’il n’y a pas de garde à vue à la suite) -Exigez-ce document.
Vous avez le droit de prévenir votre famille ou toute personne de votre choix. Si vous êtes mineur, vous devez être assisté par votre représentant légal.

Si les policiers sont agressifs lors d’un contrôle d’identité, restez polis, ne les tutoyez pas, même s’ils vous tutoient, ne faites aucun geste violent à leur égard, car cela peut entraîner des procédure d’outrage ou de rébellion, ou de violences sur personne dépositaire de l’autorité publique; des peines d’emprisonnement sont encourues et vous pouvez être jugés en comparution immédiate (flagrants délits). Prenez les coordonnées de toutes les personnes qui peuvent témoigner de la scène. Si vous êtes emmenés au commissariat, demandez à tout témoin de prévenir vos proches ou un avocat.

Si vous refusez de collaborer à la vérification de votre identité (en faisant des déclarations manifestement fausses, par exemple), vos empreintes et une photo peuvent être prises. Et si vous refusez de vous soumettre à cette mesure, vous pouvez être punis de 3 mois de prison et 3750 euros d’amende (art 78 -5 du CPP)

Avant de signer un procès-verbal, relisez-le attentivement.
Si vous n’êtes pas d’accord avec le contenu des procès-verbaux, vous pouvez refuser de les signer (documents rédigés par les policiers et décrivant l’interpellation ou la vérification d’identité). Si vous estimez que le procès-verbal contient des erreurs ou des imprécisions, vous devez demander au policier qui l’a tapé de le rectifier; s’il refuse, vous pouvez vous-même faire des ajouts manuscrits à la fin du procès-verbal, suivis de votre signature.
Lors de l’interpellation, la police peut seulement accomplir sur vous une palpation de sécurité. Il s’agit d’une recherche extérieure, à travers les vêtements, d’objets dangereux pour la sécurité du porteur ou d’autrui… Cela ne peut en aucun cas consister en des attouchements ou une fouille à corps.
Ayez toujours les coordonnées d’un ou plusieurs avocats sur vous

II- LORS D’UNE GARDE A VUE

Un officier de police peut décider de vous retenir au poste 48 heures maximum s’il soupçonne que vous avez commis ou tenté de commettre une infraction.
Si la garde à vue fait suite à un contrôle d’identité, la durée de la garde à vue (48h)se calcule à partir de l’heure de votre interpellation par la police (les 4 h de rétention pour le contrôle d’identité incluses). Vous devez être immédiatement informé de vos droits dans une langue que vous comprenez (art 63-1 du CPP). Si l’interprète ne peut se déplacer , cela se fera par les moyens de télécommunications autorisés.

VOS DROITS

Dès le début de la garde à vue, le procureur doit être informé par l’officier de police judiciaire de votre placement en garde à vue.

Vous pouvez être retenu au maximum 48h (96h lorsque des stupéfiants sont en cause, selon l’art 63-1 du CPP). La prolongation d’une garde à vue de 24h à 48h doit être autorisée par le procureur. Un mineur ne peut être retenu que 24h ( s’il a plus de 13 ans).
Vous avez le droit de savoir quelle infraction vous est reprochée Vous devez demander que ce soit écrit sur le procès-verbal.
Vous avez le droit de voir un avocat que vous avez choisi ou un avocat qui est mis à votre disposition si vous n’en connaissez pas.

Lorsque vous participez à une manifestation, ayez toujours sur vous les coordonnées d’un ou plusieurs avocats. Vous devez rencontrer votre avocat immédiatement au début de la garde à vue et à la 20e heure (72e heure en cas de stupéfiants), pendant 30 mn de manière confidentielle (art 63-4 du CPP). En cas de prolongation de la garde à vue au delà de 24h, autorisée par le procureur vous pouvez encore voir l’avocat à la 36e heure.

Dès le début de la garde à vue « sans délai » , vous pouvez faire prévenir, par l’intermédiaire d’un policier, par téléphone, un proche (la personne avec qui vous vivez habituellement, l’un de vos parents, l’un de vos frère ou soeur, un ami, votre employeur, etc…. (art 63-2 du CPP).

A tout moment lors de la garde à vue, à votre demande ou à celle d’un membre de la famille, vous avez le droit de demander d’être examiné par un médecin qui vient sans délai. Après 24h de garde à vue, vous avez le droit de demander une seconde fois à voir un médecin. Si vous avez moins de 16 ans, un médecin est désigné dès le début de la garde à vue pour vous examiner.
Lorsque l’infraction concerne les stupéfiants, un médecin doit vous examiner dès la première heure de garde à vue, puis toutes les 24h, en plus des examens que vous pouvez personnellement demander, durant la garde à vue qui peut ici durer 96h.

Il est possible que vous subissiez une fouille à corps afin de rechercher des indices en rapport avec l’infraction flagrante qui vous est reprochée. Il s’agit alors non seulement de fouiller vos vêtements mais aussi l’intérieur de votre corps. Mais la fouille à corps ne peut être effectuée que par un policier de même sexe que vous.

