Passager 120 : Le syndrome d’hypnose capitaliste (fin)

Il m’a été demandé à quoi servait cet article. Que c’était encore une fois, une manière de pisser dans un violon pour ne pas se sortir les doigts du …. Comme si nous n’avions pas assez dit, écrit, alerter au sujet de l’état de ce monde …  Oui et Non.

Oui, pour certains qui me sont rentrés dedans au galop avec l’intelligence d’un campagnol à qui on parlerait de maîtrise des naissances en plein pic de population. Le tout parce qu’ils avaient l’impression que je me foutais de leur gueule et servait du réchauffé au lieu de proposer des solutions, du concret, du constructif, oubliant un peu vite que si leur pomme avait un tant soit peu cru comprendre quelque chose à ce monde (ce qui demande conformation au regard de ce qu’ils écrivent), il y avait encore foule béate au balcon de l’Apocalypse. C’est vrai que c’est très constructif les insultes anonymes, désolé si moi aussi je rentre dedans mais au moins je l’assume et j’assume ma réactivité passagère ! Et ils sont où d’ailleurs ceux-là qui critiquent mais ne prennent pas le temps de participer activement, je les attends et pas pour régler des comptes, non ! j’ai passé ce cap enfantin, je préfère faire de mon mieux et essayer de semer des graines dans les esprits et essayer de répondre au défit de la connaissance de ce monde. Oui, parce que celui qui se serait donné la peine de faire la synthèse de tout ce qui a été publié ici a effectivement nul besoin de cet article.

Non, car il reste l’immensité des gens qui ont encore la tête dans le sable et qui, pour l’instant, dirigent le bateau humanité à notre place. Les « roumégueurs » n’avaient qu’à aller au bout de cet article qui se conclut justement par des propositions concrètes de la part de quelqu’un qui les applique, tout comme les Brindherbes ont chacun à leur manière fait leur révolution intérieure au cours des cinq dernières années. Non, car cet article permet à mon sens de mieux comprendre notre situation collective en peu de mots et prends bien moins de temps que les milliers d’articles et d’heures passées devant un écran. Et donc de commencer à pouvoir répondre efficacement à cette situation au lieu de brasser du vent à des révolutions et réactions égotiques et naïves et croire que l’on peut changer les autres en gueulant le plus fort.

Les gens ne se changent que eux-mêmes, pour peu qu’ils sachent entendre les messagers que leur envoie la Vie. Les Brindherbes essaient de faire partie de ces messagers modestement et sans être parfaits. Tout changement imposé produit un déséquilibre et donc une rébellion face au changement, source interminable de conflits. Toute personne qui a eu charge d’éduquer au moins un enfant a eu l’occasion de se rendre compte. Pour ma part, il en a fallu trois mais le message a fini par être entendu. On ne peut répondre efficacement à un problème sans en avoir perçu la racine. Cause – Conséquence.

Savoir – Comprendre – Connaître. Maîtriser ce triptyque et sa signification profonde est essentiel pour éviter de courir le monde à l’aveuglette, d’être un instrument mécanique de la Vie, un Don Quichotte, sauveur de l’humanité récalcitrante. Il évite de mettre des pansements sur des jambes de bois, de vacciner là où il faudrait apprendre à connaître son corps, son esprit et son environnement.

Alors commençons-nous à avoir une idée de ce qu’est réellement le non-agir qui est en fait le geste, la parole juste au moment juste.

Voici donc la fin de l’article de Matthias Jullien, merci à lui pour ses écrits ! Et merci à Meaitch pour sa relecture et ses suggestions. Une belle preuve de collaboration totalement improbable et imprévue, une vraie réussite !


L’hypnose capitaliste se vit seule, car elle est indexée sur notre horloge intime et se déclenche soudainement lorsque c’est l’heure de comprendre, l’heure de l’hébétement et de la panique, l’heure de se réfugier à l’intérieur de soi-même faute de refuge à l’extérieur dans un monde où l’humanité disparaît pour ne laisser place qu’aux vainqueurs du jour, futurs battus de demain à coup sûr, d’un champ de bataille devenu planétaire.

Ceux qui ont été touché par l’hypnose des batailles ont-ils décidé de ce que seront dorénavant les futures batailles ?

Ceux qui ont été touchés par l’hypnose capitaliste ont-ils décidé de ce que sera dorénavant la vie sur Terre ?

Qui décide la norme ? Qui orchestre la promesse de cet avenir radieux de plaisirs empoisonnés ?

Nous alimentons le champ de bataille tout en parlant de la paix, nous qui détruisons la Terre en parlant d’écologie, nous qui nous aliénons au travail en parlant d’épanouissement, qui possédons la conscience et qui pourtant vivons en dehors de sa révélation.

