FMI, UE, Bâle : les comptes bancaires plus que jamais menacés

Doit-on revenir au bon vieux système des tirelires ou des boites à biscuit en fer ? A lire l’article, ça semble plus sûr !

À quoi jouent les banques et les États ? Voici quatre nouvelles concomitantes qui doivent alerter tous ceux qui placent encore leur confiance dans le système bancaire européen.

Premièrement l’adoption de la directive européenne pour ponctionner les comptes des épargnants en cas de faillite bancaire et qui entrera en vigueur le 1er janvier 2016 (nous en avons parlé le 18 décembre dernier).

Deuxièmement, la semaine dernière, le FMI revient à la charge sur la ponction des comptes bancaires, sur l’idée d’une taxe généralisée sur l’épargne afin de réduire la dette publique, et que l’institution avait déjà évoquée (nous en avions parlé le 16 octobre dernier). Cette fois le FMI convoque le célèbre duo d’économistes de Harvard, Carmen Reinhart et Kenneth Rogoff, pour expliquer que la dette publique atteint des sommets depuis 200 ans et qu’il va inévitablement falloir recourir à un cocktail mélangeant restructurations, défauts et inflation…

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L’expression de ces menaces encouragent-elles au moins les banques à modérer leurs prises de risque ? Le Comité de Bâle, chargé d’écrire les normes prudentielles du système bancaire européen, durcit-il sa position pour éviter, autant que faire se peut, d’en arriver à de telles extrémités ? Même pas car, c’est la troisième information, qui date de lundi : les banques ont obtenu d’assouplir leur ratio d’effet de levier qui entrera en vigueur en janvier 2018.

De quoi parle-t-on ? Non pas du ratio pondéré, dont on a l’habitude, et qui était de l’ordre de 7 à 10% (pondéré c’est-à-dire que la dette d’un Etat noté AAA comptait pour zéro parce que supposée sans risque…), mais d’un ratio « sec » dans lequel on prend en compte l’ensemble des actifs de la banque sans se poser la question de leur niveau de risque (de toute façon toujours difficile à mesurer). Un ratio plus prudent en quelque sorte. Et il devait être de 3%.

3% ce n’est déjà pas fameux, c’est même carrément dangereux : cela veut dire qu’une banque peut prendre 33 euros d’engagements pour 1 euro de liquidité… Si ces engagements (bons d’Etat, crédit aux entreprises et aux particuliers, portefeuille d’actions, produits dérivés) perdent 3% de leur valeur, les fonds propres sont engloutis et la banque se retrouve en faillite. On rappelle que Lehman Brothers avait un levier de 1/30 au moment de sa disparition.

Eh bien 3% c’est encore trop pour les grandes banques européennes et elles viennent justement d’obtenir des assouplissements de cette règle ! Ils consistent essentiellement en des aménagements techniques permettant de prendre en compte des positions nettes et non pas brutes, des niveaux de pertes maximales et non pas l’encours total. On nage vraiment dans le grand n’importe quoi, dans l’irresponsabilité totale !

Mais c’est vrai, pourquoi s’en faire, pourquoi s’inquiéter, pourquoi devenir prudent si en cas de faillite bancaire les banques et les Etats peuvent se servir directement dans les comptes des épargnants ? Et pour être certains que la population n’aura même pas le temps de protester, la procédure va être considérablement accélérée, c’est la quatrième et dernière nouvelle. Sabine Lautenschläger, vice-présidente de la Bundesbank et candidate allemande au remplacement de son compatriote Jörg Asmussen au directoire de la BCE, a déclaré lundi que la zone euro doit être capable de définir en l’espace d’un week-end un plan de refinancement et de restructuration d’une banque en difficulté. Un week-end. La banque, dans laquelle le gouvernement incitait chacun à garder sa confiance, est subitement déclarée en faillite le vendredi soir, et le lundi matin votre compte est siphonné de 50%. Simple, propre, efficace. On n’arrête pas le progrès.

Philippe Herlin – Chercheur en finance et chargé de cours au Conservatoire National des Arts et Métiers à Paris / Membre de l’équipe rédactionnelle de Goldbroker.com

SOURCE : http://www.informaction.info