CONSEILS LORS DES GARDES À VUE

Relisez très attentivement le procès verbal
Vous pouvez choisir de vous taire lors des interrogatoires. Attendez d’avoir demandé conseil à votre avocat avant de répondre aux questions posées par les policiers.

Vous pouvez refuser de signer le procès-verbal (documents décrivant les conditions de garde à vue et des auditions). Si vous n’êtes pas sûr de son contenu, mieux vaut ne pas le signer ou ajouter vous-même des précisions à la fin du document, avant de le signer.

Ayez toujours les coordonnées d’un ou plusieurs avocats sur vous, avant de partir en manif.
Si vous n’avez pas les moyens de payer les frais d’un avocat, vous pouvez demander à l’état français de prendre en charge totalement ou partiellement ces frais selon le montant de vos revenus mensuels. C’est l’aide juridictionnelle.

Les policiers n’ont pas le droit de vous faire subir des violences, ni physiques, ni morales (art 222-13 du CP et article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme. Si vous subissez des violences (coups, insultes, humiliations, refus de repas) parlez en à votre avocat et demandez un examen médical afin que ces violences soient constatées dans un établissement hospitalier et qu’un certificat médical précisant la durée de l’arrêt de travail soit établi.
La solution la plus efficace est de porter plainte devant un juge d’instruction avec constitution de partie civile. Une somme d’argent vous sera demandée à titre de consignation, sauf si vous avez l’aide juridictionnelle.
Si des violences contre des biens ou des personnes vous sont reprochées, il est très important d’avoir pris les coordonnées des personnes pouvant témoigner en votre faveur.

Avant de manifester, ayez sur vous des petits papiers où vous avez écrit votre nom et votre téléphone, pour pouvoir les distribuer en urgence aux témoins, au moment où la police vous emmène, et tâchez de prendre les coordonnées des témoins.

Vous avez des droits que les policiers ne peuvent vous refuser, comme ceux de voir un interprète, un avocat , un médecin. S’ils vous ont été refusés, faites noter sur le procès-verbal que vous les avez demandés ou bien noter le vous-même avant de le signer.

Parlez en impérativement à votre avocat, car le non respect de vos droits rend toute la procédure nulle.
Si les policiers vous ont dit que vous figuriez sur le STIC (système de traitement des infractions constatées), il s’agit d’un fichier de police (ou de gendarmerie) sur lequel sont inscrites des personnes « mises en cause » dans une précédente procédure (sans pour autant avoir été condamnée).

Demandez aux policiers de vous lire les mentions du fichier qui vous concernent, et si vous n’êtes pas d’accord, vous pouvez écrire au Procureur de la République pour faire rectifier ou effacer ces informations.

III- LORS D’UNE COMPARUTION IMMÉDIATE

La comparution immédiate est une procédure qui permet de faire juger quelqu’un à la suite de la garde à vue devant le tribunal correctionnel. C’est le procureur qui décide si on vous juge immédiatement, ou si on vous relâche pendant la garde à vue, ou à la fin de la garde à vue: en ce cas la police peut vous remettre une convocation devant le tribunal, avec une date d’audience.
Le procureur peut aussi décider de vous faire juger le jour-même, en « comparution immédiate », si vous risquez une peine de prison égale ou supérieure à 6 mois, c’est à dire pour la plupart des délits commis lors d’une manifestation.

Voici quelques exemples justifiant un jugement immédiat:

lorsque vos êtes étranger en situation irrégulière,

ou en cas de dégradations lors d’une manifestation,

ou d’outrage et rébellion ou de violences envers la police (ou de menaces verbales de violences),

en cas de vol, de mendicité avec un chien « dangereux »,

d’occupation d’un squat, d’outrage au drapeau ou à l’hymne national,

ou si vous êtes sous le coup d’une interdiction du territoire, d’un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière ou d’une mesure d’expulsion.

Mais en cas de « racolage passif »(et si vous n’êtes pas aussi en situation irrégulière), ou d’entrave à la circulation dans un hall d’immeuble, seuls deux mois de prison sont encourus et la comparution immédiate est donc impossible.

CONSEIL TRÈS IMPORTANT:

Vous avez le droit de refuser d’être jugé le jour-même lorsque le juge vous demande si vous acceptez la comparution immédiate (art 397 du CPP). Mais vous risquez d’aller en prison pendant 2 à 6 semaines en attendant. Parlez en à votre avocat. Le risque d’aller en prison en attendant d’être jugé, même si vous avez une famille ou un travail est réel. Attention!
Devant le tribunal soyez calme et poli. Ecoutez les conseils de votre avocat, dont la présence est obligatoire, sur l’attitude à avoir et surtout sur les déclarations à faire au juge.
Vous avez le droit de faire appel contre la décision du juge qui vous condamne.
Vous pouvez demander l’aide juridictionnelle pour payer les frais d’avocat et les frais de justice, si vos revenus sont très faibles (en gros, inférieurs au SMIC).