Pour sortir de l’hypnose il faudra sortir de la norme et accepter la solitude des possibles, l’incongruité créative, la possibilité collective, le sourire et la joie véritable en lieu et place de la promesse factice et argentée d’un avenir radieux si destructeur.

Pour sortie de l’hypnose il faudra voir et comprendre les plaies infligées à la Terre ainsi qu’à nous-mêmes.

Pour sortir de l’hypnose il sera question de cesser d’obéir à la norme pour s’aligner avant tout sur ses choix intimes, se lier à son destin personnel et collectif en conscience dans le respect des autres, de la nature et de la vie. Inventer une nouvelle culture commune où la vie et son expansion sous toutes ses formes sera centrale.

Bien sûr nous pouvons nous détourner de la vie encore quelques temps, en nous laissant porter par la douce lueur de nos divertissants écrans, mais nous multiplierons alors le nombre de celles et ceux qui viendront à leur heure, à être violemment emportés par la déshérence de l’hypnose capitaliste. Car le champ de bataille ne cesse de s’étendre, l’extraction, l’extension technique ; les réseaux repoussent en s’accélérant ce qu’il nous reste de vie et de liberté sur cette Terre et bientôt viendra le temps de rentrer en soi pour y chercher refuge, pour chercher désespérément un lieu de paix et de sécurité pour pouvoir exister quelque part, exister sans la norme, exister à soi, exister dans l’amour lorsque l’amour aura déserté la norme pour ne laisser que des champs de batailles mille fois retournés à la quête obsessionnelle d’une dernière once de pouvoir, ou d’extraire quel qu’en soit le prix une dernière once de matière profitable sous les ongles technophiles des derniers aliénés obéissants, les derniers soldats du capitalisme.

 

Quittons l’hypnose des écrans, désertons devant l’hypnose capitaliste qui nous est promise. Quittons la norme avec la joie et le sourire en laissant le champ de bataille de la guerre économique pour revenir à l’essentiel, à la simplicité de l’existence en phase avec la vie biologique et organique.

Laissons les objets de consommation et les objets techniques sur les étagères, car nous abandonnons la norme, le travail capitaliste, l’extractivisme, la pollution et les déchets qui nous sont vendus dans le même temps de façon culturellement immorale et décomplexée.

Vivons de peu, ensemble et avec joie. En quittant le champ de bataille, en se détournant de la norme car tout est à inventer. Alors faisons cela en toute simplicité en nous méfiant des solutions techniques qui bien souvent ne sont que des pollutions à la fabrication, à l’usage ainsi que de futurs déchets inextricables et revenons à nos capacités humaines en confiance et en harmonie avec le vivant.

L’hypnose des batailles comme celle du capitalisme font suite à une hypnose culturelle collective insensée, douce et lente, orchestrée par les politiques, les médias et nous-mêmes. C’est une fabrication culturelle à l’origine, possédant un choix et une orientation. Une sorte de mimétisme collectif organisant une norme qui devient dogme, une quasi religion impossible à remettre en question. Que reste-t-il de l’humain au sein d’un tel processus collectif organisé autour de la guerre, de l’aliénation et des déprédations.

Alors que l’hypnose des batailles ne touchait que quelques soldats au cœur de l’épouvante, gardons en tête que les autres, la majorité, continuaient le combat.

Il en est de même pour l’hypnose capitaliste. Ceux qui en sont touchés ont une conscience et une fragilité que les autres, majoritaires et toujours croyants, n’ont pas. La croyance capitaliste, collective, suicidaire et absurde pourra donc perdurer jusqu’à la fin.

Pourtant ce qu’il faut bien comprendre maintenant c’est que les dogmes et obsessions humaines n’auront bientôt plus cours. Que l’activité et la folie des hommes ne tournent plus maintenant sur elles-mêmes comme en 14-18. L’histoire de l’humanité ne s’écrit plus uniquement entre humains au travers de la guerre, avec des obus ou de l’argent.

Non, le temps actuel est un temps nouveau et inédit pour l’humanité ou la guerre économique des hommes a appelé un combattant bien plus fort que lui et que sa culture. Ce combattant pourra tout effacer de lui un jour de grand déséquilibre et le ramener à l’état d’animal errant pour partager ce qu’il refuse de réaliser, la vie tout simplement.

La Terre ne pourra supporter encore bien longtemps la guerre que nous lui faisons et qui prend maintenant un tour tragique. Les déséquilibres réels dans la biosphère, dans l’eau et dans l’air ne sont pas des spectacles de divertissement pour nos écrans et nos consciences consuméristes. Il est question de notre cadre de vie, le cadre réel de nos existences au moment où nous quittons les écrans des yeux pour vivre pour de vrai.

