Société en déroute : P.I.B., coke, crack, et lupanar…

Après la Suède, l’Espagne, L’Italie, c’est maintenant le Royaume-Uni qui intègrera, à partir de septembre 2014, dans le calcul du P.I.B. les revenus des activités illégales comme ceux générés par le trafic de drogue ou par la prostitution ( lien )

 » Il y a eu la civilisation athénienne, il y a eu la Renaissance, et maintenant, on entre dans la civilisation du cul  » J.L. Godard, Pierrot le Fou, 1966

Après la Suède, l’Espagne, L’Italie, c’est maintenant le Royaume-Uni qui intégrera, à partir de septembre 2014, dans le calcul du P.I.B. les revenus des activités illégales comme ceux générés par le trafic de drogue ou par la prostitution ( lien ). La Grande Bretagne a minutieusement fait ses calculs : avec 58000 prostituées estimées, 20 à 30 clients par semaine et autant de locations de chambres et en ajoutant le commerce de la drogue, ce sont plus de 12 milliards d’euros qui, par la magie de l’économie criminelle, viendront s’ajouter à la richesse du pays.

Ces nouvelles règles comptables sont imposées par la communauté européenne à ses membres pour gonfler le PIB et faire ainsi baisser le poids relatif de la dette. D’après Challenges, en Italie les prévisions de croissance vont ainsi doubler, en passant de 0,8% à 1,6 % en 2014, ce qui fera de ce pays un des moteurs de la zone euro.

Alors, pour répondre aux injonctions de Bruxelles et au lieu de tripatouiller les cartes des régions, qu’attend Hollande pour booster les statistiques françaises avec une ligne de coke et quelques maisons closes ? Pour l’instant l’INSEE fait de la résistance et tergiverse. Pour combien de temps encore ? Dans une vidéo postée sur le site de la chaîne Public Sénat, Philippe Marini (UMP), Président de la commission des finances du Sénat explique que la prostitution et la drogue devraient être pris en compte dans le calcul du produit intérieur brut (PIB). Il affirme :« Prenez la prostitution. Qu’est ce qu’on appelle comme telle ? Déclarée, pas déclarée ? Comment on évalue le volume que ça représente ? Alors on prend la population, on fait une statistique, puis on estime que le nombre de clients est de tant et qu’ils ont recours à cette forme de service tant de fois. C’est une activité qui existe. C’est même le plus vieux métier du monde ! »

Nulle doute qu’avec DSK comme président de la République, l’économie aurait carburé au Viagra. Il parait aussi que notre « excité national » rêve de revenir sous peu aux affaires. Il trouvera certainement les amphétamines nécessaires pour maintenir notre pays à sa place de 5ème puissance mondiale.

L’ECONOMIE CRIMINELLE : UNE MINE D’OR

Avec un chiffre d’affaires estimé entre 300 et 500 milliards de dollars, le trafic de drogue est devenu le deuxième marché économique au monde, juste derrière les armes, mais devant le pétrole ( 1). Le commerce de la drogue comme marchandise prohibée est extrêmement lucratif et le marché des stupéfiants, comme celui de la prostitution sont ceux qui connaissent actuellement la plus forte expansion.

La prostitution, qui s’est largement mondialisée sous l’emprise du crime organisé, est devenue un marché économique « très porteur », basé sur un modèle capitaliste « exemplaire », dénonce la Fondation Scelles dans son rapport ( lien ). Les victimes de la traite « sont « produites » à peu de frais dans des pays pauvres et/ou en proie aux conflits armés ou aux guerres civiles, et importées sur les marchés les plus porteurs en termes de marge réalisée », note le document. « Achetées parfois seulement quelques euros« , elles rapportent « une moyenne de 150 000 euros net par an dans les pays occidentaux« , insiste la Fondation. « Si on multiplie ce chiffre par 2,5 millions, qui est l’estimation de l’ONU sur le nombre de victimes de la traite des êtres humains (dont 85 % victimes d’exploitations sexuelles), ça commence à faire de l’argent en ne parlant que la prostitution en réseau« , note Yves Charpenel, Président de cette Fondation. Nos statisticiens européens ne pouvaient pas continuer à ignorer une telle « richesse », en faisant fi de la dignité humaine.