IV- LORS D’UNE RÉTENTION ADMINISTRATIVE D’UN ÉTRANGER

Si vous êtes étrangers en situation irrégulière, le préfet peut décider de vous reconduire à la frontière. Dans ce cas, le préfet peut vous placer en rétention administrative pendant 48h pour préparer votre renvoi. Au delà de ces 48h , vous pouvez être maintenu en rétention pendant encore 10 jours au maximum sur décision du juge des libertés (2 fois 10 jours), soit 12 jours dans un centre de rétention au total.
Si vous êtes demandeur d’asile, retenu par la police (4 jours) à l’entrée du territoire français, vous pouvez être ensuite placé en rétention pendant 16 jours sur décision du juge, soit 20 jours au total en rétention.

VOS DROITS

Vous devez être informés de vos droits dès le début de votre rétention dans une langue que vous comprenez.
Vous avez le droit de faire un recours contre la décision de reconduite à la frontière mais le recours n’est pas suspensif (vous restez en rétention)
Vous avez le droit de demander l’assistance d’un médecin.
Vous avez le droit de demander l’assistance d’un avocat.
Vous avez le droit de demander l’assistance d’un interprète.
Vous pouvez communiquez avec votre consulat et avec une personne de votre choix.
Vous avez le droit de faire appel contre la décision du juge de prolonger la durée de votre rétention.
Comme en garde à vue , vous devez être bien traité en rétention (ne subir aucune violence ni physique, ni morale).

CONSEILS LORS DE LA RETENTION D’UN ETRANGER

Une association, la CIMADE se trouve sur certains lieux de rétention afin de pouvoir vous aider, notamment à contester la décision de reconduite à la frontière. Demandez à la rencontrer au plus vite (Siège : 01 45 55 15 77)
Pour une information sur les droits des étrangers,
contacter aussi le GISTI (01 43 14 84 89) ou l’ANAFE (01 42 08 69 93)

V – LORS DE LA FOUILLE D’UN VEHICULE

Sauf lorsqu’il s’agit d’un véhicule d’habitation (caravanes), la police peut fouiller un véhicule y compris le coffre, si elle a des « raisons plausibles de soupçonner qu’un crime ou un délit flagrant a été commis par l’un des occupants.
La police peut aussi immobiliser un véhicule pendant 30mn et le fouiller avec l’accord du conducteur (ou à défaut le procureur) »pour prévenir d’une atteinte grave à la sécurité des personnes et des biens »

VI – LES VIGILES

Sur arrêté du préfet, dans les lieux et à des dates précisées dans cet arrêté, les vigiles peuvent procéder à des palpations de sécurité (donc sur les vêtements), en cas de menaces graves pour la sécurité publique. Ces palpations sont faites par une personne du même sexe que l’intéressé.
Les vigiles peuvent aussi faire ouvrir un sac à main, et ne peuvent le fouiller qu’avec le consentement de la personne.

Syndicat de la Magistrature, juillet 2003

SOURCE : http://bulletindestravailleurs.over-blog.com/article-1894684.html

  LA VERSION QUE NOUS VOUS DONNONS EST LA PREMIÈRE MOUTURE. Une version 2013 est accessible ici sur le site du Syndicat de la Magistrature

ÉDITO du site

En avril 2005, alors que le pouvoir s’était installé dans une frénésie législative et policière ayant pour conséquence, et parfois pour finalité, la répression de nombreuses formes d’expression collective, le Syndicat de la magistrature, fidèle à sa tradition d’accompagnement des luttes et des revendications du mouvement social, rédigeait son premier «Guide du manifestant arrêté».

Les années qui ont suivi, marquées par une pénalisation toujours accrue de toutes les formes de mobilisation (décret « anti-cagoules », loi contre les «bandes»…), ont justifié une première mise à jour de ce guide en décembre 2009.

Puis il y eut l’alternance…

Mais l’arsenal répressif est toujours en place même si, sous la pression de la jurisprudence européenne puis nationale, une loi du 14 avril 2011 encadre désormais plus strictement les conditions de placement en garde à vue et renforce les droits des personnes qui la subissent.

Et les premiers mois de la gauche sécuritaire décomplexée, aux manettes place Beauvau, ne laissent guère augurer un changement sur le terrain. En témoigne l’interpellation à Marseille le 17 août dernier – sur le fondement du décret «anti-cagoules» du précédent gouvernement – de plusieurs manifestants défilant sous des masques de carnaval pour protester contre la condamnation des «Pussy Riot » en Russie…

La réédition actualisée du «Guide du manifestant arrêté» était donc nécessaire.

Rappelons cependant que le présent guide n’a pas vocation à se substituer aux conseils des professionnels du droit intervenant dans le cadre de la procédure pénale. Il n’a d’autre ambition que d’exposer les droits et devoirs des citoyens et de la puissance publique dans l’une des expressions majeures de la démocratie que constitue la manifestation.

GUIDE A TÉLÉCHARGER EN PDF : http://guidedumanifestant.org/Guide%20du%20manifestant%20-%202013.pdf

Sur cette page également quelques autres liens utiles :

http://guidedumanifestant.org/