Sur le champ de bataille les soldats sont liés à des croyances que d’autres ont forgées, ces autres humains qui dirigent existent pour forcer la marche et faire obéir jusqu’au néant, jusqu’à la limite du supportable, jusqu’à l’hypnose des batailles.

La bataille contre la nature est d’un autre ordre, car c’est la nature en dernier recours qui forme les ordres, et ses ordres sont les mêmes depuis toujours, ceux qui permettent à la vie de demeurer et de se répandre depuis la nuit des temps. Qui peut discuter devant la vague de 10 mètres de haut ? Pas même une centrale nucléaire…

Qui peut parlementer avec des vents de 200km/h ? À quoi sert-il de voter si la couche atmosphérique est trop fine pour nous protéger du soleil durablement, nous promettant un cancer de la peau mondial ou des rayonnements que nos organes internes ne pourraient supporter ? Quel aveuglement absurde.

 

Les soldats qui subissent l’hypnose des batailles et ceux qui continuent à se battre sans comprendre, peuvent-ils négocier avec un ouragan qui leur tomberait dessus ? Les seules réalités et obsessions humaines n’auront bientôt plus cours sur cette Terre.

Tout n’est pas spectacle et la réalité de la vie existe en-dehors de la culture hypnotique des hommes.

Peut-être faudra-il entendre le message de la vie avant la dernière bataille qui s’annonce. Et qui la verra gagner dans le moment le plus épouvantable de l’humanité, dans sa chair. Mais elle sera libérée, dans son esprit, des obsessions qui la font se détruire et détruire le monde vivant.’

Après des milliers d’années d’évolution, l’humanité s’apprête à quitter l’histoire en une petite centaine d’années à peine. Le ridicule existe, nous vivons en son cœur et c’est le capitalisme technologique qui en écrit le dictionnaire abominable et créatif.

Enfin et pour finir, je voudrais évoquer le fantasme ultime de ceux qui ont depuis toujours la responsabilité des batailles à travers l’histoire et de leurs conséquences. Ceux qui sont à la source du capitalisme guerrier contemporain et qui sont aujourd’hui bien informés sur la fin de l’histoire.

Car ce sont eux qui fondent la culture commune puisqu’ils ont tous les moyens techniques et médiatiques pour forger les nouvelles valeurs mimétiques, la nouvelle inconscience collective, le nouvel aveuglement qui leur est profitable.

Seulement cette élite est mortelle et respire la même eau, le même air et vit sur la même terre qu’elle s’évertue à détruire pour augmenter son pouvoir, son contrôle sur le niveau d’aliénation collectif.

Ces personnes surpuissantes et immensément riches forment le symbole monstrueux et hypertrophié du capitalisme. Elles sont les inventrices de la croyance dogmatique dans la science et la technique pour un soi-disant avenir radieux qui forme des montagnes de déchets ingérables. Nous savons maintenant ce qu’il en est de l’avenir qui se prépare.

Projetons le nouveau champ de bataille et que voyons-nous ? Des robots, mais pour se battre contre qui ? Contre d’autres robots ? Pour finir immanquablement à nouveau dans la boucherie commune faute de robot.

Pourtant la question à résoudre depuis la nuit des temps reste inchangée : Pourquoi donc s’entre-tuer ? Car la destruction de la planète ou de l’humanité reste profitable. Faut-il en rire tant c’est amoral et cynique ?

La bataille économique prend la même tournure, et sur le champ de bataille les robots sont entrés. Les usines robotisées rivalisent pour gagner en vitesse, en productivité, mais pour quoi faire s’il n’y a plus de clients ? Les clients étant ceux-là même qui travaillaient pour gagner de quoi consommer comme Ford l’avait bien compris.

La question que nous devrions donc tous nous poser est : Pourquoi et pour qui travaillons-nous ? Le microcosme élitiste mondial a-t-il encore besoin de travailleurs finalement ? Probablement que non, les robots suffiront.

Enfin, puisque rien n’arrête la destruction par la technique de notre planète et de notre humanité, tout le monde sera en danger assez rapidement maintenant pour simplement se maintenir en vie ou manger à sa faim.

Voici donc que l’élite capitaliste sort son dernier joker, et pas des moindres, résultat de la fusion entre l’humain et la technologie, voici donc le transhumain.

 

Une incroyable fuite en avant, actant la fin de l’humanité prête à son autodestruction, pendant qu’une poignée d’humains bricolent la génétique et la technique pour respirer l’irrespirable, pour boire l’imbuvable et manger l’immangeable qu’ils produisent à l’échelle planétaire.

À défaut de supporter la vie plus longtemps les transhumains inventent la non-vie de demain sur une planète humainement invivable mais transhumainement supportable.