DE LA CREATION DES RICHESSES A LA DESTRUCTION DES VALEURS

Dans nos sociétés éreintées par une compétition sans cesse renouvelée, pour pouvoir à tout moment satisfaire ses envies et ses pulsions qu’entretiennent en permanence éveillées l’industrie des médias et de la publicité, l’individu est sommé de réussir à tout prix sa vie professionnelle et personnelle.

Tout est aussi devenu objet de consommation et rendu accessible moyennant une somme d’argent plus ou moins importante fixée par la seule loi de l’offre et de la demande. Le marché ne s’embarrasse pas de principes moraux ou philosophiques pour étendre son emprise et « la démocratie , qui devait permettre aux individus d’accéder au gouvernement de soi pour prétendre au gouvernement des autres, est ravalée à la promotion du simple droit à consommer pour tous , elle rime désormais avec la satisfaction pulsionnelle ». D.R. Dufour  » La cité perverse ».

L’idéologie dominante invite chacun à se perdre dans une quête effrénée de jouissance. Mais le marché, tout en attirant sans cesse le client vers de nouveaux désirs, entretient aussi savamment le manque en plaçant pour beaucoup la barre trop haute, réduisant l’individu en un être dominé par ses pulsions et torturé par ses frustrations, le plaçant ainsi dans la situation d’un drogué de la consommation.

l’idéologie dominante invite chacun à se perdre dans une quête effrénée de «  plus-de-jouir  » – See more at : http://www.humanite.fr/tribunes/dan…
l’idéologie dominante invite chacun à se perdre dans une quête effrénée de «  plus-de-jouir  ». Il faut ensuite montrer que cette satisfaction immédiate que le marché leur promet est une fausse promesse. Le marché ne peut pas tenir sa promesse, en particulier parce que son plein accès suppose un certain niveau de vie, en deçà duquel se situe la majorité de la population mondiale, mais aussi parce que sa dynamique est précisément le manque. C’est pour cela, d’ailleurs, qu’il crée toujours de nouveaux besoins. Le capitalisme libidinal et son marché nous placent dans la même situation que celle d’un drogué. – See more at : http://www.humanite.fr/tribunes/dan…
l’idéologie dominante invite chacun à se perdre dans une quête effrénée de «  plus-de-jouir  ». Il faut ensuite montrer que cette satisfaction immédiate que le marché leur promet est une fausse promesse. Le marché ne peut pas tenir sa promesse, en particulier parce que son plein accès suppose un certain niveau de vie, en deçà duquel se situe la majorité de la population mondiale, mais aussi parce que sa dynamique est précisément le manque. C’est pour cela, d’ailleurs, qu’il crée toujours de nouveaux besoins. Le capitalisme libidinal et son marché nous placent dans la même situation que celle d’un drogué. – See more at : http://www.humanite.fr/tribunes/dan…
l’idéologie dominante invite chacun à se perdre dans une quête effrénée de «  plus-de-jouir  ». Il faut ensuite montrer que cette satisfaction immédiate que le marché leur promet est une fausse promesse. Le marché ne peut pas tenir sa promesse, en particulier parce que son plein accès suppose un certain niveau de vie, en deçà duquel se situe la majorité de la population mondiale, mais aussi parce que sa dynamique est précisément le manque. C’est pour cela, d’ailleurs, qu’il crée toujours de nouveaux besoins. Le capitalisme libidinal et son marché nous placent dans la même situation que celle d’un drogué. – See more at : http://www.humanite.fr/tribunes/dan…

C’est sur ce terreau idéologique de l’ultra libéralisme que la prostitution et les trafics en tout genre ont prospéré ces dernières décennies.

Cette exacerbation permanente des désirs et des attentes des consommateurs rend de plus en plus difficile la maîtrise de ses pulsions et rend insupportable les frustrations. S’ii y a ceux qui trouvent le chemin de la réussite individuelle en restant plus ou moins dans les clous, il y a aussi tous ceux que l’argent et le pouvoir enivrent, laissant alors libre cours à leur libido du moment en s’achetant leur dose de plaisir ou en se perdant dans l’ivresse de paradis plus ou moins artificiels.

L’économie réelle ne cesse de s’essouffler, le flot de marchandises inutiles ne trouve plus preneur. La machine de production requiert de plus en plus de capitaux et de moins en moins de travail humain. La financiarisation de l’économie a conduit à l’ endettement et à l’insolvabilité des personnes physiques et des Etats. Les prélèvements, la destruction et l’empoisonnement des richesses terrestres ont atteint dans beaucoup d’endroits les limites de l’insoutenable.

Devant cette économie  » légale » moribonde, de plus en plus nombreux sont ceux qui ne trouvent plus le chemin de cette satanée réussite individuelle, vantée à longueur de journée par tous les écrans.

Sans autre possibilité, beaucoup viennent nourrir cette économie souterraine et criminelle qui ne cesse de prendre de l’ampleur. Dans cette compétition quotidienne, certains utilisent des subterfuges légaux ou illégaux pour tenter d’arriver à leurs fins, pour tomber ensuite dans le piège de nouvelles dépendances : dépendance aux drogues pour les consommateurs, dépendance à un enrichissement facile et à une consommation de biens sans limite pour les trafiquants.

Le problème est que l’on ne veut pas admettre que la cause profonde de ces dérives est bien dans ces dysfonctionnements dus à cette dépendance aveugle à l’argent et à la monétisation de la plupart des activités humaines, érigée en dogme dans ce monde ultra-libéral où règne une étrange alliance entre puritanisme et perversion. On continue à maintenir le décor factice d’une société bourgeoise qui laverait plus blanc que blanc, voire théocratique comme dans les monarchies du Golfe ou gouvernée par une dictature policière comme en Chine, en prônant l’obligation de la réussite individuelle pour pouvoir satisfaire ses besoins et ses envies tout en sanctionnant sévèrement l’individu dans ses errements individuels (2 ).

Mais, pour afficher à tout prix une croissance même artificiellement, cette dynamique économie souterraine, soeur siamoise de l’économie libérale ne pouvait pas rester à l’écart de l’étrange composition du Produit Intérieur Brut qui n’a rien a voir avec la qualité de la vie humaine ni avec un quelconque bien-être harmonieusement partagé. Dans la compétition mondiale, l‘IDH, l’Indice de Développement Humain n’a pas réussi à s’imposer.

Cette croissance du PIB, devenue qu’une vilaine excroissance,  » n’est plus depuis longtemps un facteur de mieux vivre, vu qu’elle est définie comme la progression quantitative d’un « truc technique », le PIB (Produit intérieur brut), lequel n’a pas été fait pour enregistrer la qualité de la vie individuelle et collective, les dommages écologiques, les inégalités, le temps libre, le bénévolat, le travail domestique, etc. Comme le disait en mars 1968 le sénateur Robert Kennedy, quelques mois avant son assassinat, « le PIB mesure tout, sauf ce qui fait que la vie vaut d’être vécue ».  » Jean Guadrey dans : « La croissance n’est pas la solution, c’est le problème »

Aujourd’hui, en y incluant l’économie criminelle, un pas de plus est franchi dans cette altération de la représentation de la réalité par des indicateurs factices.

LA SCIENCE DU PARTAGE

 

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(1) Chiffre de 2011 Rapport de l’ONU Informations extraites du site Planètoscope

(2 ) Une illustration de ce phénomène est l’interdiction du racolage, sous la présidence Sarkozy, qui a repoussé les prostituées dans des lieux encore plus sordides et n’a en rien apporté une solution à ce problème.

Source de cet article : Karol pour : http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/p-i-b-coke-crack-et-lupanar-152892

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