J’aimerais dire à cette élite qui depuis toujours a perdu l’entendement et qui possède maintenant les moyens du délire parfait à l’échelle du monde que leur hypothèse ne fonctionnera pas pour les mêmes raisons que la guerre contre la nature ne fonctionne pas. Les transhumains sont à l’image des OGM, un délire dangereux.

L’erreur humaine est toujours la même depuis la nuit des temps lorsque l’homme veut se faire Dieu en concentrant les pouvoirs, l’argent, la technologie. Autant dire tous les attributs de la guerre.

La chronologie historique répète inlassablement le même cycle délirant, seule l’échelle de grandeur vient à s’accroître inexorablement avec des conséquences de plus en plus difficiles à calculer, pour arriver à notre époque actuelle, c’est à dire un délire entropique d’échelle planétaire qui nous condamne rapidement à la conscience et à l’action fondamentale en faveur de la vie.

Car à l’échelle contemporaine l’hypnose des batailles, ou l’hypnose capitaliste ne sont même plus de mise tant l’enjeu nous dépasse tous. Car l’heure est venue de former une nouvelle culture collective débarrassée de la guerre, de la technique et du pouvoir autoritaire pour entrer en phase avec la vie pendant que celle-ci nous appelle encore à elle et avant qu’elle nous repousse définitivement et fasse taire notre délire mégalomaniaque planétaire et transhumaniste, au travers de chocs ingérables et impossibles à contrecarrer.

Mes lectures me démontrent malheureusement qu’à travers le temps, de grands penseurs ont vu venir l’époque actuelle bien avant l’heure : présentant le tableau, mettant en garde, avertissant mille fois à la lumière de leurs intelligences visionnaires.

Et je suis au regret de vous dire que ces hommes n’ont éclairés de leur vivant que ceux qui ont pris leur place pour poursuivre l’alerte. Depuis plus de cent ans maintenant l’alerte retentit de plus en plus fort mais rien n’y fait. La trajectoire de nos sociétés collectives délirantes reste invariablement inchangée. Aussi je ne me fais aucune illusion sur la portée de ce texte qui synthétise et développe cette notion nouvelle “d’hypnose capitaliste”. Ce que j’écris viendra au mieux égayer quelques temps le spectacle permanent alimenté sur les écrans. Ce texte n’est que l’écho de temps plus anciens qui ne parvient pas à l’oreille du monde.

Et pourtant il est question d’un champ de bataille bien réel sur lequel nous sommes tous de gré ou de force, volontairement ou à notre corps défendant. L’enjeu collectif est d’une telle dimension que je peux comprendre qu’on puisse se sentir désemparé dans la prise de conscience de notre trajectoire actuelle.

Que faire ? À défaut d’une œuvre politique collective, d’une nouvelle culture inspirée et reliée à la vie qui viendrait en lieu et place du capitalisme, il nous reste la possibilité de ne plus participer personnellement à la méga-machine industrielle et technologique. Politiquement on voit que les élections se font souvent avec moins de 40% de votants sans compter ceux qui ne sont même pas inscrits sur les listes électorales. La désertion a déjà commencé politiquement sans que cela change la réalité puisque qu’il n’y a pas d’alternative culturellement autre que le capitalisme. Nous avons donc le choix entre capitalisme rouge, vert, bleu ciel ou encore bleu foncé… Qui oserait politiquement parler d’arrêter la méga-machine industrielle pour développer un nouvel art de vivre ensemble dans la simplicité ? Le train est lancé et c’est un TGV, à chacun d’imaginer un monde sans croissance avec plus d’équité. Courage.

Refusons de consommer, refusons d’acheter, refusons l’usage de la monnaie bancaire au service du capital et de l’industrie, refusons au maximum les produits industriels et technologiques, entamons l’atterrissage vers une vie simplifiée, locale, reliée les uns aux autres par le choix et non par la norme. Ne remplaçons plus, réparons, faisons de peu. Revenons à la vie réelle. Consommons peu et peu d’énergie. Développons le zéro déchet comme trajectoire et comme indicateur de respect de la vie. Cultivons nous, apprenons des grands penseurs humanistes. Et reliés à la vie, produisons la nouvelle culture commune vivante, indépendante du capital, reliée aux uns, aux autres et au vivant.

Relions nous pour le meilleur puisque le pire nous le connaissons déjà pour peu qu’on ouvre les yeux sur le champ de bataille économique tel qu’il est, façonné par l’idéal capitaliste et son élite internationale profiteuse, amorale et finalement inhumaine.

À défaut de refaire le monde, abandonnons-le pour nous retrouver autour d’un feu, les yeux dans les yeux et l’âme au cœur de la Vie.

 

Mathias Jullien

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